Italie : l'enregistrement qui embarrasse le gouvernement populiste

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Par Franck IOVENE - Rome (AFP)
Publié le 23 septembre 2018 - 16:50
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Rocco Casalino, le porte-parole du gouvernement italien Giuseppe Conte le 13 mars 2018 à Rome
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© Tiziana FABI / AFP/Archives
Rocco Casalino, le porte-parole du gouvernement italien Giuseppe Conte le 13 mars 2018 à Rome
© Tiziana FABI / AFP/Archives

Un enregistrement dans lequel le porte-parole du chef du gouvernement italien Giuseppe Conte menace "d'éliminer une marée" de fonctionnaires des finances s'ils empêchent la réalisation des engagements électoraux suscite l'embarras du gouvernement populiste, à quelques jours de la présentation du budget.

Dans cet enregistrement réalisé par deux journalistes de l'édition italienne du Huffington Post - et largement diffusé dimanche dans les médias - Rocco Casalino, porte-parole de Giuseppe Conte, et proche du Mouvement 5 Etoiles (M5S, populiste) annonce "une méga vengeance" sur les fonctionnaires des finances "s'ils ne sortent pas l'argent pour le revenu de citoyenneté".

"L'année 2019 sera consacrée à éliminer une marée de membres du ministère des Finances, ce sera à couteaux tirés", déclare le porte-parole.

Ce dernier, qui a reçu le soutien et "la confiance" de Giuseppe Conte, s'est défendu dimanche dans la presse, évoquant une "conversation privée" avec deux journalistes et dénonçant une "violation de la confidentialité", ce que conteste la rédaction du Huffington Post.

Si le pouvoir et l'influence de Rocco Casalino étaient minimisés dimanche par l'exécutif, le Corriere della Sera décrit cet homme de l'ombre comme "les yeux et les oreilles du M5S" dans le bureau de Giuseppe Conte. Même si c'est bien le mouvement populiste qui avait proposé M. Conte pour le poste de président du Conseil après les élections de mars dernier.

Le projet de loi de finances qui doit être présenté dans les prochains jours fait l'objet d'âpres débats au sein de la coalition gouvernementale, composée du M5S et de la Ligue (extrême droite).

Le revenu de citoyenneté, sorte de revenu universel destiné aux plus modestes et promesse électorale phare du M5S, est l'un des points de crispation, notamment en raison de son coût - 10 milliards d'euros selon le M5S, beaucoup plus selon d'autres estimations - qui pourrait peser lourdement sur les comptes publics du deuxième pays le plus endetté de l'Union européenne (après la Grèce).

- Irritation -

Or le ministre de l'Économie Giovanni Tria (sans étiquette politique mais proche de la Ligue), très sourcilleux sur la question du déficit, a affirmé qu'il ne souhaitait pas le voir dépasser 1,6% du PIB l'an prochain.

"Il n'y aura pas de financement des mesures promises par la Ligue et le M5S si elles génèrent un déficit supérieur", a-t-il insisté.

Une position intransigeante qui pourrait compromettre certaines promesses électorales comme le revenu de citoyenneté, et suscite l'irritation du ministre du Développement économique Luigi Di Maio, qui n'est autre que le vice-Premier ministre de M. Conte... et le chef de file du M5S.

Si l'agacement est moindre du côté de la Ligue, son chef de file et ministre de l'Intérieur Matteo Salvini plaide, lui aussi, pour que les cordons de la bourse soient desserrés.

"Les chiffres du déficit après la virgule ne comptent pour rien", a-t-il affirmé, plaidant pour une loi de finances "courageuse, expansive et source de croissance".

D'autant que l'une des principales promesses de son parti, un taux d'imposition unique de 15% ou 20% pour les familles et les entreprises ("flat tax"), dont le coût est estimé à plusieurs dizaines de milliards d'euros, pourrait elle aussi être concernée par la rigueur budgétaire.

Si elle cristallise les tensions qui se font jour au sein de la coalition gouvernementale (M5S-Ligue), au pouvoir depuis quatre mois en Italie, l'affaire de l'enregistrement n'a pas manqué de faire réagir l'opposition de gauche.

En capilotade depuis la défaite aux législatives de mars, elle a réclamé la démission immédiate de Rocco Casalino. Et l'ancien chef du gouvernement Paolo Gentiloni (Parti démocrate, centre gauche), homme au naturel réservé, a estimé sur Twitter que le porte-parole n'était "plus compatible avec sa fonction".

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