Enfants migrants en rétention : "il est possible d'enfermer beaucoup moins"
"Au motif de la pression migratoire, on s'affranchit des droits fondamentaux". La phrase de David Rohi, responsable des questions rétention de la Cimade, résume la position de l'organisation sur le placement des migrants mineurs en centres de rétention. "On n’enferme pas un enfant!", martèle une lettre ouverte aux parlementaires rédigée par 16 associations et dévoilée ce jeudi 15 (à lire ici).
Pour David Rohi, la loi immigration de 2018 qui n'a pas retenu l'interdiction d'enfermer des enfants -sollicitée par une partie de la majorité- n'est pas proportionnée au problème. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si cette lettre évoque des "traitements inhumains et dégradants" pour les mineurs et leur famille ainsi que l'atteinte à "l'intérêt supérieur de l'enfant", deux expressions présentes dans la Convention européenne des droits de l'homme. "Le Conseil de l'Europe s'est prononcé clairement contre la détention des enfants. La Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France à six reprises" rappelle-t-il à France-Soir.
Voir: Comme les Etats-Unis, la France enferme les enfants migrants
La situation est d'autant plus inacceptable pour l'ONG qu'elle n'est pas nécessaire. "On sait qu'il est possible d'enfermer beaucoup moins", assure David Rohi. "Il est possible de faire autrement, on le constate dans de nombreuses situations, et il n'y a rien à créer de supplémentaire. On a déjà un arsenal coercitif: le départ volontaire, l'aide au retour et des dispositifs plus coercitifs comme l'assignation à résidence. La majorité des préfectures procèdent aux expulsions sans recourir à l'enfermement ".
Et de rappeler le "traumatisme" que cela constitue pour les enfants d'être retenus dans "ces prisons qui ne disent pas leur nom: un milieu carcéral avec des barbelés, la vidéosurveillance, des policiers partout, des gens privés de liberté". "On interpelle des gens et ont leur dit: soit on vous enferme avec vos enfants, soit on les confie à une tierce personne voire à l'aide sociale à l'enfance".
Se défendant de toute "naïveté" sur le sujet, David Rohi juge qu'avec la rétention des mineurs "on passe la ligne rouge de la dignité". La Cimade espère donc que la mission parlementaire concédée par le gouvernement suggérera d'abandonner définitivement cette mesure et pas simplement de l'aménager dans son rapport attendu pour début 2019. Cela malgré un triste constat pour les principaux concernés: "Sur le plan politique, le contexte n'est pas favorable au respect des droits fondamentaux des migrants".
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