"Mise à mort du cerf sacré" : Nicole Kidman et Colin Farrell victimes de la loi du talion (VIDÉO)
Attention, film étrange. Mise à mort du cerf sacré, du réalisateur grec Yórgos Lánthimos (ce mercredi 1er novembre sur les écrans), intrigue par son sujet, son scénario et son ambiance, entre thriller et fantastique, sur le thème du sacrifice.
Steven (Colin Farrell), brillant chirurgien, est marié à Anna (Nicole Kidman), ophtalmologue respectée. Ils vivent heureux avec leurs deux enfants Kim, 14 ans, et Bob, 12 ans. Depuis quelques temps, Steven a pris sous son aile Martin (Barry Keoghan), un jeune garçon de 16 ans un peu tête à claques qui a perdu son père deux ans auparavant et vit seul avec sa mère.
Le chirurgien et l'adolescent se voient régulièrement et entretiennent apparemment des relations d'amitié. Mais Martin s'immisce peu à peu au sein de la famille, fréquente Kim, a une attitude bizarre. Tout bascule quand l'adolescent révèle au chirurgien qu'il le tient pour responsable de la mort de son père sur la table d'opération et qu'il veut se venger. Il le menace, lui et sa famille, d'un sort atroce et mystérieux s'il ne sacrifie pas un de ses proches: œil pour œil, dent pour dent…
"Ce que je voulais essentiellement explorer, ce sont les sujets de la justice, des choix, de la nature humaine, et des comportements", explique le réalisateur. Le film a obtenu le Prix du scénario au dernier Festival de Cannes, deux ans après le Prix du Jury de son précédent film The Lobster (avec Rachel Weisz et déjà Colin Farrell), film lui aussi très singulier dans son scénario et sa réalisation.
Sur les thèmes de la vengeance et du sacrifice, Mise à mort du cerf sacré passe du mystérieux au fantastique avant de virer vers le gore, en déroulant lentement son originalité et son aspect bizarre et oppressant, voire malsain, dans des scènes et dialogues baignant dans une atmosphère qui rappelle certains films de David Cronenberg, David Lynch ou Michael Haneke, avec une bande-son effrayante à la Stanley Kubrick.
On parle de masturbation par autrui et de premières règles, Bob demande à Martin de lui montrer les poils sous ses bras et Martin demande à Steven de lui montrer les poils sur son torse, Steven et Anna ont baptisé "Anesthésie générale" une position sexuelle dans laquelle elle reste immobile pendant qu'il lui fait l'amour, il y a d'immenses couloirs d'hôpital blancs, clairs, propres et déserts, des enfants bientôt atteints de paralysie des membres versent des larmes de sang…
Dès le début, on est fasciné ou on est rétif, on comprend que ce n'est pas un film comme les autres. La première image est celle d'une opération à cœur ouvert, avec en gros plan un cœur qui bat. Alors pourquoi ce titre étrange –et un rien frimeur? Il s'agit du thème du sacrifice, expliquait le réalisateur à Cannes: "Pendant l’écriture, nous avons découvert des passerelles avec la tragédie Iphigénie d’Euripide et j’ai trouvé intéressant d’évoquer cette notion très ancrée dans la culture occidentale. Dans la vie, il y a des gens qui se retrouvent face à d’énormes dilemmes et le concept de sacrifice soulève un grand nombre de questions ouvertes à tout".
(Pour rappel et pour ceux qui n'ont pas fait grec seconde langue au lycée, dans la mythologie Iphigénie était la fille du roi Agamemnon, chef des Grecs pendant la guerre de Troie. Dans la pièce Iphigénie à Aulis du tragédien Euripide (480-406 av. J-C), reprise au XVIIe siècle par Racine, Iphigénie doit être sacrifiée à la déesse Artémis, vexée par une offense d'Agamemnon. Celui-ci accepte le sacrifice de sa fille, mais au dernier moment Artémis se ravise et décide de sacrifier une biche à la place d'Iphigénie).
Iphigénie, c'est presque de la rigolade à côté de ce film. "C’est vrai que le récit est brutal dans sa totalité, mais pas à chaque instant. Il n’y a pas un ton très grave et sérieux. C’est une sorte de film comique et sur le tournage, nous nous sommes amusés", dit Yórgos Lánthimos qui a, c'est certain, une notion bien à lui du "film comique".
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.