Haines tenaces et beaux rivages : prison avec sursis au procès d'une histoire corse

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Par Juliette MONTESSE - Paris (AFP)
Publié le 10 septembre 2018 - 18:20
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Dans un paradis de carte postale caressé par les eaux limpides de Corse du Sud, Paul Canarelli avait, il y a douze ans, accaparé le fortin d'une milliardaire. Lundi, le propriétaire du somptueux domaine de Murtoli a été condamné à trois mois de prison avec sursis.

Après plus de dix ans de procédures variées, le tribunal correctionnel de Paris, chargé du volet pénal de cette chronique insulaire, a également condamné M. Canarelli, 51 ans, à 20.000 euros d'amende.

Son tort ? S'être approprié, entre 2006 et 2009, la superbe demeure de son adversaire, Anne de Carbuccia, enclavée dans ses terres, en changeant ses serrures - une violation de domicile. Mais aussi, selon les juges, y avoir volé certains effets personnels de la milliardaire et avoir dégradé les lieux en menant des travaux qui, selon elle, ont dénaturé ce joyau.

Cette maison fortifiée du XVIIe siècle, nichée dans le maquis surplombant les eaux du golfe de Roccapina, entre Sartène et Bonifacio, est souvent apparue dans des publicités ou magazines sur papier glacé.

Visible uniquement au bout d'une route privée ou, pour les plus tenaces, après des heures de marche sur des sentiers de chèvres, elle est implantée à l'extrémité du fameux domaine de Murtoli, une réserve agricole et de chasse parsemée de bergeries de luxe prisées des milliardaires et de personnalités comme Nicolas Sarkozy.

Mme de Carbuccia, artiste et épouse du milliardaire italien Alberto Tazartes, l'avait achetée en 2001 à son précédent propriétaire, Paul d'Ortoli.

La quiétude de ces rives s'était troublée en juin 2005 quand Paul Canarelli, qui avait réalisé qu'elle n'en était pas locataire mais propriétaire, avait contesté la vente de la bâtisse et brandi son droit à l'exploiter en la louant à des tiers, invoquant un bail commercial oral avec Paul d'Ortoli.

En 2006, il avait fait changer les serrures de la maison, dont Anne de Carbuccia est restée privée jusqu'à ce que la justice civile la conforte dans ses droits, en 2009.

- "En ruines" -

La condamnation de M. Canarelli est bien supérieure aux 5.000 euros d'amende requis par le parquet, en son absence, lors de l'audience en juillet. L'accusation avait demandé sa relaxe pour les faits de vol et dégradations, estimant que son intention de commettre ces délits n'était pas établie, puisqu'il y avait fait des travaux "dans le but de la louer".

Il devra verser 15.000 euros de dommages et intérêts à Mme de Carbuccia, au titre de son préjudice moral, et 10.000 euros pour les frais de justice. Elle demandait, en tout, 400.000 euros.

Anne de Carbuccia "est heureuse, car justice est passée", a réagi son avocat, Jean-Pierre Versini-Campinchi. "Enfin, on a reconnu qu'elle a été victime d'une injustice, d'un comportement délictueux".

A la barre, cette grande femme brune, devenue l'adversaire acharnée de Paul Canarelli au fil de leurs altercations, des recours aux gendarmes et aux huissiers, avait raconté son paradis perdu, une maison "unique" par sa beauté.

Elle ne peut, aujourd'hui encore, l'habiter : le fortin est "en ruines" depuis un dégât des eaux survenu lorsque Paul Canarelli l'occupait.

"Treize ans plus tard, je n'ai pas pu remettre en état ma maison", avait-elle déploré, évoquant "certaines pressions" dissuadant les entreprises locales de mener ces travaux. M. Canarelli, "qui dans un certain monde est influent, en profite pour faire de Murtoli une zone de non-droit" pour préserver son "opération immobilière", avait-elle avancé.

L'avocat de Paul Canarelli avait plaidé sa relaxe, convoquant le bail dont se prévaut son client et fustigeant le "manichéisme" de la partie adverse, qui "veut faire du buzz" avec cette "affaire corse" en pointant "les bons et les méchants". Contacté par l'AFP, il n'était pas joignable dans l'immédiat.

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