Sous les jupes ou sur la plage : des sanctions contre les photos obscènes
''Sous les jupes des filles'' n'est pas que le titre d''une chanson d'Alain Souchon ou une comédie d'Audrey Dana. Il s'agit aussi d'une pratique scandaleuse venue d'Angleterre qui consiste à violer l'intimité d'une femme en prenant des clichés à son insu, sous ses jupes.
Un amendement sénatorial au projet de loi sur les violences sexistes comble une lacune de notre droit pénal en permettant de réprimer ces agissements honteux avec un nouveau délit de captation d'images impudiques.
> L'upskirting, c'est quoi?
Certaines personnes, notamment dans les transports en commun, utilisent leur téléphone portable, de petits appareils photos ou de petites caméras, pour filmer l'entrejambe de femmes assises ou debout, lorsque celles-ci sont en jupe. Les clichés sont bien souvent ensuite partagés en ligne via des groupes spécialisés ou revendus.
> Pourquoi un nouveau délit?
Juridiquement, la qualification de ces faits posait une difficulté pratique. Il ne peut en effet s'agir d'agression sexuelle puisqu'il n'y a pas de contact entre l'auteur et la victime.
Il ne s'agit pas non plus d'atteinte à la vie privée par captation d'images présentant un caractère sexuel car les faits se déroulent dans un espace public.
Aussi, dans la plupart des cas, ces faits étaient poursuivis sous la qualification de violences. Toutefois, la violence supposant a minima un choc émotif, si la victime ne s'aperçoit de rien, ce choc n'est pas caractérisé.
Cette lacune dans notre droit pénal avait été relevée par de nombreux praticiens. Il fallait cependant que ces faits de "voyeurisme", qui peuvent également survenir lorsqu’une personne en regarde en cachette une autre dans une cabine d’essayage, et qui peuvent exister également en l’absence d’enregistrement des images, soient réprimés.
Voir: Outrage sexiste et harcèlement sexuel: quelle efficacité pour la nouvelle mesure?
> Le nouveau délit de l'article 222-32-1 du code pénal
Lors de la discussion parlementaire de la loi Schiappa sur les violences sexistes et sexuelles, les sénateurs ont donc créé un nouveau délit de "captation d’images impudiques", notamment dans les transports en commun, qui sera puni d’un an d’emprisonnement et 15.000 euros d’amende, portés à deux ans et 30.000 euros en cas de circonstances aggravantes.
Constitue donc une captation d’images impudiques ''le fait d’user de tout moyen afin d’apercevoir ou tenter d’apercevoir les parties intimes d’une personne que celle-ci, du fait de son habillement ou de sa présence dans un lieu clos, a caché à la vue des tiers, lorsqu’il est commis à l’insu ou sans le consentement de la personne''.
Le texte de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a été adopté mardi 24 en commission mixte paritaire. En Angleterre où le débat fait rage depuis plusieurs mois, un projet de loi analogue a été proposé par la parlementaire libérale-démocrate Wera Hobhouse et sera voté le 28 juillet prochain.
> Et les photos sur la plage?
Ce n'est pas parce que, l'été venu, on dévoile son corps sur une plage qu'il est pour autant permis de prendre des photos sans accord. L’article 9 du code civil rappelle que chacun a droit au respect de sa vie privée. Il est donc en général interdit de photographier quelqu’un sans autorisation.
Dans un lieu comme la plage publique (ou dans la rue), il n'est permis de prendre les gens en photo sans leur autorisation que si aucun sujet n’est cadré de manière isolée. En revanche, aussitôt que la personne se distingue comme étant le sujet principal de la photographie, son accord devient nécessaire (Cass Civ. 1re 12 décembre 2000).
Par ailleurs, même sans diffusion, la captation de l’image de quelqu’un dans un lieu privé sans son autorisation est interdite. Votre image est une donnée qui vous est personnelle. Vous avez donc un droit sur son utilisation et vous pouvez ainsi vous opposer à sa conservation ou sa diffusion publique sans votre autorisation, sauf cas particuliers. Si ce droit n’est pas respecté, vous pouvez obtenir réparation du préjudice auprès des tribunaux.
Certains ont pourtant été jusqu'à traquer des naturistes sur une plage qui leur était dédiée! C'est ainsi qu'en août 2016 un Anglais qui avait photographié avec son téléphone portable des dizaines de femmes, mineures et adultes, alors qu'elles étaient nues sur une plage naturiste de Port-Leucate (Aude) avait été mis en examen pour "captation et détention d'images pédopornographiques" et encourt cinq ans de prison pour ces faits. Il est également poursuivi pour "voie de fait avec préméditation" pour les photos des femmes majeures. Relâché sous contrôle judiciaire, il est désormais interdit de séjour en France.
On demande donc toujours systématiquement l'autorisation préalable de la personne avant un cliché et "si c'est non, c'est non!''.
Lire:
"Atteinte sexuelle avec pénétration": Schiappa renonce à une mesure très contestée
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