Service national universel : la contrainte et le coût pourraient braquer la jeunesse

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Par Isabelle TOURNÉ - Paris (AFP)
Publié le 16 mai 2018 - 12:41
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Le président de la République Emmanuel Macron au palais de l'Elysée, le 15 mai 2018
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© GONZALO FUENTES / POOL/AFP/Archives
Le président de la République Emmanuel Macron au palais de l'Elysée, le 15 mai 2018
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Promesse d'Emmanuel Macron, le service national universel actuellement à l'étude pourrait braquer une jeunesse, déjà bousculée par plusieurs réformes, qui semble hostile à son caractère obligatoire et à son coût potentiellement élevé.

Un groupe de travail mandaté par l'Elysée a récemment remis ses propositions au chef de l'Etat. Parmi les principales figure un service national d'un mois obligatoire entre 15 et 18 ans, dont deux semaines en internat pendant les vacances scolaires, suivi d'une phase d'engagement citoyen de "trois à six mois avant 25 ans".

Selon le groupe de travail, le dispositif débuterait mi-2019 par une phase pilote, avant d'être progressivement étendu à 700.000 jeunes d'ici 2026.

A l'origine, le candidat Macron avait promis pendant sa campagne de rétablir un "service militaire universel" obligatoire et d'une durée d'un mois. En février, le chef de l'État s'est finalement prononcé en faveur d'un service "obligatoire" plus long, recentré sur un engagement plus civique que militaire.

Ses ultimes arbitrages sont attendus d'ici quelques semaines. Mais plusieurs organisations de jeunesse, qui doivent tout juste digérer une réforme du bac récemment annoncée et de nouvelles modalités d'accès à l'université, ont déjà fait part de leur hostilité au projet.

Opposé à ce service national, le syndicat étudiant Unef n'y voit "aucune plus-value". "On ne souffre pas aujourd'hui d'un déficit d'engagement de la jeunesse", estime sa présidente, Lilâ Le Bas. "Et ce n'est certainement pas en imposant un dispositif infantilisant et paternaliste qu'on permettra aux jeunes de s'engager davantage".

La Fage, premier syndicat étudiant, fustige "une mesure démagogique".

"On peut partager les objectifs fixés: le besoin en mixité sociale et le sujet de l'émancipation citoyenne. Sauf qu'on pense que la méthode est mauvaise", explique son président, Jimmy Losfeld. "Créer un nouveau dispositif obligatoire qui s'appuie notamment sur l'armée en dehors de l'école, c'est un aveu d'échec de notre système éducatif, puisque c'est à l'école de créer de la mixité et d'émanciper le citoyen de demain", poursuit-il.

Les armées pourraient être notamment sollicitées pour former au moins une partie des encadrants du service national universel.

- "Ligne rouge" -

Surtout, le syndicat s'inquiète du coût du projet, évalué à "quelques milliards d'euros" par le groupe de travail. "Le volet financier va constituer une ligne rouge", prévient M. Losfeld.

"Cela fait des années qu'on réclame un milliard d'euros supplémentaires par an pour l'enseignement supérieur et qu'on nous répond que c'est compliqué. Nous n'accepterons pas de voir ce budget sacrifié au profit du service national", argumente-t-il.

Le syndicat, qui a soutenu la réforme de l'accès à l'université face aux critiques de sélection, se dit "prêt à mobiliser" contre l'instauration de ce service universel obligatoire.

Absents des manifestations et des actions de blocage dans plusieurs facs, les lycéens pourraient aussi se faire entendre sur ce sujet. L'un des syndicats, l'UNL, s'interroge sur l'utilité d'un tel projet "dans un contexte où les classes sont saturées et où, pour réaliser des économies, le gouvernement instaure la sélection à l'université".

"C'est du délire de mettre de l'argent là-dedans et pas dans les facs ou les hôpitaux !", s'emporte Héléna, en terminale, interrogée par l'AFP devant son lycée parisien. "On n'a pas un mois à perdre, pris sur nos vacances !", ajoute une de ses camarades.

Conscients des réticences, les auteurs du rapport recommandent d'organiser au préalable une consultation de la jeunesse, afin de déminer les risques d'opposition à ce projet "s'il était mal compris ou mal conçu".

Les "Jeunes avec Macron" (JAM), l'organisation de jeunesse de La République en marche !, qui soutient le projet, souhaite d'ailleurs pouvoir discuter du contenu.

Son délégué général, Martin Bohmert, égrène un éventail de propositions: "on pourrait imaginer un encadrement par d'autres jeunes, profiter de ce service pour former aux gestes qui sauvent, pour détecter des problèmes d'illettrisme ou de santé, peut-être démarrer l'apprentissage du code de la route"... "Tout cela reste à débattre", espère-t-il.

Tout en jugeant que "cela a du sens de rassembler les jeunes générations autour de valeurs communes".

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