"Nuit debout" : après l'évacuation de lundi matin, le mouvement a repris place de la République
Le démantèlement du campement de la place de la République lundi 11 au matin n'a pas douché l'enthousiasme des partisans du mouvement "Nuit debout": lundi soir, ils étaient encore des centaines à refaire le monde au coeur de Paris. "La Nuit Debout ne s'arrête pas, ça doit continuer", a dit à l'AFP Gregory, 24 ans, membre de la commission presse.
Depuis onze jours, la place de la République est devenue l'épicentre d'un mouvement citoyen inédit, lancé au soir du 31 mars contre le projet de loi travail "et le monde qui va avec", qui a essaimé dans plus d'une cinquantaine de villes. Les manifestants se sont retrouvés chaque soir, souvent par milliers, dans une ambiance de kermesse et de forum altermondialiste. Mais leur autorisation de se réunir a expiré dimanche 10 au soir. L'évacuation de lundi matin, qui s'est déroulée sans heurt, a vidé la place de ses stands, tentes et matelas.
"Des gens avaient dormi là une semaine, créé des potagers, monté des tentes", "maintenant on ne peut plus", raconte Grégory en désignant les CRS et gendarmes mobiles qui veillent a proximité et ont tenté d'empêcher les militants d'apporter marmites de soupe et sono. Finalement, la "cantine" s'est réinstallée, et l'assemblée générale a repris, jeunes et moins jeunes se relayant au micro pour parler droits de l'Homme, constitution ou encore éducation devant des centaines de personnes assises par terre autour d'eux. "On a besoin de rêveurs, de vous", dit un anti-pub, proposant à son auditoire de recouvrir les publicités des environs par des "affichages beaux, poétiques et utopiques". D'autres ont appelé à rejoindre les étudiants ce mardi 12 à 1h30 à la gare Saint-Lazare pour un rassemblement en soutien aux cheminots. De part et d'autre de la place, des petits groupes refont le monde, discutent calmement avec les forces de l'ordre ou dansent au rythme des tamtams ou d'une fanfare. "C'est un mouvement citoyen, pacifiste qui vise à ouvrir un débat nouveau", définit avec enthousiasme Grégory. "La force de la chose c'est que c'est une masse critique de citoyens. On espère que ça ne soit pas repris par les politiques", confie l'étudiant à la barbe fournie.
En province aussi, pas question de baisser les bras. "Le désir de tout le monde est de prendre plus de pouvoir sur nos sociétés et nos vies", expliquait Cyril, l'un des organisateurs du mouvement à Lyon. "La lutte continue, on n'est pas fatigué", résumait un slogan lancé par les manifestants parisiens place de la République. Parmi eux, Françoise, retraitée, est venue tous les soirs depuis le début du mouvement: "Ça me plaît beaucoup de voir un mouvement en pleine construction et qui redonne la parole à tous sans exception."
Partir? Rester? Occuper un autre lieu? De nombreuses questions ont été soulevées par les incidents dans la nuit de samedi 9 à dimanche 10, lorsque quelques centaines de personnes ont voulu se rendre au domicile du Premier ministre Manuel Valls. Huit personnes ont été interpellées et des dégradations déplorées par les autorités. "On ne veut pas que le mouvement soit montré pour ce qu'il n'est pas, ce n'est pas un mouvement violent", affirme une des initiatrices du mouvement, qui se fait appeler Camille. "On peut discuter, dialoguer (…), mais si ça tourne à la violence, on ne peut pas tolérer", a mis en garde lundi le patron du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis. La présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse (Les Républicains) avait jugé la veille "souhaitable qu'on évacue la place de la République ou alors, si on ne l'évacue pas, que les manifestants eux-mêmes la sécurisent et empêchent la casse, l'agression des policiers, les dérapages". Les maires de Paris et des IIIe, Xe et XIe arrondissements ont promis de rester "intransigeants face aux débordements et aux violences": "S'il est légitime de rêver d'un autre monde, il ne l'est pas de dégrader celui-ci."
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