Réforme constitutionnelle : le Sénat adopte le projet avec le volet sur la déchéance de nationalité réécrit
Le Sénat à majorité de droite a adopté ce mardi 22 mars, par 176 voix contre 161 et 11 abstentions, le projet de révision constitutionnelle voulu par François Hollande après les attentats de novembre, mais avec son volet sur la déchéance de nationalité réécrit. Ce résultat est loin des 3/5es des votes exprimés, nécessaires au Parlement en Congrès pour toute révision constitutionnelle. Sans surprise, la quasi-totalité des sénateurs LR et une grande majorité des centristes ont voté pour, la gauche presque unanime contre.
Pour la suite du processus de révision, "ça ne se joue plus au niveau des chambres, ça se joue dans un bureau, avec le président de la République, le Premier ministre et les présidents des deux Assemblées", a déclaré devant la presse le chef de file des sénateurs socialistes Didier Guillaume, précisant qu'un rendez-vous est prévu mercredi 23 à l'Elysée. Mais aucune invitation n'a été reçue à ce stade, selon le cabinet du président du Sénat.
Aussitôt après ce scrutin, devant des journalistes, Gérard Larcher a demandé "à rencontrer le Président de la République" en tête-à-tête, pour lui demander "de prendre la seule solution que le pays attend: lutter contre le terrorisme et retrouver la cohésion de la Nation". "Il lui appartiendra de prendre ses responsabilités sur ce texte, notamment sur l'article 2 (sur la déchéance) qui fracture majorité et opposition à un moment où la Nation doit être rassemblée, unie et forte", a poursuivi l'élu des Yvelines. Il a cependant souligné que "le fonctionnement normal de nos institutions nous amène à demander une navette avec l'Assemblée".
"Pourquoi reprocher au Sénat d'être fidèle aux engagements du président de la République?", avait lancé auparavant dans l'hémicycle le patron des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau, en référence aux annonces de François Hollande à Versailles le 16 novembre. Le Sénat a réservé la déchéance de nationalité aux seuls binationaux, pour éviter des apatrides, là où l'Assemblée l'avait ouverte théoriquement à tous les Français afin de ne pas créer de "discrimination". Ainsi le Sénat a fait le choix de "laisser la stigmatisation des binationaux", a accusé Didier Guillaume pour justifier la position contre de son groupe.
Mais "le Sénat n'est pas dans une posture", a martelé M. Retailleau, alors que plusieurs responsables de gauche, jusqu'au Premier ministre, ont accusé la chambre haute de ne pas rechercher un accord avec l'Assemblée. "Nous n'avons aucun complexe de légitimité", a aussi argué François Zocchetto, président du groupe centriste (UDI-UC), tandis que Jacques Mézard, au nom du groupe à majorité radicale de gauche, estimait, face au ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas au banc du gouvernement, que "quand on veut rassembler, il faut commencer par respecter". Pour le groupe communiste, Eliane Assassi a dit son opposition à "un texte qui, s'il était voté, ternira la République". Esther Benbassa du groupe écologiste a jugé qu'"il est temps d'admettre cet échec" de la révision constitutionnelle, qui comprend aussi l'inscription dans la loi fondamentale du régime d'exception de l'état d'urgence.
Tous les orateurs ont évoqué les attentats en Belgique, certains telle Mme Benbassa déplorant la "récupération politicienne" qui a pu en être faite. M. Zocchetto a dénoncé des "propos indécents" à ce sujet du chef de file des députés PS Bruno Le Roux, qui s'en était pris à la "droite sénatoriale", provoquant des huées sur les bancs de la droite.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.