Birmanie : sept militaires condamnés à dix ans de prison pour le meurtre de Rohingyas

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Par Richard SARGENT et Athens ZAWZAW - Rangoun (AFP)
Publié le 10 avril 2018 - 20:57
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Un garde frontière birman dans l'Etat Rakhine, en mars 2018
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© Joe Freeman / AFP/Archives
Un garde frontière birman dans l'Etat Rakhine, en mars 2018
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Sept militaires ont été condamnés mardi en Birmanie à dix ans de prison pour un massacre de musulmans rohingyas, a annoncé l'armée, une décision sans précédent depuis le début de la crise ayant causé l'exil de 700.000 Rohingyas.

"Quatre officiers ont été limogés et condamnés à dix ans de prison. Trois autres soldats ont été limogés et condamnés à dix ans", a annoncé le chef de l'armée, le général Min Aung Hlaing, sur sa page Facebook, son moyen de communication habituel.

Ces condamnations se rapportent au meurtre dans le village de Inn Dinn, documenté par l'agence Reuters.

Cette annonce intervient à la veille d'un décision judiciaire très attendue par la communauté internationale concernant le sort de deux journalistes de Reuters, arrêtés pour avoir enquêté sur le massacre de Inn Dinn de dix Rohingyas par l'armée et des villageois bouddhistes.

Wa Lone, 31 ans, et Kyaw Soe Oo, 27 ans, risquent jusqu'à 14 ans de prison pour possession de documents classifiés.

Dans leur enquête, les deux journalistes citent notamment des villageois bouddhistes qui auraient participé avec des soldats au massacre des dix captifs dans le village le 2 septembre 2017.

L'armée a reconnu mardi que des militaires avaient commis des exécutions "extrajudiciaires" dans cette affaire, sans pour autant concéder que cela faisait partie d'un plan plus vaste de nettoyage ethnique comme l'en accuse l'ONU.

Le travail des journalistes de Reuters était basé sur des témoignages de villageois bouddhistes, de membres de forces de sécurité et de proches des hommes tués.

Quelques jours après l'arrestation des deux journalistes birmans en décembre 2017, l'armée avait reconnu que des soldats et des villageois bouddhistes avaient tué de sang-froid des captifs rohingyas, un premier aveu public de violation des droits de l'homme dans cette crise après des mois de dénégations.

- Fin de dénégation -

Lors de leur enquête, les deux journalistes ont également pu se procurer des photos du massacre, sur lesquelles on peut voir les dix hommes menottés et à genoux par terre.

D'autres photos prises peu après montrent les corps de ces hommes dans un large trou, couverts de sang, avec des blessures apparentes. L'un des hommes est décapité.

Jusqu'alors, l'armée comme les autorités birmanes avaient nié les accusations d'exactions de masse, affirmant que seuls des membres de la rébellion avaient été tués lors de la campagne militaire commencée fin août 2017 dans l'ouest de la Birmanie.

Mardi, dans son annonce du verdict, l'armée s'en tient à la phraséologie officielle, évoquant "le meurtre de dix terroristes bengalis". Les Rohingyas sont appelés de façon péjorative "bengalis" en Birmanie, où ils sont considérés comme des immigrés illégaux du Bangladesh voisin.

La Birmanie est dans la tourmente depuis les accusations d'épurations ethniques portées par les Nations unies après une vaste opération de l'armée dans l'ouest du pays, après des attaques d'une rébellion rohingya en août 2017.

Près de 700.000 musulmans rohingyas vivant dans cette région se sont réfugiés au Bangladesh voisin depuis août 2017. Ils accusent l'armée et des milices bouddhistes d'exactions - viols, torture, meurtres...

Les Rohingyas sont la cible d'un mouvement nationaliste bouddhiste fort en Birmanie, qui voit en eux une menace sur la prédominance bouddhiste du pays. Même le gouvernement civil de la Prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi est pieds et poings liés par cette haine anti-rohingya, largement instrumentalisée par l'armée pendant ses décennies de junte.

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