Départ en Syrie : trois radicalisés jugés à Paris
Le procès de trois jeunes hommes radicalisés, soupçonnés d'avoir voulu braquer un manoir de luxe dans l'Eure en 2016 pour financer un départ en Syrie et rejoindre l'organisation jihadiste État islamique, s'est ouvert lundi devant le tribunal correctionnel de Paris.
Les trois prévenus, âgés de 25 à 28 ans, cheveux bruns courts et barbe fournie, comparaissent pour association de malfaiteurs à visée terroriste, un délit passible de dix ans de prison.
Ils avaient été interpellés le 20 décembre 2016, dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris, à la suite d'un signalement de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) sur un projet d'action crapuleuse et violente dans un établissement de luxe par ces trois hommes considérés comme "islamistes radicaux".
Selon l'accusation, le trio projetait de séquestrer le personnel du manoir de Portejoie, accueillant notamment des réceptions de mariage, et de dérober l'argent d'un coffre-fort. Le butin du vol devait être dissimulé dans des "trous" auparavant creusés dans une forêt voisine, puis utilisé pour financer un départ en Syrie afin de combattre dans les rangs de l'EI.
L'un des trois prévenus, Norman L., avait reconnu en garde à vue être l'instigateur de ce projet de braquage et avait impliqué deux amis, un intérimaire comme lui et un étudiant en école d'ingénieur, travaillant à l'époque en alternance chez un grand énergéticien.
L'un devait l'aider à séquestrer le personnel de l'établissement, l'autre devait s'occuper des trous et d'activer des contacts en Syrie.
Une distribution des rôles et un mode opératoire "inventés", sous la "pression des enquêteurs", a assuré à l'audience Norman L., qui avait édulcoré ses déclarations initiales lors de l'instruction.
Selon le prévenu de 25 ans, converti en 2012 et "assez radicalisé" à l'époque, cette idée de braquer un manoir lui était venue "en pêchant". "C'est moi qui en ait parlé, mais c'était pas concret, c'était pour me montrer, faire le malin car je me sentais un peu inférieur", a-t-il déclaré depuis le box vitré.
"C'était une folie en moi mais je ne comptais pas le faire", a assuré Norman L., niant tout repérage des lieux et une velléité réelle de partir en Syrie.
Ses co-prévenus, qui l'ont décrit comme un jeune homme "un peu simplet" et aux "idées farfelues", ont soutenu ne l'avoir "jamais pris au sérieux". Certifiant avoir déjà pris leurs distances avec l'idéologie jihadiste au moment des faits, ils ont dit n'avoir pas dissuadé Norman L. par volonté de "temporiser" et par peur de ses réactions.
Des écoutes téléphoniques et une sonorisation du véhicule et du domicile de l'un d'eux lors des investigations avaient mis au jour des repérages à proximité du manoir et des conversations faisant état d'un chalumeau ou d'un projet d'achat ou de location d'une arme à feu.
Peu avant leur interpellation, les trois jeunes hommes avaient visionné plusieurs vidéos de propagande de l'EI, sur des tortures et des prises d'otage, ainsi que sur l'assassinat du père Jacques Hamel dans l'église de Saint-Étienne-du-Rouvray en juillet 2016. Des visionnages qu'ils ont nié à l'audience.
Le jugement est attendu mardi.
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