Marine Le Pen : selfie avec son "allié", le suprémaciste estonien Ruuben Kaalep

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Pierre Plottu
Publié le 15 mai 2019 - 17:34
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Marine Le Pen, son selfie avec le suprémaciste Ruuben Kaalep
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©Capture d'écran Facebook
Marine Le Pen, son selfie avec le suprémaciste Ruuben Kaalep.
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Marine Le Pen est au cœur d'une polémique depuis qu'a été diffusé sur Internet une photo d'elle en compagnie du député de l'extrême droite estonienne Ruuben Kaalep, néo-nazi notoire.

C'est un selfie de Marine Le Pen parmi tant d'autres et qui aurait pu passer inaperçu. La photo postée mise en ligne mardi 14 a pourtant fait polémique car la présidente du Rassemblement national (ex-FN), y apparaît au côté d'un jeune député estonien connu pour sa radicalité. L'homme est même notoirement négationniste et néo-nazi.

Ruuben Kaalep, député EKRE ("Parti populaire conservateur", extrême droite), membre de la coalition de droite au pouvoir en Estonie, a publié fièrement la photo sur ses réseaux sociaux. On l'y voit en compagnie de la présidente du RN tout sourire et faisant un signe de la main tout sauf anodin: le pouce et l'index forment un rond tandis que les trois autres doigts sont levés, donnant les lettres "W" et "P" pour "White Power" ("pouvoir aux blancs").

Un geste qui est parti d'une blague des adeptes du forum 4chan, site à peine moins radical que 8chan où se retrouvent les pires extrémistes et dont était par exemple adepte Brenton Tarrant, le terroriste de Christchurch. En février 2017, un de ces "anon" (pour "anonymes") comme ils se surnomment eux-mêmes, poste un message pour inviter à "inonder internet" avec ce signe. L'objectif: le présenter comme un "geste raciste" pour troller les "gauchistes".

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Une simple blague au départ mais qui a eu tellement de succès que ce "White Power" camouflé est réellement entré dans la gestuelle de l'extrême droite américaine. A l'inverse, nombreuses sont les personnalités ou anonymes qui ont été attaqués pour avoir fait ce signe de la main alors qu'ils ignoraient tout de son sens...

Mais il a bien été adopté par l'alt-right américaine et autres suprémacistes. Brenton Tarrant, l'a même exhibé jusque dans le box des accusés, après avoir massacré des dizaines de fidèles musulmans au nom de sa lutte xénophobe contre le supposé "Grand remplacement".   

Marine Le Pen a réagi dès mardi soir à la polémique pour nier connaître ce signe et donc sa signification. Elle a également précisé avoir contacté le "militant" Ruuben Kaalep pour qu'il dépublie la photo, afin de clore les débats. Ses troupes ont également très vite inondé les réseaux sociaux pour relativiser ce qui serait un selfie parmi tant d'autres avec un inconnu.

Sauf que Kaalep est tout sauf un simple militant. Le parti de ce député estonien est même présenté comme un "allié" du RN par le vice-président frontiste Nicolas Bay. Mardi, il était avec Marine Le Pen à Tallinn pour une réunion entre "défenseurs de la civilisation" avec, outre EKRE, les partis d'extrême droite les "Vrais Finlandais", le Parti populaire danois et la Ligue italienne. En bonne place sur nombre des photos de ce mini-sommet nationalistes organisé en pleine campagne pour les européennes: Ruuben Kaalep.

 

 

Le même Kaalep qui est connu pour son engagement négationniste. Le journal d'investigation estonien Eesti ekspress (lire ici) a ainsi révélé sa participation à une pièce de théâtre ou à des écrits remettant en cause la véracité de l'Holocauste. Il aurait également participé à lister des personnalités sur la base de leurs origines juives. Récemment, il a participé à des marches aux flambeaux à la symbolique très marquée extrême droite radicale, ou encore rencontré et rendu hommage l'an passé à des vétérans estoniens de la Waffen SS. Sur son compte Twitter il retweete notamment des messages appelant au "nettoyage" de la terre ou dénonçant une "invasion du tiers-monde" et soutient l'idée que EKRE crée ses propres "unités de défense".

 

 

A l'international, Ruuben Kaalep cite notamment en exemple Richard Spencer, qui lui rend la politesse, le suprémaciste américain qui avait lancé un tonitruant "Heil Trump!" devant des supporters faisant des saluts nazis lors d'un meeting à Washington en novembre 2016. Toujours selon la presse estonienne, il serait également lié à l'Anglais Paul Hickman, fondateur de "National Action". Ce groupe néo-nazi est interdit au Royaume-Uni car considéré comme terroriste.

Au-delà du cas de Ruuben Kaalep le parti EKRE, qui a connu son premier succès électoral aux dernières législatives de 2019, est ainsi ouvertement raciste, antisémite et homophobe. Outre ses militants, dont certains ont déjà été condamnés pour violences, les têtes d'affiche sont elles aussi radicales. Martin Helme par exemple, ministre des Finances de la coalition au pouvoir et fils du leader Mart Helme, est un adepte de la théorie du Grand remplacement, fantasme prédisant la disparition des "peuples européens" au profit de populations allogènes immigrées et principalement musulmanes. Martin Helme a enfin lui aussi déclenché une polémique pour avoir… fait le même signe "White power" que Kaalep, il y a quelques semaines en plein Riigikogu, le parlement estonien.

 

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