Les ponts Morandi : un modèle remis en question

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Par AFP - Paris
Publié le 16 août 2018 - 20:00
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Photo prise le 29 avril 2015 du pont Wadi al-Kouf , conçu par l'ingénieur civil italien Riccardo Morandi, à l'ouest de Bayda, en Libye
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© Abdullah DOMA / AFP/Archives
Photo prise le 29 avril 2015 du pont Wadi al-Kouf , conçu par l'ingénieur civil italien Riccardo Morandi, à l'ouest de Bayda, en Libye
© Abdullah DOMA / AFP/Archives

Une structure en béton, peu de câbles pour équilibrer la route où passent les véhicules: c'est la marque de fabrique d'une figure de l'ingénierie, l'Italien Riccardo Morandi. C'est aussi le modèle du pont de Gênes qui s'est écroulé mardi.

D'une longueur de 1.182 mètres, le viaduc avait été construit en quatre ans et inauguré en 1967.

Le pont de Gênes "est vraiment très, très spécifique" explique à l'AFP Jean-Michel Torrenti, ingénieur spécialiste du béton.

Sa structure se rapproche du pont à haubans, une variété de pont suspendu où le tablier - la structure sur laquelle roulent les voitures - est soutenu de manière équilibrée par des câbles fixés au sommet ou le long de pylônes.

Le pont de Gênes était lui constitué de "deux tirants en béton" et non pas "d'une série de câbles en acier. Vous avez juste une suspente, donc s'il y a une suspente qui casse ça ne peut pas tenir", explique M. Torrenti qui souligne qu'il s'agit d'une technique qui n'est plus utilisée aujourd'hui.

"Il faut attendre le résultat de l'enquête, mais avec un pont comme celui-ci, construit comme une balance, il suffit qu'il se déséquilibre un peu pour que tout l'édifice s'écroule", ajoute Marzia Marandola, auteur d'une thèse sur Riccardo Morandi.

"C'est un mécanisme sophistiqué qui nécessite qu'il n'y ait pas trop de variations de poids. C'est un équilibre très délicat, calculé pour un poids précis, avec des marges de sécurité, bien sûr", poursuit-elle.

D'autres architectes défendent néanmoins cette technologie, à l'image de Marc Mimram, ingénieur spécialiste de la construction de ponts.

"Je ne pense pas que ce soit la technologie de construction qui soit en cause. Il ne faut pas se précipiter en jetant le haro sur le concepteur", décédé en 1989 à l'âge de 87 ans, estime M. Mimram.

"Il a inventé une typologie très intéressante", avec des ponts qui "sont à la fois posés" et "suspendus", détaille-t-il.

Grâce à un appui en forme de "V" qui porte l'ouvrage, "la portée" - la distance de pont entre deux appuis - est ainsi réduite, un effet donnant "une très grande qualité harmonieuse à ces ouvrages".

Selon l'ingénieur, le problème trouverait son origine dans la maintenance: "ces ouvrages ont besoin d'être entretenus et suivis" car "le béton fissure toujours", indique-t-il, notant qu'il y a "vraisemblablement un problème d'entretien".

D'autres ouvrages similaires existent dans le monde: le pont de Maracaibo au Venezuela, ouvert en 1962, ou celui de Wadi al-Kouf en Libye, achevé neuf ans plus tard.

Le premier s'était effondré en 1964 lorsqu'un pétrolier avait percuté ses piles après une panne.

Le deuxième a été temporairement fermé en octobre dernier après une polémique sur son état, explique Mohamed Ali Abdelkader, ministre chargé des Transports du gouvernement parallèle (non reconnu par la communauté internationale), basé à Benghazi, dans l'est de la Libye, à une centaine de kilomètres de l'endroit où se trouve le pont.

Les experts mandatés ont affirmé que l'ouvrage était "en bon état mais qu'il y avait un espacement d'environ 10 cm entre les raccords métalliques qui se détendent à la chaleur à cause de l'accumulation de sable ou de débris", précise le ministre.

"Nous avons procédé au nettoyage et veillons à ce que les travaux d'entretien se déroulent régulièrement. Le pont est aujourd'hui ouvert à la circulation", ajoute-t-il.

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