En Syrie, Minbej traumatisée après un attentat meurtrier contre les forces américaines

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Par Delil SOULEIMAN - Minbej (Syrie) (AFP)
Publié le 18 janvier 2019 - 11:17
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Un membre des forces de sécurité devant un restaurant détruit par un attentat suicide à Minbej (Syrie), le 17 janvier 2019
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© Delil SOULEIMAN / AFP
Un membre des forces de sécurité devant un restaurant détruit par un attentat suicide à Minbej (Syrie), le 17 janvier 2019
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Les vitrines ont volé en éclat, la viande crue est toujours sur le grill à kébabs du restaurant. Après l'attentat suicide meurtrier qui a frappé la coalition internationale antijihadistes à Minbej, dans le nord syrien, les habitants restent sous le choc.

L'attaque revendiquée par le groupe Etat islamique (EI) est la plus meurtrière contre les forces américaines de la coalition en Syrie depuis 2014. Dix-neuf personnes, dont quatre Américains, ont été tuées par un kamikaze qui a fait détonner sa veste d'explosifs près du "Palais des Princes", un restaurant de grillades sur le marché central de Minbej.

Cette ville du nord, sous contrôle d'une alliance arabo-kurde alliée à la coalition, est une place-forte pour les forces américaines. Un calme relatif règne à Minbej depuis qu'elle a été arrachée aux jihadistes de l'EI en 2016. En juillet, deux sénateurs américains s'y étaient même rendus.

"On vient au marché, mais on a peur. On va au travail, mais on a peur. On est là maintenant, mais on a peur, on ne sait pas ce qui peut arriver", lâche Jomaa al-Qassem, un des clients qui s'est déplacé en voiture pour faire des courses avec son fils de trois ans.

Devant la façade noircie du restaurant, les forces de sécurité, fusil à la main, empêchent les curieux de s'approcher, ou même de prendre des photos avec leur téléphone portable.

Un rideau de fer à demi-tiré révèle un grill à kébabs où les morceaux de viande rouge sont encore abandonnés, couverts de poussière. Un amas de fer blanc déchiqueté, venu du mobilier de la cuisine, gît à même le sol.

- "Boule de feu" -

Avec dans ses mains plusieurs ours en peluche rouges, Abou Abdel Rahmane est en train de vider la devanture de sa papeterie. Il lui reste encore les ballons de foot à sortir. Sa vitrine a volé en éclat, et le verre brisé est éparpillé sur le sol.

"J'étais à l'entrée de ma boutique. J'ai vu une boule de feu s'échapper du restaurant. Après il y avait des morceaux de corps sur le sol", confie-t-il à l'AFP, blouson de cuir noir sur sa djellaba couleur sombre, un keffieh rouge et blanc lui barrant le visage.

L'attentat de mercredi visait une "patrouille de routine" des forces de la coalition internationale emmenée par Washington pour lutter contre l'EI.

Dix civils et cinq combattants arabo-kurdes ont été tués. Quatre Américains ont subi le même sort: deux militaires, un employé civil du ministère de la Défense et un employé d'un sous-traitant du Pentagone.

Il s'agit de l'attaque la plus meurtrière contre les forces américaines en Syrie, au vu des chiffres du Pentagone qui rapporte la mort ces dernières années de deux Américains tombés au combat dans ce pays, dans deux incidents distincts.

Aux entrées de la ville, des barrages de sécurité, tenus par des forces du Conseil militaire de Minbej, fouillent scrupuleusement les véhicules qui entrent et qui sortent et vérifient les identités, tandis que des patrouilles ratissent les rues.

- "Sabotage" -

Mais pour Malek al-Hassan, ce n'est pas suffisant.

"On espère que les forces seront plus vigilantes aux barrages, et qu'elles vont mettre les bouchées doubles pour empêcher (les jihadistes) infiltrés de commettre ces actes de sabotage", martèle ce père de 45 ans.

Après une ascension fulgurante en 2014 et la conquête de vastes territoires en Syrie et en Irak, l'EI est aujourd'hui acculé dans ses derniers retranchements. Malgré les défaites qu'il a subies, le groupe jihadiste parvient encore à semer la mort avec des attentats comme celui de mercredi.

L'attentat de Minbej intervient après l'annonce en décembre d'un retrait prochain des troupes américaines de Syrie. Le président Donald Trump avait justifié ce désengagement en assurant que l'EI avait été vaincu.

Naassan Dandan a les larmes aux yeux en se souvenant du drame. "J'étais dehors, et puis en rentrant l'explosion a eu lieu, j'ai été projeté au sol", confie le quadragénaire.

Il continue de déblayer les morceaux de verre de sa vitrine éparpillés dans son studio de photographie. Aux murs, les portraits d'enfants pris tout au long de sa carrière sont couverts de poussière.

Le voyant faire, deux gamins qui passent par là s'approchent pour l'aider.

Après l'impact de l'explosion, M. Dandan a réussi à se relever puis est sorti dehors. "J'ai vu les corps, les morts et les blessés", se remémore-t-il.

Pour Malek al-Hassan aussi, le souvenir de l'attentat reste vivace. "J'étais venu hier pour acheter des livres pour les enfants. Quand l'explosion a eu lieu, je ne sais pas comment on a réussi à s'échapper du centre-ville", dit-il, tremblant encore.

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