Les itinéraires culturels européens : un mélange de culture et de citoyenneté
Alors que l’Europe fait ces derniers temps la une de l’actualité sur des questions économiques et la défiance qu’elle inspire à une partie de la population, il est bon de rappeler que le continent européen n’est pas seulement un espace économique, mais aussi un espace géographique regorgeant de paysages divers. C’est sur ce thème que la Commission européenne a décidé de communiquer depuis le début du mois de juin via sa campagne "Europe. Terre des Merveilles". Celle-ci vise ainsi à faire découvrir des espaces méconnus et cible notamment sur les citoyens de sept pays (France, Allemagne, Pays-Bas, Espagne, Pologne, Suède et Royaume-Uni) sélectionnés selon différents critères, notamment leur propension à voyager à l’étranger. Une belle idée pour voyager cet été!
Toutefois, cette envie de faire sortir les Européens des villes et lieux touristiques les plus visités n’est pas nouvelle et c’est à une autre institution internationale que l’on doit cette initiative: le Conseil de l’Europe. Créé en 1949, cette organisation rassemble 47 États membres et vise à garantir le respect des droits de l’Homme sur le continent. Pour développer la culture européenne, le Conseil de l’Europe a mis en place en 1987 le programme des Itinéraires culturels européens, en labellisant alors les Chemins de Saint Jacques de Compostelle. Son but: "démontrer, au moyen d’un voyage à travers le temps et l’espace, comment le patrimoine des différents pays et cultures de l’Europe contribue au patrimoine culturel commun". Les itinéraires retenus permettent des promouvoir les droits de l’Homme, la démocratie, ou encore la diversité et l’identité culturelle.
L’initiative est un succès et le label va essaimer un peu partout en Europe. Ce succès se voit notamment via plusieurs étapes. C’est tout d’abord la création de l’Institut européen des Itinéraires culturels en 1998 qui montre la prise en charge réelle de ce programme. Basé à Luxembourg et financé à la fois par le Conseil de l’Europe et le duché de Luxembourg, cette institution sélectionne les itinéraires bénéficiant du label. Elle en assure aussi le suivi tous les trois ans. Certains critères sont ainsi importants à respecter, notamment de définir un réseau transnational de sites et de monuments basés dans au moins trois pays et partageant un thème représentatif des valeurs européennes. Deux traits ressortent de ces conditions: proposer un voyage culturel permettant de faire vivre la mémoire européenne, mais sans viser à générer du profit.
Une autre étape a ensuite permis à ce programme de gagner en visibilité et d’augmenter les demandes de labellisation: la création d’un Accord Partiel Élargi (APE) en décembre 2010. L’APE permet de faciliter la coopération entre États, mais surtout d’augmenter les moyens financiers du label car les Etats signataires doivent contribuer à son financement. De 14 Etats à l’origine, l’Accord Partiel Élargi en compte aujourd’hui 26 avec l’arrivée en 2016 de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine. Le programme est aussi valorisé par l’Union européenne puisque la Commission reconnait l’Institut européen des itinéraires culturels comme un organisme actif au niveau européen dans le domaine de la culture.
Un succès qui ne se dément pas. A la veille de son trentième anniversaire, on ne compte pas moins de 33 Itinéraires culturels européens et cinq candidats potentiels. Leur diversité est telle qu’il est souvent difficile de définir exactement ce qu’est un Itinéraire culturel européen. Toutefois, il reste possible d’en classer une large partie par personnages européens (les voies de Mozart, Saint Martin de Tour, Napoléon Bonaparte, les routes des phéniciens…), par chemins de pèlerinages (les chemins de Saint Michel), par influence monastique (les sites clunisiens) ou encore selon l’héritage industriel (les différentes routes du fer)
Pour autant, ce classement par thèmes ne regroupe pas tous les itinéraires et c’est là un des premiers problèmes de ce label : sa lisibilité. Il s’avère parfois complexe de comprendre ce qu’est un Itinéraire culturel européen et cela impacte sur la visibilité du réseau. Il semble notamment nécessaire d’améliorer la stratégie de communication, notamment à travers des sites web plus lisibles. A ce titre, la page de l’Institut européen des itinéraires culturels est peu utilisée pour planifier ses vacances alors qu’il répertorie assez clairement l’ensemble des sites. Ainsi dans certaines régions de France, ce sont davantage par les adresses appartenant à ce label que les visiteurs découvrent son existence (l’itinéraire Saint Martin des Tours par exemple).
Enfin, ce problème de visibilité peut aussi se comprendre par le peu de moyens alloués à ce programme par le Conseil de l’Europe, lui-même faiblement doté (286.100 euros en 2014 pour le programme soit 0,08% de son budget total), même si l’on ajoute les États membres de l’Accord Partiel Élargi. Le travail de l’Institut européen des Itinéraires culturels s’avère donc colossal au vu de ses ressources pour faire connaitre davantage ce tourisme et les valeurs qu’il véhicule.
(Avec la contribution de la Maison de l’Europe de Paris)
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