Trois jeunes aux assises pour un projet d'attentat contre un site militaire
Des jeux vidéos au projet de décapitation: trois jeunes Français radicalisés, soupçonnés d'avoir projeté en 2015 l'attaque d'un site militaire du cap Béar, dans le sud-ouest, sont jugés à partir de lundi devant la cour d'assises des mineurs de Paris.
Ils avaient alors 17, 19 et 23 ans, vivaient chez leur mère et surfaient sur internet. Djebril Amara, Antoine Frèrejean et I. K., ont en commun leur jeunesse et une radicalisation rapide.
Les trois garçons, qui habitaient l'un dans le Nord, l'autre en région parisienne et le troisième à Marseille, avaient lié connaissance sur le forum jeuxvideo.com en 2014. Ils avaient ensuite discuté de leurs desseins jihadistes sur les réseaux sociaux, notamment via la messagerie cryptée Telegram.
Accusés d'appartenir à une association de malfaiteurs terroriste criminelle, ils encourent 20 ans de réclusion. L'un des accusés étant mineur au moment des faits, l'audience est prévue à huis clos. La défense de ce dernier, I. K., envisage de demander la publicité des débats: la cour tranchera lundi matin.
Arrêtés le 13 juillet 2015, les trois accusés, dont l'un était un ancien de la Marine, sont soupçonnés d'avoir fomenté un attentat contre des soldats du sémaphore de Béar, fin 2015, peut-être dans la nuit de la Saint-Sylvestre, ainsi que la décapitation filmée du commandant de ce poste d'observation de la Marine nationale, situé à Port-Vendres (Pyrénées-Orientales).
Ils sont également poursuivis pour avoir voulu rejoindre les rangs du groupe Etat islamique (EI) en zone irako-syrienne. L'un d'entre eux, Antoine Frèrejean, est aussi accusé d'avoir aidé un jeune Français à gagner la Syrie, notamment en prenant contact avec Mourad Fares, un des principaux recruteurs français.
Jusqu'où leur adhésion aux thèses islamistes radicales les aurait-elle conduits? Voulaient-ils partir en Syrie, commettre un attentat en France? Les magistrats instructeurs soulignent qu'ils ont "tenté de mettre en oeuvre les directives du jihad global préconisées" par le groupe d'Abou Bakr al-Baghdadi, qui avait proclamé un califat en juin 2014.
Pour les enquêteurs, le projet d'attentat contre des militaires était né de l'échec du plan initial qui était de gagner la Syrie. Le plus jeune des accusés avait été signalé par sa mère qui avait sollicité une mesure d'interdiction de sortie du territoire en novembre 2014.
- "Frapper sur place" -
Pour les juges, leur projet de départ est "ravivé" après les attentats de janvier 2015 à Paris, au lendemain desquels I. K. avait rédigé un testament. Deux rencontres - les deux seules - ont lieu ce mois de janvier: Djebril Amara retrouve Antoine Frèrejean à Lyon, puis I. K dans le Nord.
Pour les enquêteurs, leur projet contre le sémaphore de Béar prend forme. Amara a reconnu avoir suggéré de s'attaquer à ce site où il avait été affecté comme guetteur, loin de ses rêves de servir sur des navires. Après plusieurs arrêts maladie en 2014, il avait été réformé de la Marine début 2015.
Le benjamin du groupe a raconté avoir été en contact avec un membre du groupe EI, Abu Hussein El Britani, qui lui avait donné pour consigne de "frapper sur place en France", faute de pouvoir se rendre en Syrie.
Les enquêteurs ont retrouvé un message de I. K. à Frèrejean en mai 2015: "Le projet c'est: +on fait le truc dans la base militaire puis on échappe et on va en Syrie+".
Les trois jeunes gens ont contesté la matérialité du projet, présenté comme une idée floue et non aboutie. Le plus jeune affirme y avoir totalement renoncé après son mariage religieux avec une jeune Française convertie. Antoine Frèrejean, que sa mère décrit comme "fanatique", nie avoir adhéré à ce plan. Djebril Amara a expliqué avoir été "hypnotisé" par l'EI alors qu'il était en dépression, avant de prendre ses distances.
Lors des perquisitions, les enquêteurs avaient retrouvé des caméras, des manuels en ligne de confection d'explosifs et un guide pour les aspirants au jihad syrien, mais ni armes à feu ni explosifs.
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