Strasbourg : moquée par le SAMU, elle décède peu après, "graves dysfonctionnements" selon Buzyn
La ministre de la Santé et les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) ont diligenté une enquête administrative pour "faire la lumière" sur la prise en charge par le Samu d'une femme de 22 ans, moquée au téléphone par deux opératrices des secours avant de décéder peu après, a-t-on appris mardi auprès de la famille.
La ministre de la Santé Agnès Buzyn s'est déclarée "profondément indignée" et a dénoncé de "graves dysfonctionnements".
Les faits remontent au 27 décembre. Souffrant de fortes douleurs au ventre, la jeune femme était seule quand elle avait composé le "15" pour appeler à l'aide. Elle avait obtenu pour unique réponse de l'opératrice des pompiers, qui prenant en charge son appel avec dédain, lui avait recommandé d'appeler SOS Médecins.
Au bout de cinq heures, elle était parvenue à joindre les urgences médicales qui avaient in fine déclenché l'intervention du Samu. Emmenée à l'hôpital, elle était victime d'un infarctus puis transférée en réanimation avant de décéder à 17H30.
L'affaire a été révélée par le magazine alsacien Hebd'i.
La famille de la jeune femme, qui a écrit au procureur de la République de Strasbourg, a obtenu auprès des Hôpitaux l'enregistrement de son appel téléphonique au SAMU.
Dans ce document sonore, on l'entend qui peine à s'exprimer et semble à bout de force. "J'ai mal au ventre", "J'ai mal partout", "Je vais mourir...", dit-elle en soupirant.
"Vous allez mourir, certainement un jour comme tout le monde", lui répond l'opératrice des pompiers, qui la renvoie vers SOS Médecins, retardant le déclenchement des secours.
On entend également les échanges qui précédent. Elle est moquée en aparté par l'opératrice qui régule les appels du SAMU et une femme du Centre de traitement des alertes (CTA) des pompiers du Bas-Rhin.
"- La dame que j'ai au bout du fil, elle m'a dit, elle va mourir. Si, ça s'entend, elle va mourir.
- Allez donne-moi le numéro (...)
- C'est sûr qu'elle va mourir un jour, c'est certain, comme tout le monde".
Selon le journal Le Monde qui cite le rapport d’autopsie, Naomi Musenga a succombé à l'hôpital des suites d’une "défaillance multiviscérale sur choc hémorragique": plusieurs organes s’étaient arrêtés de fonctionner.
Dans un communiqué daté du 3 mai, les hôpitaux universitaires de Strasbourg ont annoncé avoir diligenté une "enquête administrative destinée à faire toute la lumière sur les faits relatés dans l’article" du journal alsacien.
Contactée mardi par l'AFP, la direction des Hôpitaux n'était pas joignable.
La ministre de la Santé Agnès Buzyn s'est dite sur Twitter "profondément indignée par les circonstances du décès" et tient "à assurer sa famille de (son) entier soutien".
Elle annonce avoir demandé une enquête de l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) "sur ces graves dysfonctionnements", s'engageant à ce que la famille "obtienne toutes les informations". "Une réunion à ce sujet se tiendra dans les jours qui viennent au ministère", ajoute Mme Buzyn.
Dans un communiqué commun, deux organisations de médecin urgentistes ont demandé mardi "un rendez-vous immédiat" avec la ministre de la Santé "pour trouver des solutions aux problèmes de régulation médicale afin qu'un tel drame ne se reproduise pas".
"Les moyens doivent être mis en place pour avoir des régulations médicales modernes et répondant à des critères de qualité", insistent l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF) et Samu urgences de France (SUDF).
Les deux organisations soulignent qu'elle "partagent la peine de la famille", se disant "profondément attristées par ce qui s'est passé à Strasbourg".
"La prise en charge des appels relevant tant de la santé (Samu) que des secours (Pompiers) doit être moderne et traitée de façon rigoureuse par les professionnels dont c'est le métier", ajoutent-elles.
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