Expurgé de l'antisémitisme, le RN reste hostile aux Juifs (et d'extrême droite)
Exclue, car non invitée, du grand rassemblement contre l'antisémitisme de mardi 19 à Paris, Marine Le Pen a tout de même voulu associer le RN au chœur des condamnations des actes antijuifs qui se multiplient. Pour autant, et si le parti est bel est bien expurgé de son antisémitisme radical, il n'en reste pas moins une formation hostile aux Juifs et profondément altérophobe.
Alors qu'elle n'était pas invitée au rassemblement contre l'antisémitisme organisé place de la République mardi soir, Marine Le Pen a tout de même voulu s'inscrire dans le chœur des condamnations. La présidente du RN a ainsi déposé une gerbe devant la plaque en mémoire d'Ilan Halimi et dit sa "solidarité" avec nos "compatriotes juifs qui ne veulent plus vivre dans la crainte".
Comme l'an passé avec l'hommage à Mireille Knoll, Marine Le Pen tient à nouveau à démontrer que son parti est expurgé de l'antisémitisme radical qui était l'apanage du FN version Jean-Marie Le Pen. Fini les dérapages récurrents du patriarche, désormais le RN se veut le "meilleur bouclier, le meilleur rempart pour les Français juifs contre la montée (de) l'antisémitisme islamiste", a déclaré sa présidente mardi.
Après l'agression d'Alain Finkielkraut en marge de la manifestation parisienne hebdomadaire des Gilets jaunes, samedi 16, les cadres du parti lepéniste ont ainsi fait assaut de dénonciation du supposé péril "islamo-gauchiste". Car c'est bien le rejet de l'islam, et de lui seul, ainsi que des populations arabo-musulmanes qui est désormais le principal ciment idéologique du RN.
Lire- Finkielkraut défendu par Marine Le Pen: le RN en a-t-il fini avec l'antisémitisme?
Le Rassemblement national serait-il devenu un parti expurgé de tout rejet des Juifs? Pas tout à fait, précise le spécialiste de l'extrême droite Jean-Yves Camus: "si le RN compte des individualités et des instances au-dessus de tout soupçon d'antisémitisme, par exemple Gilbert Collard, son programme comprend toujours des mesures liberticides pour les Juifs". Et de lister notamment l'abattage rituel ou le port de la kippa que veulent interdire les "rassemblistes" s'ils accèdent au pouvoir.
"C'est un peu pervers pour un parti prônant la préférence nationale de vouloir remettre en cause une filière cacher qui repose notamment sur des petits producteurs locaux", souligne par ailleurs Jean-Yves Camus.
Le parti voue en outre une solide inimitié aux associations communautaires juives, qu'il qualifie de "communautaristes" et promet de leur couper les subventions s'il arrive au pouvoir. Ce qui n'a pas empêché Marine Le Pen d'assurer haut et fort depuis son élection en 2011 que "Les Juifs n'ont rien à craindre du FN".
"On ne gagne pas une élection sur l'antisémitisme", rappelle ainsi Jean-Yves Camus. Mais le politologue souligne aussi et surtout que l'antisémitisme radical est désormais très marginal à l'extrême droite: "il fait même débat au sein de l'Action française!". Un comble pour le parti -désormais groupusculaire- fondé par un Charles Maurras qui se définissait lui-même comme antisémite et xénophobe...
Ce qui ne veut pas dire que le RN est "nettoyé" de toute présence antisémite. Axel Loustau par exemple, ancien du groupuscule violent néofasciste GUD, est ainsi conseiller régional d'Ile-de-France du parti.
Mais c'est également le cas à la marge du parti. Les élèves de l'ISSEP de la toujours très populaire Marion Maréchal (ex-Le Pen), n'ont-ils pas choisi un général antisémite comme parrain de promo? Il n'y a pas si longtemps encore, Nicolas Bay, secrétaire général du RN, remettait aussi en cause la loi Gayssot qui punit les propos racistes et négationnistes...
"Si certains anciens antisémites du RN semblent crédibles quand ils disent en être revenus, le parti n'est pas pour autant sorti de l'altérophobie", souligne ainsi le spécialiste de l'extrême droite Nicolas Lebourg. "Pour eux, l'apport de l'étranger reste une «métastase»".
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