Les agriculteurs vont battre le pavé pendant une semaine
Après les "gilets jaunes" et les ambulanciers, c'est au tour des agriculteurs d'exprimer leur mécontentement, dans un mouvement distinct appelé à durer toute une semaine, suscité notamment par un ras-le-bol de l'"agri-bashing" et la crainte de voir le gouvernement reculer sur l'application de la loi Alimentation.
Autre préoccupation des agriculteurs, qui rejoint un des griefs du mouvement des "gilets jaunes", l'augmentation des contraintes et notamment des charges fiscales pesant sur leur activité.
Cet étalement du mouvement sur la semaine répond en premier lieu, à en croire la présidente de la FNSEA Christiane Lambert, à un impératif pratique: en pleine campagne pour le renouvellement des élus des chambres d'agriculture, les FDSEA et Jeunes agriculteurs ont, selon les départements, des contraintes d'organisation différentes.
Marre de l'"agri-bashing"
C'est le thème qui revient en premier pour expliquer la colère des agriculteurs et qui ne cesse, depuis quelques semaines, d'animer les réseaux sociaux: les agriculteurs se sentent pointés du doigt, notamment pour leur usage des pesticides, mais pas seulement.
Ainsi, une carte publiée la semaine dernière par Greenpeace, qui prétendait répertorier l'ensemble des fermes-usines en France, a provoqué un tollé dans les campagnes.
Sa validité a été contestée par des syndicats comme la FNSEA, mais aussi la Confédération paysanne, ainsi que par le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume, pour qui la plupart des exploitations recensées ne sont "pas des fermes-usines".
Preuve que le sujet monte en puissance, le ministre s'est posé la semaine dernière en "bouclier face à l'agri-bashing" ou dénigrement systématique de l'agriculture.
Mais les agriculteurs accusent également le gouvernement de les stigmatiser en creux, avec la mise en place d'une "plate-forme glyphosate". Selon Mme Lambert, "les agriculteurs se sentent humiliés" par cette plate-forme, sur laquelle les agriculteurs peuvent déclarer leur sortie des usages de cet herbicide controversé, afin de partager leur expérience.
La loi, vite!
Ils la réclament à corps et à cris: la loi Agriculture et Alimentation devait notamment permettre de mieux rémunérer les agriculteurs, dont près de la moitié vit avec moins de 350 euros par mois. Deux ordonnances cruciales, sur le relèvement du seuil de revente à perte et la limitation des promotions, devaient être présentées ce mercredi en conseil des ministres.
Mais le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume en a confirmé le report, à cause de l'actualité brûlante des "gilets jaunes".
"C'est reporté, mais il ne faut pas qu'il y ait de reculade de la part du gouvernement. Il y a encore deux conseils de ministres avant la trêve des confiseurs pour les passer, et l'important c'est que ça puisse s'appliquer au 1er janvier", a prévenu Mme Lambert.
M. Guillaume a promis une application "en janvier ou en février", soit avant la fin des négociations annuelles avec la grande distribution.
Les distributeurs de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD, dont ne fait pas partie le principal contempteur de la loi, Michel-Edouard Leclerc) ont prudemment pris acte du report. Ils souhaitent "que l'ensemble des dispositions prévues puisse s'appliquer rapidement, au plus tard dans le cadre des nouveaux contrats commerciaux".
Haro sur les taxes
Comme les "gilets jaunes", les agriculteurs entendent exprimer une forme de ras-le-bol fiscal, à en croire Christiane Lambert. "Il y a aussi les charges en plus et les contraintes", a-t-elle déclaré, évoquant "une transition écologique à marché forcée, au pas cadencé", et prenant l'exemple de la redevance pour pollution diffuse.
"C'est une taxe écologique de 140 millions d'euros. Cette année, le gouvernement veut l'augmenter de 50 millions d'euros, c'est déjà énorme. Mais quand on fait les calculs, en réalité, c'est une augmentation de 115 millions d'euros", a affirmé Mme Lambert.
Elle a toutefois confirmé que ce mouvement ne rallierait pas les "gilets jaunes": "Ils ont voulu un mouvement apolitique, asyndical, je respecte" cela, a déclaré Mme Lambert.
Si la forme que prendront ces manifestations reste, selon elle, à préciser, "évidemment, les préfectures et les parlementaires seront des objectifs et des lieux où nous porterons nos revendications".
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