A Vendin-le-Vieil, des surveillants "à bout" après "l'agression de trop"

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Par Zoé LEROY - Vendin-le-Vieil (France) (AFP)
Publié le 15 janvier 2018 - 12:58
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Des pneus brûlés devant la prison de Vendin-le-Vieil, dans le nord de la France, lors de la protestation de gardiens de prison, le 15 janvier 2018
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© Denis Charlet / AFP
Des pneus brûlés devant la prison de Vendin-le-Vieil, dans le nord de la France, lors de la protestation de gardiens de prison, le 15 janvier 2018
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"On ne veut plus se lever la boule au ventre", souffle une gardienne de prison. Avec une centaine de ses collègues, elle bloque lundi la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) pour dénoncer le "laxisme" de la direction et réclamer des "moyens" après "l'agression de trop".

"Nous sommes devenus des porte-clés: on ouvre et on ferme les cellules. Avant, on discutait avec les détenus, il y avait un échange et un respect et on se sentait un peu utile, maintenant ça n'existe plus", regrette cette surveillante de prison depuis 24 ans, qui veut garder l'anonymat.

"Le mot d'ordre de la direction est de ne pas faire de vagues, si on est en contradiction avec un détenu, la direction n'est pas de notre côté", assure-t-elle.

En quinze ans, "l'autorité des gardiens est partie à vau-l'eau", confie son collègue David Lacroix, 35 ans. "Les profils des détenus ont complétement changé, avant, on avait des gens du grand banditisme, on arrivait à les gérer, maintenant on a parfois des radicalisés. Il faut s'adapter, mais l’administration pénitentiaire a 20 ans de retard sur la prise en charge de ces nouveaux détenus", dénonce-t-il, devant la prison de Vendin-le-Vieil qui abrite actuellement 100 détenus.

C'est ici que, jeudi, le cerveau des attentats de Djerba de 2002, l'islamiste allemand Christian Ganczarski a agressé et légèrement blessé à l'arme blanche trois surveillants. Ici aussi que doit être hébergé Salah Abdeslam pendant la tenue de son procès à Bruxelles.

A "Vendin", "on a constamment peur d'être agressés, peur de se faire coincer dans un couloir et d'avoir le soutien de personne", ajoute un autre gardien de 34 ans, devant un barrage de palettes et de pneus en feu. D'épaisses fumées noires survolent cette prison parsemée de carrés de couleurs.

Chaque jour, "ce sont des insultes, des menaces, des intimidations, déjà on ne devrait pas le tolérer, mais là, on a failli assister à des meurtres, c'est l'agression de trop, nous sommes à bout, on veut des moyens humains et matériels", réclame David Lacroix.

- 'chair à canon' -

Selon lui, cette agression n'aurait "jamais" dû avoir lieu: "On savait qu'il allait tout faire pour éviter son extradition". Ganczarski s'était vu en effet notifier une demande d'extradition vers les Etats-Unis.

"Ce sont nous les acteurs de la détention, c'est nous le pouls de la détention, mais on néglige notre parole, on ne participe pas à la prise de décision de la gestion des détenus", regrette M. Lacroix, 15 ans de métier. "Chaque jour, en ouvrant une porte, on se demande ce qu'il va nous arriver", raconte un de ses collègues.

"Incidents graves à répétition + malaise profond du personnel, Vendin un paquebot à la dérive", "Urgent cherche discipline et sécurité", peut-on lire sur des affichettes à côté du barrage.

Tôt lundi, le directeur de la prison est venu annoncer aux surveillants sa volonté d'être "déchargé de la gestion du centre pénitentiaire". Une démission confirmée par le ministère et "un aveu de son incapacité et de sa dangerosité", pour Grégory Strzempek, secrétaire local de l'Ufap-Unsa à Vendin-le-Vieil.

Tous, lundi matin, réclamaient sa démission, dénonçant son "laxisme". "On fait tout pour les détenus, pour qu'ils se sentent bien dans leur incarcération, il n'y a plus que l'enfermement en guise de punition, mais on ne fait rien pour les surveillants. La direction favorise la voyoucratie et nous on se sent comme de la chair à canon !", lance une surveillante de prison.

Peu de gens font "surveillant pénitentiaire par vocation, ce n'est pas policier ou pompier, mais nous sommes fiers de faire ce métier, on porte un uniforme, on sait qu'on a besoin de nous même si on travaille un peu dans l'ombre, mais plus dans ces conditions", conclut David Lacroix.

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