Congé maternité : la Commission européenne pour "une nouvelle approche"

Auteur(s)
JmC
Publié le 15 juillet 2015 - 16:22
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Licia Ronzulli Parlement Européen Enfant
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©Vincent Kessler/Reuters
La députée italienne Licia Ronzulli et sa fille, au Parlement européen, en février 2012.
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Il est un sujet sur lequel l'Union européenne traîne les pieds: le congé maternité. La dernière directive date de 1992 et, depuis, les Etats-Membres n'ont pas de politique commune. Les tentatives de la Commission européenne pour unifier tout cela sont restées vaines.

"Do it for Denmark" (Faites-le pour le Danemark). En réponse au faible taux de fécondité du Danemark, cette campagne publicitaire d’une agence de voyage en avril dernier incitait les Danois à faire des enfants. Elle avait lancé une compétition originale: réserver un voyage, prouver qu'on a conçu un enfant pendant le séjour, et gagner trois ans de provisions pour bébé.

Le Danemark ne fait pas figure d’exception dans l’Union européenne: le taux de fécondité moyen en Europe est de 1,5 enfant par femme. Avec d’importantes variations entre les pays membres de l’Union européenne: la France, l’Irlande et la Suède ont des taux de fécondité élevés par rapport à ceux de l’Espagne, de l’Italie et de la Pologne. Les politiques de natalité, elles, ne peuvent pas organiser un jeu concours. Alors, qu’en est-il du congé maternité dans l’Union européenne?

La directive européenne sur le congé maternités existe depuis 1992. Elle fixe à un minimum de 14 semaines le congé maternité, dont deux semaines obligatoires avant la date prévue de l’accouchement. Selon la directive en vigueur, "une prestation est jugée adéquate lorsqu’elle assure des revenus au moins équivalents à ceux que recevrait la travailleuse concernée (…) dans la limite d’un plafond éventuel déterminé par les législations nationales". Le plafond permet aux Etats-membres de diminuer et choisir la prestation à laquelle une future mère peut prétendre.

Cette directive européenne a minima a créé des situations totalement différentes au sein de l’Union européenne au niveau de la durée du congé maternité et de la compensation offerte. A titre d’exemple, le Danemark propose 52 semaines à 100% du salaire de la mère, le Royaume-Uni offre 52 semaines rémunérées aussi mais seulement à hauteur de 40%, la France accorde 16 semaines avec une rémunération en moyenne de 60%, en Grèce c’est 16 semaines également mais avec seulement 50% du salaire, et en Allemagne c’est 14 semaines à 100%.

En 2010, Edite Estrela, députée socialiste portugaise au Parlement européen, a proposé une nouvelle directive imposant un congé maternité de 20 semaines, avec une compensation à 100% du salaire de la mère, ainsi que la création d’un congé d’adoption pour tous les Etats-membres de l’Union européenne. Ce chiffre n’est pas anodin, puisque la moyenne du congé de maternité dans l’Union européenne s’élève à 20 semaines, avec des situations extrêmement disparates.

En pleine crise économique, la question de la durée du congé maternité et de son indemnisation financière a fait rapidement débat. Deux points de vue viennent s’affronter. Il est soutenu par certains qu’un congé trop long pourrait empêcher les femmes de retourner sur le marché du travail, et constituer une discrimination à l’embauche. D'autres argumentent, au contraire, qu’il permettrait une meilleure santé des parents et des enfants, d’économiser les frais de garde, d’encourager les femmes à avoir des enfants et d’avoir une vie professionnelle. 

Cette nouvelle directive a été adoptée par le Parlement européen, mais rejetée par les gouvernements nationaux (le Conseil de l’Union européenne). L’argument avancé par les pays européens est un argument économique: ce congé serait inabordable pour les employeurs et pour les gouvernements qui cherchent à réduire leurs dépenses en temps de crise. Les députés européens en charge de ce rapport ont proposé une étude, qui démontrait qu’une augmentation de 1% du taux d’emploi des femmes en Europe suffirait à couvrir les coûts engendrés par l’allongement du congé maternité et la compensation liée.

Licia Ronzulli, député italienne du Parti Populaire Européen, est apparue à plusieurs reprises au Parlement avec sa fille dans les bras. "On pousse les femmes à étudier, à avoir un travail intéressant. Et puis finalement elles doivent choisir entre leur carrière et leur vie privée. Les femmes ne devraient pas avoir à choisir", expliquait-elle en 2012.

Pourtant, bloquée depuis 6 ans dans le processus législatif européen par l’impossibilité des gouvernements à trouver un compromis, la proposition de la Commission européenne est passée à 18 semaines et 100% de compensation en mai dernier. Mais, toujours sans accord, elle a finalement été retirée le 1er juillet, la Commission exprimant son souhait d'"ouvrir la voie à une nouvelle approche".

Pour beaucoup de députés européens, c’est un vrai scandale. D’autant plus que la proposition créait pour la première fois un cadre juridique européen pour un congé de paternité de 2 semaines rémunérées à 100%. Toutefois, en France, selon l’INSEE, 98% des pères interrogés en 2010 n’ont pas pris leur congé paternité à temps plein alors qu’ils ont droit, depuis 2002, à 11 jours.

Le cas particulier de la Suède mérite qu’on s’y intéresse –et peut-être que l’on s’en inspire? Le pays, traditionnellement pris comme exemple de l’égalité femmes-hommes, ne prévoit pas de congé maternité ou paternité spécifique, mais mélange les deux en un congé parental de 480 jours calendaires au total (avec obligation de 60 jours pour chaque membre du couple).

La dernière directive européenne date donc de 1992. Depuis, le modèle familial a fortement évolué et les femmes sont de plus en plus présentes sur le marché du travail. Parallèlement, l’Union européenne connaît une baisse de la natalité à laquelle il faut répondre. Alors, il est peut-être grand temps de mettre la directive au goût du jour?

(Avec la contribution de la Maison de l’Europe de Paris)

 

 

 
 

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