"Le fils de Saul" : l'enfer d'Auschwitz, en plein coeur (VIDEO)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 03 novembre 2015 - 02:10
Mis à jour le 04 novembre 2015 - 10:47
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Fils de Saul Film
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©Ad Vitam
Saul, le personnage principal, est interprété par l'écrivain hongrois Géza Röhrig.
©Ad Vitam
Grand Prix du dernier Festival de Cannes, "Le fils de Saul", ce mercredi 4 novembre sur les écrans, montre l'horreur des camps de la mort nazis. C'est le premier film du jeune réalisateur hongrois francophone László Nemes.

C'est l'Enfer sur la Terre. Dans Le fils de Saul, l'extermination des juifs par les nazis dans les camps de la mort est filmée comme elle ne l'avait jamais été au cinéma. Ce n'est pas un film de fiction comme l'admirable Liste de Schindler de Steven Spielberg, ce n'est pas un documentaire comme l'imposant Shoah de Claude Lanzmann, c'est un peu des deux à la fois.

Premier film du jeune réalisateur hongrois László Nemes, 38 ans, installé en France depuis l'âge de 12 ans, Le fils de Saul a obtenu le Grand Prix du dernier Festival de Cannes, récompense numéro-2 dans la hiérarchie du palmarès juste derrière la Palme d'or, et représentera la Hongrie aux prochains Oscars en février.

Le spectateur est plongé immédiatement au coeur du camp d'Auschwitz-Birkenau. On suit en gros plan, et en caméra suggestive, Saul Ausländer, membre des Sonderkommandos, ces prisonniers juifs isolés du reste du camp et forcés d’assister les nazis dans leur plan d’extermination. Leur travail consistait à accompagner les victimes jusqu’aux chambres à gaz en les encadrant et les rassurant, les faire se déshabiller, les faire entrer dans les chambres de mort, puis à récupérer les cheveux, les bijoux et dents en or, débarrasser les cadavres, les entasser, les brûler tout en nettoyant les lieux. Le tout rapidement car d’autres convois de déportés attendaient.

Dans une atmosphère oppressante, sans largeur de champ pour respirer, le spectateur suit le parcours de Saul dans ces tâches quasi industrielles: les camps de la mort, c'est l'usine. Mais le réalisateur a choisi de ne pas montrer directement ou de près l'intérieur des chambres à gaz ni les cadavres nus que l'on traîne puis que l'on brûle, ensuite: la plupart du temps, il s'agit d'images de fond d'écran, volontairement floues, où l'on devine plus qu'on ne voit, la caméra restant concentrée sur le personnage de Saul.

Celui-ci, parmi les cadavres morts gazés et destinés au crématorium, croit reconnaître celui de son fils. Il va tout faire pour le sauver des flammes et lui offrir une sépulture. Il cache le corps et se met à la recherche d'un rabbin dans le camp, pour les derniers sacrements. Pendant ce temps, un groupe de Sonderkommandos prépare une révolte dans le camp...

C'est sur la base d'un livre de témoignages de Sonderkommandos publié par le Mémorial de la Shoah, Des voix sous la cendre (Ed. Livre de poche), que László Nemes, dont une partie de la famille a été assassinée à Auschwitz, a réalisé son film. 

"Je ne voulais pas montrer l’horreur de face, ne surtout pas reconstituer l’épouvante en entrant dans une chambre à gaz tandis que les gens y meurent. Le film suit strictement les déplacements de Saul, donc s’arrête devant la chambre à gaz, puis y entre après l’extermination pour débarrasser les corps, laver, effacer les traces. Ces images manquantes sont des images de mort, on ne peut pas toucher cela, le reconstituer, le manipuler", explique-t-il à propos de son choix de mise en scène, qui a eu ses partisans mais aussi ses détracteurs à Cannes, qui ont dénoncé un certain esthétisme dans la manière de filmer ainsi l'horreur. "Parce que je m’en tiens au point de vue de Saul, je ne montre que ce qu’il regarde, ce à quoi il fait attention. Cela fait quatre mois qu’il travaille dans un crématorium: par un mécanisme de protection, il ne fait plus attention à l’horreur, donc je laisse l’horreur floue ou hors-champ".

Pour ce personnage de Saul, qui sourit une fois -pas une de plus, mais un sourire significatif- dans le film, le réalisateur a choisi Géza Röhrig, qui n’est pas un acteur mais un écrivain et poète hongrois, qui vit à New York et qu'il avait rencontré il y a quelques années. Celui-ci porte sur ses épaules et sur son visage ce film grave, sombre, terrifiant et émouvant qui, comme l'on dit, laissera peu de spectateurs indifférents.

(Voir ci-dessous la bande-annonce du film):

 

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