Colère et incompréhension à Mantes-la-Jolie après la vidéo des jeunes interpellés

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Par Antoine GUY - Mantes-la-Jolie (AFP)
Publié le 07 décembre 2018 - 17:08
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Des policiers arrêtent des jeunes près du lycée Saint-Exupéry, le 6 décembre 2018 à Mantes-la-Jolie
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© Céline AGNIEL / AFP
Des policiers arrêtent des jeunes près du lycée Saint-Exupéry, le 6 décembre 2018 à Mantes-la-Jolie
© Céline AGNIEL / AFP

"Ils les ont traités comme des chiens!" Au lendemain de l'interpellation de 151 jeunes aux abords d'un lycée de Mantes-la-Jolie, parents et professeurs se sont réunis vendredi pour exprimer leur colère après la diffusion d'une vidéo montrant des lycéens à genoux, entravés pour certains, entourés de policiers.

Les images tournent en boucle sur les téléphones portables. Des dizaines de lycéens, en rang, à genoux dans la terre et les mains sur la tête sont tenus en respect par des policiers. D'autres, face tournée contre un mur, ont les mains attachées dans le dos. "Voilà une classe qui se tient sage", s'exclame une voix derrière la caméra. L'auteur de cette vidéo est jusque-là inconu.

"C'est humiliant, injuste", s'indigne Rachida Sriti dont le fils, 17 ans, fait partie des interpellés. Jamais il n'a eu d'ennuis avec la justice auparavant, assure-t-elle.

"Je l'ai laissé aller exprimer son mécontentement contre Parcoursup et le voir se faire rafler, c'est humiliant pour une mère", raconte-t-elle à l'AFP.

Au total, 151 jeunes âgés de 12 à 21 ans ont été interpellés jeudi. La grande majorité a entre 16 et 18 ans. Toutes les gardes à vue avaient été levées vendredi en milieu d'après-midi et, parmi les interpellés, au moins deux tiers ont été relachés après un simple rappel à la loi.

Les deux lycées mitoyens, Jean-Rostand et Saint-Exupéry qui rassemblent 2.600 élèves à eux deux, sont désormais à l'arrêt.

Jeudi matin, les enseignants étaient en pleine assemblée générale lorsqu'ils ont entendu que ça dégénérait à l'extérieur. "Le rectorat a alors décidé de nous confiner", raconte Arnaud Taurines, professeur d'histoire-géographie, qui comme ses collègues n'a rien vu de la scène d'interpellation.

"Vers 13h30-14h00, on nous a dit que c'était sécurisé et qu'on pouvait sortir", poursuit sont collègue, François Maillard, professeur d'économie. Mercredi déjà, de violents incidents avaient contraint Saint-Exupéry à adopter une mesure de confinement avec volets baissés et interdiction de sortir de classe.

Chez beaucoup de professeurs comme chez les parents d'élève, on ne comprend pas pourquoi le lycée n'a pas été fermé jeudi par le rectorat. "Même aujourd'hui, l'académie a décidé de ne pas fermer le lycée, s'étonne Arnaud Taurines, donc nous, les professeurs, avons envoyé un mot aux parents pour leur dire de garder leurs enfants chez eux".

- Pas contraire aux lois -

Un peu plus loin, aux abords du jardin du pavillon où a été tournée la vidéo, juste en face de Saint-Exupéry, quelques lycéens racontent comment les choses se sont passées. Certains ressortent leurs vidéos Snapchat et les montrent aux nombreux journalistes venus recueillir leurs témoignages.

Bachir, 15 ans et élève de seconde, fait partie de ceux qui ont été interpellés.

Capuche verte sur la tête, il raconte: "On était dispersés en deux groupes. En haut (dans le jardin du pavillon), ceux avec des masques, des armes ou des stupéfiants. En bas (devant l'entrée des locaux des Resto du Coeur), ceux qui n'avaient rien".

Lui était en bas, les mains liées par un serre flex "parce qu'ils n'avaient plus de menottes". Il a passé six heures en cellule avant d'être libéré sans poursuites.

La colère des parents et des professeurs est également partagée par les médiateurs du Val-Fourré, un quartier sensible de Mantes-la-Jolie voisin des établissements.

"J'ai pété un plomb en voyant la vidéo", explique Mamadou Ba, l'un de ces médiateurs. "Toute la nuit, on a dû parler avec les petits pour qu'il n'y ait rien, c'est dans l'intérêt de personne que ça pète", s'énerve-t-il.

Côté préfecture, on assume pleinement le recours à une telle méthode. Certains jeunes interpellés "avaient mis le feu, extrait des bonbonnes de gaz d'un pavillon la veille, étaient armés au moment de l'interpellation d'armes blanches pour certains, de bâtons", a détaillé le préfet des Yvelines, Jean-Jacques Brot.

"Je ne dis pas que c'est la méthode la plus optimale, je dis qu'elle n'est pas contraire aux lois et règlements", a-t-il insisté. Le Défenseur des droits a malgré tout annoncé l'ouverture d'une enquête.

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