"BlaKkKlansman", le pamphlet anti-raciste de Spike Lee
Avec "BlacKkKlansman", en salles mercredi, Spike Lee livre un détonant polar -- récompensé au Festival de Cannes -- mais aussi une charge contre le racisme, l'extrême droite et le président Donald Trump.
Basé sur l'histoire réelle d'un policier afro-américain qui a infiltré le Ku Klux Klan dans les années 70, le film alterne entre polar classique et film militant. Il se termine avec la dénonciation des événements de Charlottesville, cette ville de Virginie secouée par des violences de groupuscules d'extrême droite le 12 août 2017.
Le jeune policier noir de Colorado Springs, Ron Stallworth, est interprété par John David Washington, le fils de Denzel Washington, le "Malcolm X" de Spike Lee en 1992. Son idée : infiltrer le KKK. Mais quand il s'agit de rencontrer physiquement le chapitre local du Klan, il lui faut une couverture : ce sera donc son collègue Flip Zimmerman (Adam Driver), blanc et juif.
Le duo Washington-Driver s'en donne à coeur joie pendant plus de deux heures, le film débordant volontiers sur la comédie pure.
Mais avec Spike Lee, il est évidemment toujours question de politique. Le réalisateur de "Do The Right Thing" ou "Nola Darling n'en fait qu'à sa tête" ose le parallèle entre le leader du Klan dans le film, David Duke, et Donald Trump. David Duke veut "rendre sa grandeur à l'Amérique" ? Difficile de ne pas penser au slogan de campagne du président américain, "Make America Great Again".
Pour conclure ce réquisitoire, parfois trop surligné, le réalisateur de Brooklyn s'offre un bond d'une cinquantaine d'années avec des images de Charlottesville et notamment ces quelques secondes où la voiture d'un militant néo-nazi percute volontairement des militants antiracistes. Une femme de 32 ans, Heather Heyer, y laissa la vie.
- Prix "absolument nécessaire" -
Le premier anniversaire de ces événements a donné lieu à un bras de fer à distance entre militants néonazis et contre-manifestants à Washington dimanche dernier.
La mort de Heather Heyer "est un meurtre", avait accusé Spike Lee devant la presse à Cannes, où il fait cette année son retour après 27 ans d'absence.
"Et nous avons un type à la Maison Blanche, je ne prononcerai même pas son putain de nom, qui, à ce moment décisif, aurait pu choisir l'amour contre la haine. Mais ce fils de pute n'a pas dénoncé le putain de Klan, l'alt-right (mouvance de la droite dure américaine, ndlr) et ces fils de pute de nazis", avait poursuivi le réalisateur, particulièrement offensif, sans citer le nom de Donald Trump.
"Ces conneries d'extrême droite, ce n'est pas seulement aux Etats-Unis, c'est partout dans le monde, et nous ne pouvons pas rester silencieux", avait ajouté un Spike Lee qui, en recevant le Grand Prix du Festival quelques jours plus tard, avait précisé que son film avait "pour but de nous faire tous sortir de notre état de torpeur mentale, et de nous ramener vers la vérité, la bonté, l'amour, et pas la haine".
"Nous tous (au sein du jury), nous nous sommes sentis connectés, cela a transcendé les spécificités de cette histoire centrée sur l'Amérique", avait souligné Cate Blanchett, la présidente du jury
"Le monde change, et nous avons estimé qu'il était absolument nécessaire de donner un prix à BlacKkKlansman", avait confirmé l'actrice française Léa Seydoux, membre du jury.
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