Loi Travail : syndicats et patronat devant les députés
Après la ministre du Travail Myriam El Khomri, c'est ce mercredi 30 mars au tour des organisations syndicales et patronales d'être auditionnées par la commission des Affaires sociales de l'Assemblée sur la loi Travail, contre laquelle une forte mobilisation est attendue dans la rue jeudi 31. "Ce n'est pas un chèque en blanc aux entreprises": Myriam El Khomri a défendu mardi 29 avec assurance son texte devant des députés critiques pour des raisons diverses et réclamant des évolutions, un petit aperçu du débat parlementaire prévu début mai. "Je comprends qu'un texte aussi profondément réformateur suscite des questionnements et nécessite des débats", a déclaré la ministre du Travail devant la commission des Affaires sociales, une étape formelle mais délicate avant l'examen du projet de loi au Parlement le 3 mai. "Ca n'est pas un chèque en blanc aux entreprises. Je ne suis pas là pour cracher sur les corps intermédiaires, la loi ne prévoit pas de laisser le salarié seul face à l'employeur mais de renforcer les acteurs du dialogue social", a-t-elle ajouté, défendant un texte "équilibré".
Son projet a été accueilli par une vague de questions critiques pendant près de deux heures de la part d'une trentaine de députés de tous bords. Les interrogations portaient, entre autres, sur l'insuffisance de protections pour les salariés, mais aussi pour les TPE-PME, la complexité ou la faiblesse du compte personnel d'activité, les risques de l'article sur les licenciements économiques ou l'absence de lien entre code du travail et niveau de chômage. Christophe Sirugue (PS), rapporteur du projet, a jugé que le texte devait "évoluer" par rapport "aux demandes des TPE-PME" et "à la protection des salariés de ce pays qui ont besoin d'être rassurés". La ministre, qui s'est employée à répondre à chacune des questions pendant plus d'une heure, a revendiqué un "projet social-démocrate complètement assumé".
Concernant l'article très décrié précisant les motifs de licenciement, son objectif n'est "pas de faciliter les licenciements", a-t-elle dit. La ministre s'est toutefois dite "ouverte à une différenciation des critères" des difficultés économiques selon "qu'il s'agisse d'une TPE-PME ou d'une grande entreprise, par exemple en exigeant une baisse (du chiffre d'affaires, NDLR) sur une plus longue durée pour les grandes entreprises". Suppression du plafonnement des indemnités prud'homales pour licenciement abusif, renoncement aux décisions unilatérales de l'employeur sans accord dans les entreprises de moins de 50 salariés pour le forfait-jour ou les astreintes: le gouvernement a déjà fait des concessions qui ont apaisé une partie de la majorité, d'abord vent debout contre le projet. Mais frondeurs et écologistes, qui dénoncent une réforme "libérale" et des "régressions sociales", réclament le retrait du texte, tout comme les syndicats CGT, FO, Solidaires ou les organisations de jeunesse Unef et UNL, qui appellent à une "grosse mobilisation" jeudi.
En écho au patronat, les députés LR réclament une "réécriture". Leur chef de file, Christian Jacob, a prévenu mardi que si on n'y remettait pas les propositions "un temps évoquées", comme le forfait-jour, le plafonnement des indemnités prud'homales ou le temps de travail des apprentis, le texte ne pouvait "être votable" par les députés LR. La ministre du Travail dit aborder le débat parlementaire avec "beaucoup d'enthousiasme" et promet qu'il va "enrichir" la réforme avec des propositions émanant "de droite et de gauche". Cette loi est censée, selon Manuel Valls, répondre au chômage de masse "auquel notre pays s'est habitué depuis trop longtemps" (3,59 millions de personnes sans emploi en février).
Les syndicats représentatifs (CGT, CFDT, CFE-CGC, FO, CFTC) et le patronat (Medef, CGPME, UPA), qui ont commencé le travail de lobbying au Parlement, seront, eux, entendus par la commission des Affaires sociales ce mercredi. Et jeudi, le gouvernement va une nouvelle fois passer le test de la rue, avec des grèves et manifestations prévues partout en France. La mobilisation s'annonce large: fonctionnaires, salariés d'Air France ou des ports et docks sont appelés à cesser le travail, tout comme la RATP et la SNCF. Les députés écologistes, dont Cécile Duflot et Noël Mamère, vont participer aux défilés. Les syndicats prévoient une mobilisation plus importante que celle du 9 mars, où plus de 200.000 personnes avaient défilé dans l'Hexagone (450.000 selon les organisateurs). Et ils menacent d'en organiser d'autres, afin de peser sur le débat parlementaire.
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