Allemagne : le chef de l'AfD accusé de paraphraser Hitler
Le chef du parti d'extrême droite allemand AfD, Alexander Gauland, est accusé mercredi par des historiens de renom d'avoir paraphrasé un discours d'Adolf Hitler, un nouveau dérapage, selon ses détracteurs, destiné à relativiser la période nazie.
Autre polémique, l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) est vivement critiquée pour avoir créé à Hambourg une page internet où élèves et parents peuvent dénoncer des enseignants qui critiquent l'AfD. Le système pourrait être repris dans neuf autres régions.
Face aux accusations le visant, M. Gauland s'est défendu dans le quotidien Tagesspiegel de toute rhétorique hitlérienne, assurant: "Je ne connais pas de passage correspondant d'Adolf Hitler".
Deux historiens spécialistes du nazisme et de l'antisémitisme, Wolfgang Benz et Michael Wolffsohn, affirment que le responsable politique de 77 ans, habitué aux propos controversés sur le nazisme, s'est inspiré d'un discours du Führer tenu fin 1933 à Berlin.
Dans une tribune sur le populisme publiée le 6 octobre par le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), Alexander Gauland dénonce une "clique mondialisée qui siège dans les entreprises internationales, les organisations comme l'ONU, dans les médias, les start-ups, les universités, les ONG, les fondations, dans les partis et ses appareils et qui parce qu'elle contrôle les informations, donne le 'la' culturellement et politiquement".
"Ses membres vivent presque exclusivement dans les grandes villes (...) et quand ils déménagent de Berlin à Londres ou Singapour pour changer de travail, ils trouvent partout les mêmes appartements, maisons, restaurants, magasins, écoles privées", poursuit-il, en référence aux élites que l'AfD affirme combattre.
- "Clique mondialisée" -
Or le 10 novembre 1933, Hitler s'en prenait devant des ouvriers à Berlin à une "petite clique internationale déracinée qui attise la haine entre les peuples".
"Ce sont des gens (...) qui vivent aujourd'hui à Berlin, peuvent se retrouver demain à Bruxelles et après-demain à Paris et ensuite à Prague, ou Vienne ou Londres et qui se sentent partout chez eux", disait-il, visant les Juifs sans les nommer.
La tribune de M. Gauland "colle de près, de manière ostensible (au discours) d'Hitler", a jugé l'historien Wolfgang Benz. On a l'impression que "le chef de l'AfD avait posé sur son bureau le texte du discours du Führer de 1933 quand il a rédigé sa tribune pour la FAZ".
"Il modernise la critique à l'égard de +la petite clique internationale déracinée+ qui devient la +clique mondialisée+ pour l'adapter à la langue d'aujourd'hui", a-t-il poursuivi.
Pour l'historien Michael Wolffsohn, "il est grave que Gauland signale à ses partisans cultivés qu'il connaît les discours et la plume de Hitler et qu'il transpose aujourd'hui sur les adversaires de l'AfD les reproches adressés par Hitler aux Juifs".
Le Comité international d'Auschwitz a critiqué avec véhémence le texte qui correspond à "notre propre expérience durant la période nazie", selon l'agence dpa.
- "Intimider" les enseignants -
Alexander Gauland avait fait récemment scandale en estimant que la période nazie avait l'importance d'une "fiente d'oiseau" dans l'histoire millénaire germanique, des propos "honteux", selon la chancelière Angela Merkel. Il avait aussi appelé les Allemands à être fiers des soldats des deux guerres mondiales.
Cette énième polémique s'ajoute à celle qui agite l'Allemagne sur la mise en place de plateformes en ligne encourageant à la dénonciation au parti des enseignants critique de l'AfD au nom de l'"obligation de neutralité" des profs. Pour ses détracteurs, cette méthode rappelle aussi celles des nazis.
L'initiative a suscité une levée de boucliers dans le monde de l'éducation: "Il s'agit d'intimider des enseignant, c'est un développement effrayant", a jugé mardi Heinz Peter Meidinger, chef de l'Union des enseignants.
"C'est du flicage dégoûtant que l'on connaît de la période de dictature nazie et (de la police secrète communiste est-allemande) Stasi", a martelé le ministre régional du Culte de Saxe, Christian Piwarz.
L'AfD a fait une entrée en force en 2017 au Bundestag et est désormais représentée par 92 députés. Anti-Merkel et anti-islam, il profite des peurs et des mécontentements d'une partie de la population depuis l'arrivée historique de plus d'un million de migrants en 2015 et 2016, à l'initiative de la chancelière.
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