San Francisco : les bouchons ont empiré à cause de Uber et Lyft
Les trajets en Uber ou en Lyft remplacent souvent des déplacements à pied, à vélo ou en transport en commun à San Francisco et ont contribué à une hausse importante des embouteillages en centre-ville, concluent des chercheurs dans une étude mercredi.
L'analyse s'ajoute à une similaire à Manhattan et visait à trancher le vieux débat sur les effets des voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) dans les villes.
Selon les auteurs, qui publient leurs travaux dans la revue Science Advances, les données sont claires: la vitesse moyenne a baissé dans le centre de San Francisco de 13% entre 2010 et 2016 et c'est principalement à cause des VTC.
Lyft a contesté la méthodologie parce qu'elle attribue la hausse des embouteillages - incontestable - principalement aux VTC, alors que simultanément, la ville a connu un boum de la vente en ligne et donc des livraisons par véhicules.
Une bonne partie de l'encombrement des rues de San Francisco serait aussi due aux VTC vides qui roulent en attente de clients, un phénomène appelé "deadheading".
Les ralentissements sont également aggravés par "l'effet prise en charge et dépose", lorsque les véhicules s'arrêtent pour prendre ou déposer un passager.
- Uber Pool -
En six ans, les retards dus aux embouteillages ont augmenté de 62%, alors qu'ils auraient cru de 22% sans les VTC, selon un modèle qui a montré sa précision et a été validé par le comité de lecture de Science.
Uber, qui entrera en Bourse vendredi aux Etats-Unis et fait face mercredi à une grève de chauffeurs, et Lyft, introduit en Bourse en mars, arguent que leurs services aident à réduire la congestion automobile en permettant le partage des trajets entre plusieurs clients.
Ce n'est pas faux, répondent les chercheurs, venus de l'autorité des transports du comté de San Francisco et de l'université du Kentucky, mais l'effet de ce covoiturage serait minime.
"Deux tiers des VTC sont des voitures ajoutées sur les routes et qui ne seraient pas là autrement", dit à l'AFP Greg Erhardt, professeur d'ingénierie civile à l'université du Kentucky.
Lyft a pour objectif que la moitié des trajets soient partagés d'ici fin 2020.
L'autre argument des VTC est qu'ils pallient le manque de transports en commun la nuit. Mais les données montrent qu'ils engorgent les rues fortement aux heures de pointe, vers 7 ou 8 heures du matin et 17-18 heures, dit Greg Erhardt.
Un porte-parole d'Uber a dit à l'AFP que la priorité était de réduire le nombre de véhicules n'ayant qu'un seul conducteur et que la plateforme soutenait l'imposition de taxes d'entrée dans les centres-villes, comme c'est prévu dans quelques années à New York
"Nous investissons beaucoup dans des produits et de nouvelles infrastructures pour les vélos, les transports en commun et les trajets partagés afin de contribuer à une solution plus globale", a pour sa part déclaré une porte-parole de Lyft.
- Taxe -
Les VTC ont bataillé contre les auteurs de l'étude de San Francisco, où contrairement à Chicago les autorités n'ont pas d'accès légal aux données.
"Lorsque nous leur avons demandé de partager leurs données, ils ont répondu que ce n'était pas dans l'intérêt du public", assure à l'AFP Joe Castiglione, de l'autorité des transports de San Francisco. "Nous avons donc eu recours à une technologie alternative".
Cette technologie a consisté à récupérer les données des trajets via un subterfuge électronique, légal selon les chercheurs, en interagissant avec l'interface publique des applications.
"Il est très difficile d'étudier les embouteillages", dit à l'AFP Elliot Martin, expert des transports à l'université de Californie à Berkeley. Mais la méthode utilisée ici "est la meilleure façon de procéder, à partir des données disponibles".
Pour les villes, le dilemme est de trouver comment réduire les embouteillages sans interdire des applications populaires. San Francisco devrait demander aux électeurs d'approuver par référendum une taxe de 3,25% sur les trajets individuels des VTC (1,5% sur les trajets partagés).
"Les relations sont mauvaises entre la plupart des villes et Uber, mais il y a beaucoup d'utilisateurs fidèles, ce qui empêche les villes d'en faire trop", dit à l'AFP Stephen Goldsmith, ancien maire adjoint de New York aujourd'hui à Harvard.
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