Yaël Braun-Pivet, atypique présidente d'une commission phare à l'Assemblée

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Par Fabrice RANDOUX - Paris (AFP)
Publié le 01 juillet 2018 - 09:17
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La députée LREM Yaël Braun-Pivet devant l'Assemblée nationale le 26 juillet 2017
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© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives
Yaël Braun-Pivet à l'Assemblée le 26 juillet 2017
© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives

Novice à la tête de la prestigieuse commission des Lois, la "marcheuse" Yaël Braun-Pivet incarne depuis un an le "renouvellement" à l'Assemblée, par son style et son approche de terrain, mais son poids politique reste questionné.

Lorsque, après avoir battu dans les Yvelines Jacques Myard, figure de droite des Quatre-Colonnes, cette ancienne avocate de 47 ans est choisie pour ce poste stratégique, c'est d'abord l'incrédulité dans "l'ancien monde".

"La tradition de la commission était d'être dirigée par des députés expérimentés, des personnalités fortes et carrées comme Jean-Luc Warsmann à droite ou Jean-Jacques Urvoas à gauche", témoigne Philippe Gosselin (LR).

Ancienne pénaliste, native de Nancy, Yaël Braun-Pivet avait mis cette "vocation" entre parenthèses pour suivre son mari, cadre chez l'Oréal, sept ans à Taïwan et au Japon, et élever leurs cinq enfants.

De retour en France, elle s'investira par "souhait d'être utile" aux Restos du Coeur, où elle a vu "beaucoup de gens dans des situations très compliquées", créant des consultations gratuites d'avocats et un centre d'accueil dans les Yvelines, animant "une équipe d'une centaine de bénévoles".

Son adhésion à En Marche (après avoir "toujours voté PS") se veut un "prolongement": "être dans l'action sans rester sur des postures", en phase avec "vision" et "pragmatisme" d'Emmanuel Macron.

Pour défendre sa candidature à la tête de la commission, "elle a débarqué sur l'estrade en débardeur, nous a fait un discours hyper sincère. Les vieux ont pris une baffe monumentale", raconte un participant.

Ses premiers pas lui valent un procès "en amateurisme" des oppositions mais aussi d'élus de la majorité, alors que cette présidente qui "aime chercher le consensus" se retrouve rapporteure de la loi de moralisation.

Elle se concentre ensuite sur sa commission, impulsant un travail collectif pour "faciliter les convergences, même sur des questions à fort clivage", comme une inédite visite simultanée de prisons.

Cette opération automnale -rééditée en centres de rétention- "lui a donné visibilité et consistance" (Philippe Gosselin); "a rendu nos thématiques plus humaines" (Stéphane Peu, PCF), "était très opportune" (Eric Ciotti, LR), "a marqué majorité et oppositions" (Marie Guévenoux, LREM).

- 11 visites en prison -

La prison, c'est "sa priorité", avec une proposition phare: 18 centres à sécurité allégée, comme en Europe du Nord, pour favoriser la réinsertion. La ministre Nicole Belloubet soutient l'idée, qui sera débattue dans la loi de programmation de la justice.

Le résultat de onze visites. "Elle m'a mitraillé de questions, pas pour me contrôler mais pour comprendre et faire avancer", estime la directrice de la maison d'arrêt de Bois d'Arcy Odile Cardon.

Si ses qualités humaines -"chaleureuse", "facile de travailler avec elle"- sont généralement saluées, elle se voit parfois reprocher d'être trop "sympa". "C'est pas mon truc d'être chiante et autoritaire", réplique Yaël Braun-Pivet.

D'autres la jugent trop en retrait politiquement. "Elle devrait être la tour de contrôle du législatif face au gouvernement, elle n'a pas assez d'existence politique", tacle un responsable parlementaire.

"Ses prédécesseurs mettaient leur autorité de juristes chevronnés pour donner du sens au débat", renchérit Jean-Michel Clément, ex-LREM qui convoitait son poste.

Stéphane Peu a "le sentiment qu'elle n'était pas totalement à l'aise sur le projet asile-immigration" et aurait pu soutenir ses amendements pour interdire la rétention des mineurs.

Cette descendante de "l'immigration slave, juive polonaise et juive allemande, avec des grands-parents entrés en France avec des visas touristes" dans les années 1930, préfère les débats internes aux bras de fer publics. "Les prises de parole personnelles nuisent à un travail collectif pour trouver un point d'équilibre", martèle-t-elle.

Sa désignation comme corapporteure du projet de révision constitutionnelle et non rapporteure générale, poste revenu au patron des LREM Richard Ferrand, a relancé chez Philippe Gosselin "cette interrogation: quel est son poids politique réel?".

Et certain(es) marcheurs(ses) convoiteraient sa place. Mais, au groupe, certains lui jugent "le cuir épais".

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