L'ex-secrétaire d'Etat Georges Tron acquitté sept ans après des accusations de viols
La thèse d'un élu abusant de son pouvoir pour "vampiriser ses victimes" n'a pas convaincu la cour : l'ex-secrétaire d’État Georges Tron a été acquitté jeudi des accusations de viols et agressions sexuelles de deux ex-employées municipales, tout comme son ex-adjointe à la Culture à la mairie de Draveil (Essonne).
Six ans de prison ferme avaient été requis contre Georges Tron, comparé au "comte Dracula", et quatre ans contre Brigitte Gruel. Pour l'avocat général, l'élu avait "abusé de son pouvoir avec ses subordonnées" puis tenté de "politiser une affaire purement sexuelle" en dénonçant un complot.
Virginie Ettel et Eva Loubrieu, 41 et 44 ans, accusaient Georges Tron de leur avoir imposé, avec Brigitte Gruel, des attouchements et des pénétrations digitales entre 2007 et 2010.
Depuis le début de l'affaire, en mai 2011, ils ont toujours clamé leur innocence.
Dans ses motivations lues par son président Philippe Coirre, la cour a estimé que Georges Tron et Brigitte Gruel "avaient bien participé à des ébats sexuels en présence de tiers" dans un "contexte général hypersexualisé". Et que si les "scènes à caractère sexuel évoquées par les plaignantes" étaient "avérées", ces dernières n'étaient pas en "situation de contrainte". "Nonobstant la capacité manifeste de Georges Tron à imposer sa volonté comme à exercer des pressions", est-il précisé.
Les deux sexagénaires ont toujours contesté l'existence de telles scènes.
La cour a aussi considéré que les plaignantes étaient dans une "logique de vengeance" après un licenciement pour Eva Loubrieu et un changement de poste pour Virginie Ettel.
Georges Tron et Brigitte Gruel soutenaient que le "ressentiment" de ces anciennes employées avait été exploité par leurs opposants locaux d'extrême droite.
A l'issue du verdict, ils ont longuement embrassé leurs proches venus les soutenir. Très vite rappelés à l'ordre, certains ont applaudi quand l'acquittement a été prononcé.
"C'est l'illustration que la justice n'est pas la justice médiatique où Georges Tron a été condamné dans des conditions inadmissibles durant sept ans, privé de la possibilité de poursuivre sa carrière, moqué", a réagi l'avocat de Georges Tron, Éric Dupond-Moretti.
"Un appel est possible mais ce serait un appel de vanité et d'orgueil", a-t-il également estimé.
Pour le conseil de Brigitte Gruel, Frank Natali, "justice a été rendue et Mme Gruel n'aspire aujourd'hui qu'à une seule chose : à la paix et à retrouver les siens et sa famille".
Le ministère public a dix jours pour faire appel.
- "Beaucoup d'amertume" -
"La déception est grande, beaucoup d'amertume. Le combat que je mène depuis des années, je tiens à dire que je ne lâcherai pas", a de son côté réagi, très émue, Eva Loubrieu.
Virginie Ettel, qui pleurait à l'énoncé de la décision, a fait un malaise quelques minutes plus tard.
"Lorsque qu'une cause est juste on ne s'arrête pas après avoir perdu une bataille, a déclaré son avocat Vincent Ollivier. C'est une femme d'un courage inouï, elle va se remettre."
"J'attends donc que le parquet général fasse appel et j'ai confiance dans cette logique judiciaire", a-t-il poursuivi.
Sur Twitter, la porte-parole d'Osez le féminisme, Raphaëlle Rémy-Leleu, a déploré ce verdict: "Colère, dégoût... A toutes les victimes de viols et d'agressions sexuelles... Courage. Nous vous croyons. Nous sommes là pour vous. Nous obtiendrons, un jour, ensemble, une justice à la hauteur."
Dans ses réquisitions mercredi, l'avocat général avait également demandé que les accusés soient déclarés inéligibles pendant cinq ans et inscrits sur le fichier des délinquants sexuels.
L'élu de l'Essonne, à la tête de Draveil (30.000 habitants à 25 km de Paris) depuis 1995 et conseiller départemental, avait été contraint à démissionner le 29 mai 2011 de son poste de secrétaire d'État à la Fonction publique du gouvernement Fillon.
Des dizaines de personnes ont été entendues pendant quatre semaines d'audience - une durée exceptionnelle, un dossier de viol étant généralement examiné sur trois jours.
L'affaire avait éclaté dix jours après la retentissante arrestation à New York de Dominique Strauss-Kahn, alors patron du Fonds monétaire international, accusé de viol par une femme de chambre.
L'acquittement de Georges Tron est prononcé un an après la déflagration Harvey Weinstein, qui a soulevé une vague mondiale de libération de la parole de femmes victimes de viols, agressions et harcèlement sexuels.
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