Au Mondial de Paris, l'industrie automobile fait les yeux doux aux femmes
"Nos entreprises offrent tellement de métiers différents, qui ne sont pas réservés aux garçons!". Devant un groupe de lycéennes, Frazana Gulam, ingénieure en électronique, vante les atouts d'une industrie automobile qui cherche à faire plus de place aux femmes.
Employée de l'équipementier français Plastic Omnium, elle est l'une des marraines de l'association Elles Bougent, mobilisées sur les stands du Mondial de l'auto de Paris pour attirer les femmes dans un secteur qui peine à en recruter.
Voiture hybride du futur, véhicule à hydrogène... Frazana présente les technologies développées par Plastic Omnium devant une poignée de lycéennes venues de l'Oise. Elles l'écoutent attentivement et posent des questions.
"On se projette davantage quand c'est présenté par les femmes", juge Hiba, 18 ans. "Attirée par les voitures, surtout les sportives", la jeune fille n'est cependant "pas très sûre" de ce qu'elle fera après son bas S option sciences de l'ingénieur.
"Les filles se freinent toutes seules", regrette Frazana Gulam, "nous voulons les pousser à avoir plus confiance en elles".
- "Tout est possible" -
"Il faut des modèles pour leur montrer que tout est possible, qu'il n'y a pas de plafond de verre", abonde Linda Jackson. Cette Britannique de 59 ans est la directrice générale de Citroën et l'une des rares femmes au monde à la tête d'un constructeur automobile.
Arrivée dans le monde de l'automobile un peu par hasard, la dirigeante a désormais 40 ans de carrière et se souvient avoir dû "travailler plus, faire plus (s)es preuves pour être crédible". Chez Citroën, elle veut augmenter la part de femmes, actuellement d'environ 35%, tous métiers confondus.
Chez Renault, les femmes représentent 24,8% des effectifs du groupe dans le monde et plus de 20% du comité exécutif.
En France, le constructeur vise le recrutement de 30% de femmes sur des postes techniques et 50% de femmes sur les profils commerciaux, explique à l'AFP Christine Bruhat, responsable de la diversité au sein du groupe.
Pour elle, les avantages de la mixité des équipes sont évidents: "On résout les problèmes en un temps plus court quand on n'a pas la même façon de voir les choses".
"C'est aussi une question de bon sens: les femmes représentent un peu plus de la moitié de l'humanité, on sait qu'elles interviennent dans 60 à 70% des cas, directement ou indirectement, dans l'achat des voitures, il faut qu'on reflète dans nos équipes la diversité de nos clients", explique-t-elle à l'AFP.
Marie-Sophie Pawlak, fondatrice d'Elles Bougent, salue une "vraie avancée, mais progressive". "Sur les recrutements de jeunes diplômés, les constructeurs comme les équipementiers tournent autour de 25-30% de femmes, alors qu'il y a dix ans, on était plutôt à 10%".
- Orientation sans préjugés -
Pour elle, l'automobile comme d'autres secteurs industriels et technologiques peut être une aubaine pour celles qui osent franchir le pas alors que l'Hexagone manque d'ingénieurs.
"Dès lors qu'on décroche son bac S, on est capable d'être ingénieur, il existe différents types de diplômes et d'écoles (...) et quand on est ingénieur, derrière c'est l'emploi assuré", encourage-t-elle.
Tout se joue donc au moment de l'orientation des jeunes filles. "Les jeunes femmes sont moyennement attirées par les carrières techniques", relève Mme Bruhat, évoquant une question "sociétale".
Signe qu'une prise de conscience est en cours, le Mondial a pour la première fois mis l'accent sur le sujet de l'emploi des femmes, encore absent des autres grands salons automobiles.
Béatrice Duboisset, qui a participé à l'organisation de cet événement, met en cause "les clichés" à l'école et dans les familles.
Or, "c'est important de montrer que dans ces industries historiquement préemptées par les hommes, les femmes peuvent s'épanouir", qu'il s'agisse de carrosserie, de vente ou de communication.
Les constructeurs font par ailleurs des efforts pour mettre fin aux représentations sexistes des femmes sur les salons: des deux côtés de l'Atlantique, les mannequins court-vêtus se font plus rares.
Et pour l'édition 2018 du Mondial, les hôtesses de Citroën et de Renault, habillé(e)s avec sobriété, sont pour moitié... des hommes.
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