Les boulangers parisiens peuvent partir en vacances quand ils veulent
Difficile, ces derniers jours, de trouver une baguette de pain fraîche à Paris. Car dans la capitale et en proche banlieue, de nombreuses boulangeries sont fermées en ce mois d’août. C'était déjà le cas depuis longtemps, mais cette année c'est encore plus notoire. Et pour cause: grâce à la loi de simplification sur la vie des entreprises votée en décembre dernier, pour la première fois depuis 20 ans les boulangers de Paris et de la petite couronne peuvent partir en vacances quand bon leur semble.
Jusque-là, en héritage d’une loi de la Révolution Française qui avait instauré en 1790 un système de réquisition estivale des boulangeries de la capitale afin de prévenir toute pénurie de pain, les boulangers parisiens étaient contraints de respecter l’arrêt préfectoral mis en place en 1995. En partenariat avec la chambre interprofessionnelle, la préfecture de Paris avait ainsi répertorié les boulangeries de Paris et de la petite couronne, rue par rue, et les avait ensuite divisées en deux groupes: les établissements qui doivent ouvrir en juillet, les autres en août, avec alternance d'une année sur l'autre (les pharmaciens sont soumis au même type de législation). Ceux qui ne respectaient pas les règles étaient passibles d’une amende allant de 11 à 33 euros par jour de congé indu.
Jusqu'à cet été donc. C'est pourquoi, ces dernières semaines, de nombreuses personnes ont été aperçues faisant la queue sur des dizaines de mètres devant l’entrée d’une boulangerie parisienne. "C'est la première année que je galère autant à trouver une boulangerie ouverte au mois d'août", témoigne une femme devant une boulangerie du 14e arrondissement, sur RMC-BFMTV. "Franchement, cela ne donne pas une bonne image. Il y a beaucoup de touristes qui viennent… On mange aussi beaucoup de sandwiches pendant les vacances, et s'il n'y a pas de pain, on fait comment?", s’énerve une autre.
Preuve de cette mauvaise image véhiculée à l’étranger, nos voisins britanniques n’ont pas tardé à crier à la "pénurie de pain" à Paris. "La France craint une crise de la baguette depuis que les boulangers sont autorisés à prendre des vacances", titrait ainsi The Telegraph en Une le week-end dernier, citant dans son article des témoignages de touristes britanniques en vacances à Paris. "Je suis sortie chercher une baguette il y a quelques jours, et les deux boulangeries les plus proches étaient fermées en même temps pour la première fois", raconte une Birtannique, tandis qu’un artiste français s’insurge lui aussi: "Nous avons dû acheter ces étranges mini-baguettes à moitié cuites dans mon supermarché et les mettre au four".
Interrogé par Le Parisien, Pascal Barillon, vice-président de la Chambre professionnelle des boulangers parisiens, tente de calmer le jeu. "Règlement ou pas, on continue à s’arranger entre collègues (pour que tout le monde puisse avoir du pain, NDLR). Nous n’avons aucun intérêt à partir tous en même temps. Encore moins à être là tous en même temps", explique-t-il.
Avant l’été, la chambre professionnelle avait d’ailleurs invité les boulangers à s’autodiscipliner pour la répartition de leurs congés. "Ca a fonctionné en juillet. On fera le point à la rentrée pour le mois d’août. Mais a priori cela devrait bien se passer", assurait Pascal Barillon il y a quelques jours.
Pourtant, force est de constater que si dans les quartiers touristiques, comme les Abesses, une boulangerie sur deux est encore ouverte cette semaine, dans d’autres coins de la capitale, le 14e notamment, c’est loin d’être le cas. Aussi, ceux qui tiennent boutique jouissent d’un franc succès. "On doit faire près de 15% de chiffre d'affaires en plus que les autres mois", se réjouit Youssef, propriétaire d’une boulangerie ouverte dans le 14e, interrogé par RMC.
Malgré tout, Youssef aurait préféré une meilleure communication de la part de ses collègues. "On est surpris parce que nous n'avons pas été prévenus (des départs en vacances, NDLR). Dès lors, certains jours, nous manquons de pain", explique-t-il. Compliqué quand on sait que les Français consomment en moyenne chaque jour 160 grammes de pain chacun, soit une-demi baguette...
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