De la PMA à l'eugénisme nazi : Wauquiez temporise, le tollé demeure

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Par Paul AUBRIAT - Paris (AFP)
Publié le 19 novembre 2018 - 15:37
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Laurent Wauquiez. Photo prise à Divonne-les-Bains (Ain), le 20 septembre 2018.
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Le président des Républicains Laurent Wauquiez lors des journées parlementaires de LR, le 20 septembre 2018 à Divonne-les-Bains
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"Très excessifs", "abjects", "irresponsables": les propos de Laurent Wauquiez, qui a lié l'extension de la procréation médicalement assistée à un risque d'eugénisme, en faisant une référence au nazisme, avant d'y apporter lundi un bémol, ont provoqué un tollé dans la majorité, à gauche, et chez les militants pro-PMA.

Dimanche, le président des Républicains avait considéré que l'ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes "mènera(it) nécessairement" à la gestation pour autrui (GPA), "la marchandisation des gamètes" et "l'eugénisme". "Tout ceci a un nom, c'est l'eugénisme; tout ceci a été fait par un régime, c'est le nazisme", avait-il déclaré devant les militants de Sens commun, le courant conservateur de LR, en appelant à "défendre le mode naturel de reproduction, de filiation, de transmission".

Lundi, dans un tweet, il a cherché à nuancer en affirmant avoir "voulu rappeler les leçons de l'Histoire". "Nos débats contemporains ne sont évidemment pas les mêmes mais quand on parle d'éthique, il faut être très vigilant sur les chemins que nous ouvrons", a-t-il ajouté. Il doit en outre s'exprimer lundi soir au 20H00 de TF1.

"Évidemment, aucun acte médical en France ne peut conduire à l'eugénisme. C'est dévoyer le sens des mots. C'est irresponsable pour un soi-disant responsable politique", lui a répondu la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, qui doit porter un projet de loi ouvrant la PMA pour toutes, et dont la discussion doit avoir lieu en 2019.

Son collègue Laurent Nuñez, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Intérieur, a de son côté estimé que les propos lui paraissaient "très excessifs". "Et c'est un euphémisme", a-t-il ajouté.

- Autorisée depuis 1994 -

Dimanche, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, avait déjà fustigé des "outrances les plus abjectes" de la part du patron de LR, alors que Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'égalité femmes-hommes et de la lutte contre les discriminations, y voyait un "intolérable mélange de méconnaissance du sujet et d'agressivité contre les femmes".

Le numéro deux du gouvernement, François de Rugy, a pour sa part dénoncé un "dérapage scandaleux" et "une injure faite aux couples hétérosexuels qui l'ont déjà pratiquée, et à tous ceux qui la pratiqueront demain".

La procréation médicalement assistée par don de gamètes anonyme est déjà autorisée en France, consacrée par une loi de 1994, mais pour les seuls couples de sexes différents infertiles ou risquant de transmettre une maladie à l'enfant.

Les propos de Laurent Wauquiez ont par ailleurs été qualifiés d'"irresponsables et stupides" par le PS, alors que Gaylib, l'association LGBT de centre droit rattachée au Mouvement radical, a fustigé des "insultes envers nos familles".

- Josef Mengele -

Face à ce ce tollé, Les Républicains ont défendu la parole de leur président, lundi, lors d'une conférence de presse au siège parisien du parti.

"Nous sommes contre la marchandisation du corps, contre les mères porteuses et c'est pourquoi nous nous opposons à la PMA", a martelé l'une des porte-parole de LR, Laurence Sailliet. "Oui, nous le maintenons, il y a un risque d'eugénisme s'il y a commercialisation des gamètes", a-t-elle ajouté.

Un sénateur LR, Henri Leroy, avait déjà fait polémique la semaine dernière sur le sujet, en évoquant le médecin nazi Josef Mengele, auteur d'expérimentations "médicales" sous le IIIe Reich. Sur ce point, la porte-parole n'a pas souhaité commenter.

La sortie de Laurent Wauquiez, et les réactions qu'elle a suscitées, éloigne un peu plus les espoirs d'un "débat apaisé" souhaité sur le sujet par le gouvernement.

Mais après l'annonce la semaine dernière d'un probable report en juin du débat du texte à l'Assemblée, initialement prévu en janvier, d'aucuns ont appelé à accélérer: "Voilà typiquement le genre d'ignominies que nous voulons éviter d'entendre sur la PMA", a fait valoir le président de SOS Homophobie, Joël Deumier. "(C'est) pourquoi nous demandons au gouvernement que le débat sur le sujet ne s'éternise pas: l'égalité n'attend pas".

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