"Les Victoires du Front Populaire", 80 ans après

Auteur(s)
Maxime Macé
Publié le 03 mai 2016 - 16:48
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Léon Blum buste balcon 1936
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©Collection Yli/AFP
Il y a 80 ans, pour la première fois de l'histoire de la IIIe République, la gauche arrivait au pouvoir.
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Il y a 80 ans, pour la première fois de l'histoire de la IIIe République, la gauche arrivait au pouvoir. Le 3 mai 1936, le Front populaire mené par Léon Blum remportait en effet le second tour des élections législatives. Nicole Masson, ancienne professeur d'université, revient sur cette période charnière de l'Entre-deux-guerres avec un très beau livre "Les Victoires du Front populaire".

Ce mardi 3 mai la France commémore les 80 ans de l'élection du Front populaire. Raconter l'histoire du premier gouvernement d'une gauche unie que la France a connu, voilà l'objectif que s'est fixé Nicole Masson avec son ouvrage Les Victoires du Front populaire (Editions du Chêne). Ce livre accessible à tous permet bien comprendre le contexte historique qui a amené à l'union des gauches et ce que le gouvernement du Front populaire a apporté à l'histoire sociale de la France.

Avec ce bel ouvrage, richement illustré avec des photos parfois inédites de l'époque et des "Unes" du journal Le Populaire, le lecteur se replonge dans ses souvenirs de cours d'Histoire au lycée. En deux ans seulement, entre 1936 et 1938, ce gouvernement de gauche fut à l’origine d’avancées sociales considérables, qui ont révolutionné la société française de l’époque: mise en place du droit syndical, de la semaine de travail de 40 heures (contre une moyenne tournant auparavant autour de 45 à 46 heures), des premiers congés payés, ou encore de la scolarité obligatoire jusqu’à 14 ans. Des acquis sociaux qui sont encore à la base de notre système de protection des travailleurs.

Comme le souligne l'ancien ministre Jack Lang dans sa préface, le Front populaire "nourrit notre réflexion et éclaire notre avenir".

 

Quatre questions à Nicole Masson, auteure de l'ouvrage:

> Pourquoi avoir choisi de construire ce livre autour des "Unes" du journal Le Populaire?

"Il se trouve que ce journal a été assez peu exploité et en plus il s'agit du journal dont Léon Blum a été le rédacteur en chef. Ce quotidien, socialiste, a accompagné le Front populaire tout au long de cette période, on y retrouve justement des éditoriaux de Léon Blum qui permettent d'illustrer les différents chapitres du livre.

"Le livre est volontairement un ouvrage populaire accessible au plus grand nombre. Il s'ouvre d'ailleurs sur un chapitre de remise dans le contexte de l'époque qui permet de bien saisir l'importance de cette période de l'Entre-deux-guerres, parfois un peu écrasé entre ces deux évènements historiques majeurs que sont les deux guerres mondiales, c'est une période très intense en terme de mouvements politiques et sociaux.

"Ce qui est surprenant quand on lit le livre et encore plus lorsque que l'on écrit, c'est le parallèles que l'on peut faire entre l'époque du Front populaire et aujourd'hui, mais en y regardant de plus près ce parallèle est moins évident qu'il n'y paraît au premier abord. Si l'on prend la répartition des emplois: l'agriculture et l'industrie, qui représentent l'essentiel des masses populaires de l'époque ne sont plus du tout aussi important. Les conditions ont tellement changé que les rapprochements sont un peu hasardeux".

 

> Comment expliquer l'engouement autour du 80e anniversaire du Front Populaire?

"Ce qui est frappant chez le Front populaire, ça a été sa capacité à changer profondément la société en aussi peu de temps. En douze semaines 24 lois sociales à application immédiate sont proposées et votées au parlement sans passer par des décrets ou des navettes parlementaires. Il y a une efficacité frappante. Je crois que tout le monde a dans son histoire personnelle et familiale un rapport avec le Front populaire. On présente souvent les congés payés et la diminution du temps de travail comme des avancées majeures, c'est tout à fait vrai, mais il ne fait pas oublier non plus l'établissement des conventions collectives qui sont encore aujourd'hui les garants de la protection du salarié.

"Le Front populaire a posé les bases du modèle social français avec force, vigueur et le soutien de l'opinion publique".

 

> Le Front populaire constitue-t-il encore aujourd'hui une référence pour la classe politique française? Et qu'en est-il de la figure de Léon Blum ?

"Il sera amusant de voir le 3 mai qui se réclamera du Front populaire (rires). Je pense qu'entre le Parti socialiste de l'époque et l'actuel, les conditions ont tellement changé qu'il est difficile de faire de l'un l'héritier de l'autre.

"Ce qui est amusant avec la figure de Léon Blum, c'est que l'image que nous avons de lui actuellement, celle plutôt d'un bourgeois, est en complète inadéquation avec celle d'un homme qui dans ses discours appelle à la révolution prolétarienne et considère que le Front populaire n'est qu'une étape. Je ne suis pas sûr que notre extrême-gauche actuelle puisse se réclamer de la révolution prolétarienne".

 

> Le Front populaire, notamment pendant l'année 1934, a dû lutter contre la montée d'une extrême-droite puissante, peut-on faire un parallèle avec aujourd'hui?

"Là-encore le parallèle n'est pas aussi évident que l'on pourrait le penser. En effet, à l'époque du Front populaire, le panorama de l'extrême-droite est extrêmement varié. On retrouve aussi bien des monarchistes qui militent pour le rétablissement de la royauté, des ligues d'anciens combattants nationalistes hostiles à l'Allemagne et des autoritaristes à tendance fascisante admiratifs de l'Italie de Mussolini et de l'Allemagne d'Hitler. Le danger représenté par cette extrême-droite c'est la disparition de la République, au profit d'un autre régime. Ce danger n'existe plus aujourd'hui, le contexte en 80 ans à beaucoup changé.

"Néanmoins j'ai le sentiment que dans toute l'Europe la montée des nationalismes, ces frontières qui se ferment, ces mouvements de populations, sont très inquiétants car ils rappellent les années 1930". 

 

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