Le film d'Ozon sur la pédophilie dans l'Eglise récompensé à Berlin avant des décisions de justice

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Par Yacine LE FORESTIER et Sophie LAUBIE à Paris - Berlin (AFP)
Publié le 17 février 2019 - 00:53
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Le réalisateur français François Ozon a reçu le Prix du jury du festival de Berlin pour son film "Grâce de Dieu", le 16 février 2019
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© Odd ANDERSEN / AFP
Le réalisateur français François Ozon a reçu le Prix du jury du festival de Berlin pour son film "Grâce de Dieu", le 16 février 2019
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Le film "Grâce à Dieu" du réalisateur français François Ozon sur les scandales de pédophilie dans l'Eglise catholique a été récompensé samedi soir à Berlin, à quelques jours d'une décision de justice sur un éventuel report de sa sortie.

Le festival du film de Berlin a décerné sa deuxième récompense majeure après l'Ours d'or à ce long métrage, tourné en secret l'an dernier.

"Ce film essaie de rompre le silence d'institutions puissantes" sur ces affaires d'abus sexuels d'enfants, a déclaré le metteur en scène français de 51 ans en recevant sa récompense.

"Je veux partager ce prix avec les hommes libres qui m'ont inspiré" qui "ont été victimes d'un prêtre pédophile", a-t-il ajouté, ému, "Alexandre, François et Pierre-Emmanuel, vous êtes mes héros".

"Grâce à Dieu" raconte la naissance de l'association de victimes La Parole libérée, fondée à Lyon en 2015 par d'anciens scouts abusés par un prêtre pédophile, Bernard Preynat. Au total, l'association recense près de 85 victimes de ce prêtre.

Le film suit trois d'entre elles, incarnées à l'écran par les acteurs Melvil Poupaud, Denis Ménochet et Swann Arlaud.

Le sujet est en pleine actualité en France, alors que s'est tenu début janvier à Lyon le procès du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, et de cinq autres personnes pour non dénonciation d'agressions sexuelles pédophiles dans cette affaire, dite affaire Barbarin. Le jugement est attendu le 7 mars.

Mis en examen pour agressions sexuelles depuis janvier 2016, le père Preynat pourrait quant à lui être jugé cette année.

- Décision attendue lundi -

François Ozon est lui-même au coeur d'une tourmente judiciaire liée à ce film, alors qu'il a été assigné en référé par l'un des avocats du père Preynat pour obtenir un report de la sortie de son film en France, prévue mercredi prochain.

L'audience s'est tenue vendredi, et le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris donnera sa décision lundi.

Une ex-membre du diocèse de Lyon, Régine Maire, représentée sous son nom dans le film, a de son côté assigné François Ozon pour qu'il retire son nom du film. L'audience aura lieu lundi matin au tribunal de grande instance de Lyon.

"Je ne sais pas si le film va pouvoir être projeté en France. Nous faisons face à de grosses résistances", a indiqué François Ozon lors d'une conférence de presse à Berlin, après avoir reçu son prix.

Le prolifique réalisateur de "Swimming Pool" et "Huit femmes", qui était pour la cinquième fois en compétition à Berlin, a expliqué que le film risquait d'être suspendu de projection jusqu'à la tenue du procès du père Preynat, fin 2019 ou en 2020.

Dans ce cas, "ce serait une sorte de censure", a-t-il lancé.

- "le plus équilibré possible" -

Avec cette "fiction basée sur des faits réels", dans laquelle il utilise seulement les prénoms des victimes mais cite nommément le cardinal Barbarin, le père Preynat et Régine Maire - dont les noms, dit-il, "étaient déjà dans la presse" -, François Ozon a expliqué à l'AFP avoir voulu faire "un film citoyen" qui "pose des questions".

Mais ce n'est pas "un film sur l'actualité", ni "à charge contre l'Eglise", a-t-il dit.

"Mon film ne se place pas sur un aspect judiciaire, il se place sur l'aspect humain et sur la souffrance des victimes", a indiqué le réalisateur, qui a expliqué avoir pensé au départ "à tort" que les procès auraient lieu avant la sortie de son film.

Son film, à la mise en scène sobre, pour lequel il a rencontré plusieurs victimes et mené "une enquête assez journalistique", est construit en trois parties comme un passage de relais entre ses trois personnages principaux.

Il s'appuie largement, du moins dans sa première partie, sur les lettres et les échanges d'emails avec l'institution religieuse de l'une des victimes, Alexandre Hezez-Dussot, incarné par Melvil Poupaud.

"J'ai essayé d'être le plus équilibré, le plus objectif possible", assure-t-il.

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