"Gilets jaunes" : un mouvement qui dure au risque de faire souffrir l'économie
Entre les graves dégâts commis par des manifestants et le ralentissement de l'activité provoqué par les nombreux blocages, le mouvement des gilets jaunes affecte plusieurs secteurs de l'économie française à l'approche de la période cruciale des fêtes de Noël.
Selon le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, les deux premières semaines d'actions des "gilets jaunes" ont déjà un impact "sévère et continu" sur l'économie.
Difficile à ce stade de prévoir les conséquences concrètes du mouvement sur la croissance et l'emploi "mais l'économie n'est pas bloquée", selon Mathieu Plane, économiste à l'OFCE qui craint davantage "le climat de défiance qui s'est installé".
En novembre, le moral des ménages a ainsi atteint son plus bas niveau depuis février 2015. "Cela risque de peser sur la consommation et donc sur l'activité, en poussant les Français à accroître leur épargne de précaution", souligne t-il.
Voici les principaux secteurs qui sont touchés par le mouvement.
- Commerce -
Baisse de 15 à 25% dans la grande distribution, chute de 20 à 40% dans le commerce de détail et de 15% pour certains marchés de gros et de marchandise fraîche: les fourchettes chiffrées avancées par Bruno Le Maire montrent un net recul des activités commerciales depuis le début des manifestations.
Les centres commerciaux sont aussi touchés avec une baisse de leur fréquentation de 14% samedi, selon l'institut Quantaflow.
Selon la fédération du commerce et de la distribution, le secteur a observé samedi une baisse de 15 à 25% de son chiffre d'affaires "par rapport à un samedi de fêtes".
Les organisations patronales s'alarment de ces chiffres, en particulier à l'approche de Noël où les professionnels du secteur estiment que le chiffre d'affaires du commerce de détail en France passe de 8 à 15 milliards d'euros environ.
Sans condamner le ras-le-bol fiscal exprimé par les "gilets jaunes", elles appellent le gouvernement au dialogue, à l'image du Medef qui estime que certaines attentes des contestataires "doivent être prises en compte".
- Tourisme -
Les images des violences urbaines à Paris ont fait le tour du monde, depuis samedi, en particulier les actes de vandalisme à l'Arc de Triomphe ou l'incendie de véhicules près des grands magasins.
Des évènements qui risquent de peser sur l'industrie du tourisme qui avait retrouvé des couleurs, après les attentats de 2015.
"C'est l'attractivité de Paris et l'attractivité de la France qui sont touchées de plein fouet", s'est inquiété Bruno Le Maire, lundi.
"Il y a un coup d'arrêt sur les réservations pour les fêtes de fin d'année, qui reculent de 10 à 15% par rapport à l'an dernier: cette clientèle de loisirs qui vient pour les fêtes, est par définition plus volage, elle va probablement boycotter Paris voire la France", s'inquiète Jean-Virgile Cance, président du Groupement national des chaînes hôtelières.
"Ces images d'une violence très forte, intolérable, sont une catastrophe pour l'image de la France (...) vu des Etats-Unis ou de Chine cela donne l'impression que la France est en guerre", ajoute t-il.
- Industrie -
Les manifestations ne se résument pas aux incidents à Paris. Un peu partout en France, plusieurs dépôts pétroliers sont régulièrement bloqués par des "gilets jaunes".
De nombreuses stations-services du Finistère, des Côtes d'Armor et du Morbihan étaient en rupture totale ou partielle de carburant lundi matin.
"La situation n'est pas critique à ce stade. La logistique s'organise pour qu'il y ait le minimum d'impact", par exemple avec des tournées renforcées dans les endroits où il y a des difficultés", rassure l'Union française des industries pétrolières (Ufip).
L'organisation rappelle que "les achats de précaution (de carburant) sont à proscrire car cela autogénère une pénurie et ont plus d'impact que le mouvement lui-même".
Total qui annonce que 6% de ses stations-services sont en rupture de carburant fait la même recommandation en demandant à ses clients de ne pas modifier leurs habitudes de consommation.
- Transport -
Le blocage des routes et des autoroutes est l'un des moyens d'action privilégié des "gilets jaunes" ce qui n'est pas sans conséquences pour les transporteurs routiers.
Depuis le 17 novembre et le début des manifestations, les entreprises de transport routier de marchandises (TRM) et de logistique ont estimé lundi à 400 millions d'euros les pertes d'exploitation subies.
"L'inactivité forcée du TRM, secteur stratégique, entraînera dans les plus brefs délais la paralysie de l’ensemble de l'économie française", préviennent les entreprises qui pointe "une situation dramatique".
- Agroalimentaire -
L'Association nationale des industries alimentaires (Ania) a également tiré la sonnette d'alarme lundi en estimant que les pertes du secteur pourraient s'élever à 13,5 milliards d'euros.
Les fêtes de fin d'année représentent traditionnellement 20% du chiffre d'affaires de ces entreprises, essentiellement des PME.
L'Ania pointe une "désorganisation de la production", débouchant sur du "chômage technique" ainsi qu'une "désorganisation totale" dans ses relations avec la grande distribution.
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