Manuel Valls et Emmanuel Macron : le duel des "progressistes" pour 2017
Ils ont longtemps été "en phase", deux sociaux-libéraux désireux de "dépasser" le clivage droite/gauche. Mais entre Emmanuel Macron et Manuel Valls, la guerre est désormais déclarée pour porter les couleurs du "progressisme" à l'élection présidentielle.
En 2011, déjà, Manuel Valls semblait anticiper ce qui constituera ensuite la marque de fabrique de M. Macron: des déclarations tranchées et vécues comme iconoclastes par une partie de la gauche, y compris socialiste.
Il proposait de "déverrouiller les 35 heures qui n'existent déjà plus réellement" ou de supprimer "sans tabou" l'impôt sur la fortune. En octobre 2014, il appelait à prendre acte des "fractures au sein de la gauche" et à "bâtir une maison commune" de "toutes les forces progressistes".
Le Premier ministre, qui avait plaidé pour l'arrivée d'Emmanuel Macron à Bercy en août 2014, prenait sa défense quelques mois plus tard: "C'est une nouvelle génération qui assume ses responsabilités (...) Parce qu'il a été banquier, Emmanuel Macron ne pourrait pas être de gauche?"
Le 3 avril -quelques jours avant le lancement du mouvement d'Emmanuel Macron, En marche!-, le chef du gouvernement redisait son désir de "transcender les clivages" et de "tendre la main" à la droite.
Mais les dissensions entre les deux hommes n'ont pas tardé à se faire jour, mêlant batailles d’égos et divergences de fond, pour aboutir à des choix stratégiques antagoniques.
Cette concurrence est apparue en plein jour début 2016, à l'occasion de la loi Travail: plusieurs observateurs racontent comment chacun a alors fait assaut de "réformisme", avec pour effet de rendre public un texte qui n'avait pas été validé par les partenaires sociaux.
Autres sujets de discorde: la laïcité, la responsabilité ou non de la société française dans l'existence d'un "terreau" du terrorisme, de manière plus générale un rapport à l'autorité différent.
"Valls est à droite sur tout. La société, l'économie. Macron est à droite sur l'économie. A gauche sur les valeurs, la société, les banlieues", analysait en mars un ancien ministre de François Hollande. "Un libéral autoritaire", face à un "libéral libertaire", résumait un autre élu.
Emmanuel Macron a finalement lancé son propre mouvement et présenté sa candidature à la présidentielle. Il refuse de passer par la primaire organisée par le PS, qui n'a d'autre objet selon lui que de régler des "querelles de clans".
Manuel Valls de son côté, tout en revendiquant sa loyauté vis-à-vis de François Hollande, a contribué depuis la fin de l'été à son "empêchement", et déclarera lundi sa candidature à la primaire du PS.
Au passage, que ce soit par opportunisme ou par conviction, M. Valls a retrouvé de l'intérêt au clivage droite/gauche.
"Je revendique d'être pleinement ancré à gauche parce que la démocratie a besoin d'une droite et d’une gauche pour faire reculer l’extrême droite", a-t-il dit jeudi au Sénat.
Adhérent du PS depuis ses 17 ans, M. Valls est bien placé pour rafler la majorité des soutiens socialistes s'identifiant à la gauche gouvernementale.
Mais Emmanuel Macron, qui n'a été que brièvement socialiste et n'a jamais été élu, espère de son côté rallier les "orphelins" de François Hollande qui ne se reconnaîtraient pas dans la "gauche coup de menton" de M. Valls, et qui veulent aller au bout de la clarification entre "progressistes" et "conservateurs".
Pour l'instant, les ralliements restent relativement timides, le PS ayant menacé d'exclure ceux qui soutiendraient un autre candidat que celui investi par le parti. Plusieurs députés "ont envie d'aller chez Macron, mais ils ne voient pas le chemin", explique un député légitimiste.
Le mouvement pourrait s'accélérer, si Manuel Valls perd la primaire des 22 et 29 janvier face à la ligne "frondeuse".
Mais s'il l'emporte, un proche de Manuel Valls promet un bras de fer avec Emmanuel Macron pour que l'un des deux s'efface: "Il va y avoir une compétition pour voir qui doit renoncer", dit-il.
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