Thalys 2015 : les juges refusent une reconstitution
Les juges en charge de l'enquête sur l'attaque déjouée d'août 2015 dans un train Thalys Amsterdam-Paris ont refusé d'organiser une reconstitution des faits, demandée par l'avocate du tireur présumé Ayoub El Khazzani, a-t-on appris mercredi de source proche de l'enquête.
Me Sarah Mauger Poliak a déploré que ce refus coïncide avec la sortie en France du film "Le 15h17 pour Paris" relatant l'attaque et réalisé par Clint Eastwood. Ce long-métrage constitue, selon elle, "une atteinte grave à la sérénité de la justice, à la loyauté des débats, à la présomption d'innocence et aux droits de la défense".
Dans leur ordonnance rendue lundi et dont l'AFP a eu connaissance, les magistrats instructeurs ont estimé qu'une reconstitution ne pourrait "activement et réellement participer à la manifestation de la vérité", relevant que ces actes d'enquête ont normalement "pour but de clarifier les faits reprochés au mis en examen dès lors que ce dernier les conteste".
Or Ayoub El Khazzani a reconnu en décembre 2016, devant un juge français, son implication dans l'attaque du Thalys, après dix-huit mois de silence.
Sur ordre d'Abdelhamid Abaaoud, cerveau présumé des attentats du 13 novembre 2015, il avait ouvert le feu le 21 août 2015 dans un train Amsterdam-Paris, blessant deux passagers avant d'être maîtrisé par des militaires américains en vacances.
Les juges ont aussi estimé dans leur ordonnance, révélée par France Inter, que les doutes sur la chronologie exacte de certains faits ne pourraient être levés par une reconstitution.
Ils ont également jugé que "la réalisation d'un film retraçant les faits (...) est de nature à entraîner (...) une confusion des genres incompatible avec la recherche de la vérité", en référence au long-métrage de Clint Eastwood dans lequel les Américains qui ont maîtrisé le tireur jouent leur propre rôle.
La défense d'Ayoub El Khazzani a fustigé dans un communiqué une "théâtralisation outrancière et déplacée (du film), qui retire l'enquête des mains des juges d'instruction et la confisque aux salles d'audience pour l'exposer sous les projecteurs des salles de cinéma".
Il constitue une atteinte aux droits de leur client car il "présente à l'opinion publique une vision +cinématographique+ (+romancée+) des faits, alors même que Monsieur El Khazzani n'a pas encore été jugé".
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