Confusion autour de la relance de l'application "Stop COVID", pour l'instant très peu utilisée
L'application StopCovid, était un des piliers du système d'information du gouvernement au service de la politique de lutte contre l'épidémie. Cependant, alors qu’une utilisation massive de l'application aurait été nécessaire pour contrôler la situation pendant le déconfinement, après quelques semaines l'application n’avait été installée que par 2,4 millions de personnes et a ensuite été désinstallée par une personne sur quatre. Le 15 septembre , le Comité de contrôle et de liaison COVID-19 (CCL-COVID) a publié un document qui évoque un avis de relance de la promotion de l'application StopCovid, en complémentarité avec d'autres dispositifs de « tracing », à mettre en œuvre. Le CCL appelle le gouvernement à lancer une campagne d'information sur l'application StopCovid pour pallier l'échec et le manque d'utilité de cette application. Mais, n'est-il pas déjà trop tard pour faire renaître StopCovid de ses cendres? Avons-nous vraiment besoin d'investir dans des outils numériques pour arrêter la propagation de l'épidémie, sachant que certains sont encore réticents à partager leurs données de santé?
Un nombre de téléchargement “dérisoire” et peu de consultations
Disponible depuis le 2 juin dernier, cette application aurait pu permettre de prévenir rapidement des personnes qui auraient pu être en contact avec des personnes testées positives, par exemple dans des espaces clos de façon prolongée, dans des restaurants, et réunions familiales ou amicales. Pour qu'elle soit réellement efficace, les spécialistes estiment qu'elle aurait dû être téléchargée par 30 à 40 % de la population au minimum, même si certains positionnent ce seuil à 20%. Une telle application est également plus utile si le taux de reproduction de la maladie est élevé.
Au final, le nombre de téléchargement est très loin de ces objectifs, et le résultat est frappant et décevant: il y a eu moins de 200 notifications à des cas contacts après trois mois d'existence de l'application, et les désinstallations de l'application s'élèvent au moins à 700 000. Par ailleurs, plusieurs milliers de personnes n'ont même pas activé l'application, et ne la consultent jamais.
La sensibilisation à l'utilisation de l’app pourrait changer la donne
Les circonstances actuelles (recrue de l'épidémie, arrivée de l'automne et des autres infections respiratoires, usage accru des transports en commun, télétravail, reprise de l'activité économique, possibilité d'être contaminé une seconde fois, nécessité de protéger la population la plus âgée) pourraient être favorables, selon le CCL, à un changement de politique .
Stop covid repose sur l'idée que son utilisateur est solidaire, mais selon les chiffres, cette solidarité ne s'exprime pas sans des rappels réguliers. Une campagne de sensibilisation en cas de rebond de l'épidémie a déjà montré comment les Français réagissent et téléchargent l'application dès qu'ils reçoivent un message. Par exemple, plusieurs milliers de personnes vivant en Guyane ont téléchargé l'application après avoir reçu un SMS des autorités de santé les informant de son existence.
Lors du conseil de défense du vendredi 11 septembre, une autre stratégie d'incitation des français a été évoquée : un accès privilégié aux tests pour ceux qui possèdent et utilisent l’application. L’idée a très vite fait polémique, et lors du Conseil des ministres du 16 septembre, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a affirmé que cela n’était pas une piste envisagée (min 22). Il a cependant réaffirmé l'intérêt de l’outil “qui n’a pas encore trouvé son public”.
La CNIL rappelle que ” le ministère a confirmé qu’il n’envisage pas d'attacher des conséquences juridiques défavorables au fait de ne pas avoir téléchargé l'application et qu’aucun droit spécifique ne sera réservé aux personnes qui l'utilisent”, ce qui est une garantie que l'utilisateur a donné un consentement d’utilisation libre.
Un stop covid analogique plus efficace ?
Contrairement aux Français, un quart des Allemands a déjà téléchargé l'application Corona-Warn-App, qui est accessible dans quatre langues : l’allemand, l’anglais, le turc et l’arabe. Mais malgré ce succès de la stratégie de lutte numérique conntre le Coronavirus en Allemagne, le pays n’a pas négligé les bonnes vieilles méthodes analogiques, ignorées en France: l’Allemagne a mis en place des formulaires papier remplis volontairement par les clients de tous les établissements recevant du public, pour pouvoir les identifier et les contacter dans le cas où un client serait testé positif. Cette alternative analogique à l'application permet un effet de levier en terme de sensibilisation: lorsque les gens remplissent ces formulaires dans les restaurants, les bars, etc, ils sont conscients que le principe peut être efficace, et cela les encourage à s'informer sur l'application mobile, et à la télécharger. Un exemple concret de fait que les technologies numériques seules ne sont pas forcément la solution miracle. Pourquoi la France n’a-t-elle jamais mis en place ce système de formulaires papier, pour se concentrer sur une application peu efficace?
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