Loi asile-immigration : la rétention des mineurs, point de crispation

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Par Claire GALLEN - Paris (AFP)
Publié le 18 avril 2018 - 12:59
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Une aire de jeu du centre de rétention du Canet à Marseille, le 18 novembre 2017
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© BERTRAND LANGLOIS / AFP/Archives
Une aire de jeu du centre de rétention du Canet à Marseille, le 18 novembre 2017
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Régulièrement contestée, la rétention des mineurs va revenir dans les débats du projet de loi "asile-immigration" d'ici la fin de semaine à l'Assemblée nationale, même si le gouvernement n'est pas disposé à bouger dans ce texte.

DE QUOI PARLE-T-ON ?

La rétention concerne les étrangers en situation irrégulière qui attendent leur reconduite. La France comptait l'an dernier environ 1.800 places en centre de rétention administrative (CRA) et le ministre de l'Intérieur a annoncé l'ouverture de 400 places supplémentaires.

Neuf CRA sont habilités à recevoir des familles.

En métropole, cela concerne des enfants ou adolescents placés avec leur famille. Leur nombre a fortement augmenté ces dernières années: de 45 en 2014, on est passés à 305 l'an dernier, selon la Cimade qui est l'une des associations habilitées à intervenir en CRA.

En Outre-mer, les chiffres sont beaucoup plus élevés, avec plus de 4.000 mineurs à Mayotte.

Les familles sont généralement enfermées la veille de leur reconduite, pour les rapprocher de l'aéroport -- ce qu'à la Cimade on estime relever surtout du confort de l'administration.

Il arrive toutefois que la rétention se prolonge, selon l'association qui a dénoncé, en mars, le cas de dix enfants enfermés avec leurs parents jusqu'à neuf jours au Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne).

QUELS GARDE-FOUS ?

La rétention des mineurs n'est censée se faire qu'en famille, en dernier recours, en étant limitée à la durée nécessaire à l'organisation du départ.

Une circulaire du 6 juillet 2012, encadrant cette pratique, demandait de privilégier l'assignation à résidence.

Mais la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a, à six reprises depuis 2012, condamné la France, qui "compte parmi les trois seuls pays européens qui recourent systématiquement à la rétention de mineurs accompagnés".

Face aux critiques, le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb vient d'annoncer 1,5 million d'euros de travaux pour garantir des "conditions dignes" dans ces centres.

QUI PROTESTE ?

Les critiques sont nombreuses, motivées par "l'intérêt supérieur de l'enfant", et dépassent les seules associations militantes -- en mai 2012, François Hollande lui-même s'était engagé à y mettre un terme.

En mars le commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, Nils Muižnieks, a appelé la France à mettre fin à une pratique aux "effets néfastes sur la santé mentale" des mineurs.

La Contrôleure des lieux de privation de liberté Adeline Hazan a dénoncé "le principe même de l'enfermement de ces enfants", en raison "des traumatismes qu'il provoque" et des "bouleversements" dans les rapports parents-enfants.

Le Défenseur des Droits Jacques Toubon est régulièrement intervenu auprès des préfectures l'an dernier "pour leur rappeler que cette pratique est contraire à la Convention des droits de l'enfant et demander la libération" des familles.

Plusieurs députés de la majorité, ayant visité des CRA, ont aussi dit leurs interrogations la semaine dernière. "La rétention des enfants nous questionne tous", a plaidé Stella Dupont (LREM) en commission des Lois. Les députés avaient toutefois rejeté l'interdiction de cette pratique.

Face à cette contestation interne, les députés LREM vont mettre en place un groupe de travail dans le but de rédiger une proposition de loi "dans les prochains mois".

"Le sujet n'était pas mûr maintenant mais nous n'allons pas l'abandonner", a promis le chef de file LREM sur ce texte Florent Boudié.

POURQUOI LA MAINTENIR ?

Pour le gouvernement, interdire la rétention des mineurs empêcherait de fait toute reconduite à la frontière des familles en situation irrégulière.

Une telle interdiction serait "instrumentalisée par les filières de passeurs qui vont faire venir des mineurs", affirme la députée En Marche Marie Guevenoux.

On serait "matériellement mis dans la situation de ne plus expulser quelque famille que ce soit", a estimé Emmanuel Macron lors de son entretien dimanche soir sur BFMTV, RMC et Mediapart, tout en assurant qu'il souhaitait que la rétention des mineurs "dure le moins possible".

Le sujet est crucial pour l'Intérieur qui essaie actuellement de dissuader une immigration en provenance d'Albanie. "Les Albanais arrivent généralement en famille, avec les enfants" et s'ils ne peuvent être placés en rétention, "le risque de fuite est extrêmement important", selon M. Collomb.

Aussi certains plaident-ils, à l'instar de Mme Guévenoux, pour "des hôtels dédiés aux familles à proximité des aéroports".

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