Association les Glénans : la plus grande école de voile d'Europe est bretonne
Il y a le ciel, le soleil et la mer… Le tout sur une coquille de noix fendant silencieusement les flots, au gré des vents, bercée par la houle.
L’image résume bien l’expérience que peuvent vivre les stagiaires de l’école de voile des Glénans –qui s’écrit avec un "s". Une association dont les principales bases sont situées sur l’archipel des Glénan –sans "s"– situé au large de Concarneau, dans le Finistère.
Ses 15.000 adhérents en font la plus grande école de voile d’Europe. Un statut conquis grâce à une expérience reconnue (comme en atteste le manuel nautique de référence Le cours des Glénans), mais aussi, et peut-être surtout, grâce à un état d’esprit très particulier.
Prendre le large
Tout commence au lendemain de la Seconde guerre mondiale, durant l’été 1947, avec 120 jeunes femmes et jeunes hommes, pour la plupart anciens résistants, pour certains anciens déportés. Sous l’impulsion des époux Hélène et Philippe Viannay, le groupe part pour l’archipel qui a donné son nom à l’association. L’objectif: apprivoiser la liberté retrouvée.
Pérennisée, l’association connaît un succès grandissant et devient, dix ans plus tard, le Centre nautique des Glénans (CNG). Mettre l’apprentissage de la navigation à la portée de tous est désormais sa raison d’être et le cap des 50.000 stagiaires est franchi en 1975. "Ecole de voile, école de mer, école de vie", les Glénans se veulent fidèles à l’esprit des fondateurs. Association reconnue d’utilité publique en 1974, son fonctionnement repose toutefois presque entièrement sur le bénévolat.
"Ils représentent plus de 80% de l’encadrement sportif", explique à FranceSoir Laurent Martini, directeur général des Glénans. Au total: 900 adhérents qui encadrent les stagiaires et transmettent à leur tour le savoir-faire des Glénans. En échange, une semaine de stage pour quatre de monitorat leur est offerte. Voilà la formule magique de l’association. Car les seuls stages payants (95% du budget) et subventions (à peine 5%) ne suffiraient pas pour faire tourner les cinq sites (archipel des Glénan, Vannes, Paimpol, Bonifacio et Marseillan) et payer les centaines de salariés qui, sans bénévolat, seraient nécessaires à son fonctionnement.
La principale ressource de l’école provient donc de ses 15.000 stagiaires annuels, déboursant entre 400 et 650 euros par personnes (selon le lieu, la période…) pour une semaine de voile. Un chiffre impressionnant quand on sait que, sur l’archipel des Glénan, par exemple, les conditions de vie sont pour le moins spartiates.
A la dure
Levés tôt, les stagiaires passent l'essentiel de leur temps sur l'eau ou autour, à s'occuper du matériel et à apprendre la théorie. Sur l'île, les dortoirs sont communs, les lits superposés et les toilettes rustiques (les "cunégondes", un simple trou dans le sable, face à l’océan, sur lequel est posée une cabane en bois). Comme l'archipel est protégé, les bâtiments sont rares et pratiquement rien n’a changé depuis des décennies.
Autour de ces quelques constructions en vieilles pierres, serrées les unes contre les autres, la lande sauvage, les colonies de mouettes et, à quelques centaines de mètres tout au plus, l'océan. Ici, l’eau est pompée grâce à la force éolienne et ensuite chauffée à l’énergie solaire (ce qui, sur les îles bretonnes, limite les chances de s’ébouillanter sous la douche).
Les stagiaires participent également aux corvées. Sur une semaine, cela représente une journée durant laquelle l’équipe de "bordée" se lève plus tôt pour préparer le petit-déjeuner, passe un peu moins de temps sur l’eau pour cuisiner et nettoyer les douches, les toilettes…
Difficile d’imaginer que les clients se bousculent pour passer des vacances dans de telles conditions. Et pourtant ça marche. Le public est nombreux et fidèle, même si Laurent Martini reconnaît que les stagiaires sont surtout issus des catégories socio-professionnelles supérieures, ce qui limite l’ambition de "mettre la voile à la portée de tous".
Alors, les Glénans seraient-ils devenus une sorte de Koh-Lanta pour riches? "Peut-être", répond, un peu amer, Laurent Martini, avant de corriger: "l’esprit d’origine est resté. Sur l’île, tout le monde est au même niveau, il n’y a pas de passe-droit et la participation à la vie communautaire est la règle. Les valeurs sont là".
D’autant que les Glénans font ce qu’ils peuvent pour toucher un public le plus large possible. "Au-delà des particuliers et des entreprises, nous fonctionnons également avec des écoles situées en zones sensibles", ajoute le directeur général. L’association reçoit également les personnes en situation de handicap.
L’école a formé jusqu’ici plus de 350.000 stagiaires. Parmi ceux-ci, certains sont devenus de grands navigateurs, comme Franck Cammas, Maud Fontenoy ou Vincent Riou; d’autres non, comme l’ex-Premier ministre Michel Rocard ou le journaliste Laurent Joffrin. Une pluralité des parcours qui révèle mieux que tout la diversité des Glénans: "école de voile, école de mer, école de vie".
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