Procès Cahuzac : les tribulations de l'argent caché au menu ce mercredi

Auteur(s)
La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 07 septembre 2016 - 10:19
Image
Jérôme Cahuzac.
Crédits
©Lionel Bonaventure/AFP
Pour fraude fiscale et blanchiment, Jérôme Cahuzac encourt jusqu'à sept ans de prison et un million d'euros d'amende.
©Lionel Bonaventure/AFP
Au deuxième jour de son procès pour fraude fiscale, Jérôme Cahuzac devra s'expliquer sur les tribulations de son argent caché à l'étranger. Lundi, l'ancien ministre du Budget avait lancé une véritable bombe en expliquant que son premier compte secret avait été ouvert dans le but de financer le courant politique de Michel Rocard.

Au premier jour de son procès pour fraude fiscale, lundi 5, Jérôme Cahuzac a entraîné le tribunal correctionnel de Paris sur la piste d'un financement politique. Ce mercredi 7, l'ex-ministre du Budget devra s'expliquer sur les tribulations de son argent caché à l'étranger, de la Suisse à Singapour. L'ancien élu socialiste, héraut de la lutte contre l'évasion fiscale, boxeur à ses heures, est resté un orateur hors pair. Lundi, il a savouré l'effet de sa déclaration lâchée dans la torpeur de l'après-midi: le premier compte ouvert à sa demande en Suisse en 1992 par un ami était destiné à "financer" le courant politique de Michel Rocard.

C'est la première fois qu'il affirme que ce compte ouvert à la banque genevoise UBS par l'avocat proche de l'extrême droite Philippe Péninque a servi "pendant sept mois, de novembre 1992 à mai 1993", au financement des activités d'un homme dont il espérait "qu'il aurait un destin politique national". Il est "certain que Michel Rocard ignorait tout", mais refuse de livrer le moindre nom au sein de l'équipe de l'ex-Premier ministre socialiste (1988-1991), décédé le 2 juillet. Il n'est pas jugé pour cela: un temps évoquée dans la presse, la piste du financement politique n'avait pas été retenue par les juges d'instruction. Invité à donner des détails, Cahuzac a dit avoir démarché des laboratoires pharmaceutiques et affirmé que Pfizer avait effectué "deux versements". Cette nouvelle "vérité" de Jérôme Cahuzac a inspiré du "dégoût" au Premier ministre Manuel Valls, ancien du cabinet Rocard, et de l'ironie aux internautes qui ont listé une série de "trucs qui sont en fait de la faute de Michel Rocard #BlameItOnRocard", de "l'extinction des dinosaures" à "l'assassinat de Kennedy".

Une seule certitude, l'ex-ministre menteur a encore menti: était-ce devant les juges d'instruction ou au tribunal?, a demandé le procureur Jean-Marc Toublanc. Est-ce que l'argent versé en Suisse ne provenait pas plutôt des activités de lobbying du chirurgien, alors tout juste sorti du cabinet du ministre de la Santé Claude Evin? Jérôme Cahuzac a vigoureusement nié tout lobbying, défendu sa trajectoire de jeune chirurgien happé par la politique, reconverti dans l'implant capillaire et le conseil, "en toute transparence". Il a expliqué au tribunal qu'après la déroute socialiste aux législatives de 1993, il avait "tout arrêté". L'argent accumulé sur ce premier compte - 3 millions de francs, ce qui équivaudrait aujourd'hui à quelque 600.000 euros - est alors transféré sur un nouveau compte ouvert en juin à l'UBS par Cahuzac lui-même. C'est ce compte n°557847, nom de code "Birdie" - "un coup d'avance" au golf -, qui va faire l'objet d'un examen minutieux ce mercredi. C'est à partir de ce compte, transféré à la banque Reyl en 1998, que les fonds vont se promener de Genève à Panama, de Panama aux Seychelles, pour atterrir enfin à Singapour.

C'est de cette fraude "sophistiquée" dont l'ancien ministre doit répondre. Pour fraude fiscale et blanchiment, Jérôme Cahuzac encourt jusqu'à sept ans de prison et un million d'euros d'amende. Jugés avec lui, son ex-épouse Patricia Ménard, qui a elle aussi dissimulé de l'argent à l'étranger, et leurs anciens conseillers, le banquier François Reyl et l'ex-avocat Philippe Houman. Le président de la 32e chambre correctionnelle, Peimane Ghaleh-Marzban, a prévenu qu'il faudrait "aller dans les détails", pour "comprendre" comment un ministre chargé du redressement fiscal de la France a pu avoir un compte caché en Suisse.

Le scandale, qui éclate fin 2012 avec les révélations du site d'informations Médiapart et dure des mois car le ministre nie, a fait tanguer le gouvernement, puis conduit à la création d'un parquet national financier et d'une Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Le procès est prévu jusqu'au 15 septembre.

 

À LIRE AUSSI

Image
Jérôme Cahuzac.
Cahuzac qui n'a "plus grand chose à perdre" balance, Valls se dit "dégoûté"
Après avoir gardé le silence pendant des années, Jérôme Cahuzac, qui aujourd'hui n'a "plus rien à perdre", selon ses propres termes, a raconté au cours de son procès l...
06 septembre 2016 - 15:10
Politique
Image
Jérôme Cahuzac caméras procès 8.02.2016
Procès Cahuzac, affaire Bygmalion : autant d'affaires qui vont plomber la campagne
Entre le procès Cahuzac et le possible renvoi en correctionnelle de Nicolas Sarkozy dans le dossier Bygmalion, le climat de la campagne présidentielle s'annonce "déjà ...
06 septembre 2016 - 11:14
Politique
Image
Jérôme Cahuzac.
Cahuzac : un compte en Suisse pour financer les rocardiens, admet-il à la barre
Au premier jour de son procès pour fraude fiscal, Jérôme Cahuzac a déclaré que son premier compte ouvert en Suisse, en 1992, avait pour but de fiancer une éventuelle c...
05 septembre 2016 - 20:05
Politique

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Les dessins d'ARA

Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.