La justice ordonne la réintégration d’une infirmière non-vaccinée et le paiement des salaires non-versés
Une décision qui s'inscrit à rebours de la jurisprudence concernant le personnel soignant non-vacciné. Dans l'Orne, suite à une décision du conseil des prud’hommes d’Alençon datant du mardi 1er mars, une infirmière qui avait refusé de se faire vacciner vient d'être réintégrée dans l'EHPAD Les Laurentides à Tourouvre-au-Perche. La juridiction a également ordonné le paiement des salaires non versés pendant cinq mois, durée de sa suspension, et 1 500 euros de dommages et intérêts. En revanche, l'employeur a fait appel.
L’infirmière invoque son cancer pour rejeter le vaccin
Recrutée en juillet 2014 en qualité d'infirmière diplômée d'état à l'EHPAD Les Laurentides, la soignante développe quelques mois plus tard un cancer pour lequel « elle doit endurer des traitements très lourds et dont elle déclare qu'il a fallu quatre ans pour éliminer de son corps la chimiothérapie », explique le conseil des prud'hommes dans sa décision. Cette femme élevant seule sa fille de 16 ans, elle a refusé le risque de se faire injecter un vaccin « dont l'autorisation de mise sur le marché n'est que conditionnelle et dont on ne connait pas toutes les incidences en termes d'effets secondaires. »
Pour la juridiction, « le vaccin doit être considéré comme un médicament expérimental »
Le conseil des prud'hommes d'Alençon a jugé ces arguments de bonne foi et estimé dans sa décision rendue le 1er mars 2022 que « la législation européenne l'autorisait à refuser ce traitement dans la mesure où à ce stade il doit être considéré comme un médicament expérimental. » À ce titre, sa réintégration et le versement de 13 412 euros pour les salaires non payés ont été ordonnés. Une décision que l'association Bienfaisance de la Pellonnière, qui gère l'EHPAD, conteste, pour laquelle elle a d’ores et déjà prévu de faire appel. « On a pris en considération l'avis des prud'hommes », a déclaré Yvan Cartel, directeur de l'Ehpad des Laurentides, ajoutant : « Nous avons décidé de faire appel et bien-sûr, nous respecterons la décision prise ».
Dans l’attente, l'infirmière a produit un certificat de positivité au Covid en février, et pourra donc exercer son activité à l'EHPAD pendant trois mois.
« Une jurisprudence dissidente »
Si le conseil prud'homal considère le vaccin « en phase d'essai clinique », cet argument ne se conforme pas à l'avis du Conseil d'État et d'autres juridictions qui estiment que le vaccin n'est plus en phase d'essai clinique. « On a affaire à une jurisprudence dissidente », soutient Delphine Provence au Figaro, avocate spécialisée dans la défense des professionnels de santé. « Jusqu'à présent, la jurisprudence confirmait l'obligation vaccinale. Toutes les décisions de tribunaux administratifs et du Conseil d'État allaient dans ce sens. Cette fois, il y a une brèche dans la jurisprudence », juge-t-elle.
Pour la juriste, cette décision ne signifie pas qu'elle sera nécessairement adoptée par d'autres juridictions puisqu'il s'agit d'un référé, c'est-à-dire une procédure rapide, qui doit prévenir un dommage imminent – ici, le risque financier auquel fait face cette soignante en raison de l'absence de salaire. Une future décision prud'homale dite de fond, plus longue et jugée plus apte à constituer une nouvelle règle qui s'appliquera généralement, pourrait donc venir effacer cette jurisprudence.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.