Dissolution de Génération identitaire : sur quelles bases et pour quels effets ?
Le gouvernement envisage de dissoudre le groupe d'extrême droite Génération identaitaire suite à l'occupation illégale de la Caf de Bobigny la semaine dernière. Le politologue Jean-Yves Camus explique à France-Soir qu'en l'état il pourrait être juridiquement difficile de motiver la décision. De son côté, Génération identitaire nous assure qu'une éventuelle dissolution ne "les ferait pas taire".
L'action de Génération identitaire à la Caf de Bobigny pour réclamer "De l'argent pour les Français. Pas pour les étrangers!" pourrait coûter cher au groupe d'extrême droite. En effet, le gouvernement envisage de dissoudre GI suite à ce que Christelle Dubos, la secrétaire d'Etat auprès de la ministre de la Santé, a décrit comme "une prise d'otages des agents et du service public". Si cette dissolution devenait effective elle s'ajouterait à la liste des dissolutions de groupuscules d'extrême droite annoncées en février suite aux profanations du cimetière juif de Quatzenheim.
"Je ne suis pas juriste mais en l'état, je ne vois pas de raison de dissoudre Génération identitaire", explique à France-Soir Jean-Yves Camus, politologue spécialiste de l'extrême droite. Et de poursuivre: "on n'est pas face à un groupe qui a préparé une action terroriste ou qui représente une menace pour la sûreté de l'Etat". C'est la direction des libertés publiques qui prépare les mesures de dissolution qui doivent être motivées légalement. Comme le souligne le chercheur, le "Conseil d'Etat a déjà annulé des décrets de dissolution par manque de motivation juridique". Ce fut notamment le cas pour l'association Envie de Rêver qui gérait le local de réunion du groupuscule Troisième Voie de Serge Ayoub en juillet 2014 après la mort de Clément Méric. A la fin des années 60, plusieurs organisations trotskistes comme l'Organisation communiste internationaliste, la Fédération des étudiants révolutionnaires et le groupe Révoltes avaient été dissoutes puis rétablies.
"On peut tout à fait poursuivre en justice et condamner les militants de Génération identitaire pour leurs actions comme ce fut le cas pour l'occupation de la mosquée de Poitiers en 2012", rappelle toutefois Jean-Yves Camus. Action qui avait déjà valu des menaces de dissolution au groupe, mais sans déboucher sur une décision concrète.
Voir - Génération identitaire: le gouvernement réfléchit à dissoudre le groupe d'extrême droite
Toutefois, la dissolution si elle devait réellement intervenir, pourrait porter un coups très rude à Génération identitaire comme l'explique Jean-Yves Camus: "les mesures de dissolution sont toujours difficile à encaisser pour un mouvement. Il y a toujours une déperdition de militants, souvent les plus jeunes et les moins engagés d'une part. D'autre part la menace d'être poursuivi pour reconstitution de ligue dissoute fait peser une pression juridique sur les dirigeants des groupes". Le chercheur pointe du doigt le cas du Bastion social qui a été dissous par décret fin février et qui a depuis cessé ses activités (tout en promettant que le "combat ne faisait que commencer").
De même, des personnalités dirigeant des groupes d'extrême droite dissous suite à l'affaire Clément Méric ont poursuivi leurs activités dans des organisations nouvelles. "C'est le cas d'Yvan Benedetti, ancien dirigeant de l'Œuvre française, qui continue à faire de la politique sous la bannière du Parti nationaliste français", souligne Jean-Yves Camus. "Il y a des gens qui se considère comme des soldats politiques".
Contacté par France-Soir, Génération identitaire assure avoir appris la nouvelle "par la presse" et n'avoir eu aucun contact avec les autorités à ce sujet. Le groupe envisage-t-il de contester une éventuelle dissolution? "On n'en est pas là. Avant, encore faut-il que les autorités trouvent une raison légale de le faire", assure Anaïs Lignier, porte-parole de Génération identitaire. Puis de contre-attaquer: "Quand nous réalisons nos actions, nous respectons un certain cadre pour éviter des violences. Il n'y a rien de scandaleux à nos activités, à moins que l'on soit en dictature sous le régime Macron?". La porte-parole ajoute que les militants de GI qui ont participé à l'action contre la Caf de Bobigny sont convoqués au tribunal "en novembre prochain" pour des faits "d'entrave au travail" qu'ils contestent. Et de conclure: "le mouvement n'est qu'un moyen, une dissolution ne nous fera pas taire".
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