RN : un collaborateur de Collard jugé pour les "patrouilles antimigrants"
L'association d'extrême droite Génération identitaire va être jugée, ainsi que trois de ses membres, le 11 juillet à Gap pour l'opération antimigrants menée dans les Alpes en avril-mai 2018. Parmi les prévenus: Damien Rieu, désormais collaborateur du député RN Gilbert Collard.
Ex-cadre de Génération identitaire désormais au Rassemblement national, Damien Lefèvre (alias Damien Rieu), attaché parlementaire de Gilbert Collard, est convoqué devant le tribunal le 11 juillet prochain. Il comparaîtra aux côtés du président du groupe d'extrême droite Génération identitaire (GI) Clément Gandelin, d'un des porte-parole du groupe, Romain Espino, et de l'association elle-même, en tant que personne morale. Tous trois seront jugés pour les "patrouilles antimigrants" organisées à la frontière franco-italienne par GI en avril-mai 2018.
Ils devront répondre d'"activités exercées dans des conditions de nature à créer dans l'esprit du public une confusion avec l'exercice d'une fonction publique". Une "confusion" induite notamment, selon le procureur, par l'action de ses militants en groupe vêtus de la même doudoune bleu clair ressemblant à celles des forces de l'ordre opérant en montagne, de leurs hélicoptères -de location- et voitures estampillées "Defend Europe", ainsi que d'une communication à forte connotation policière ou militaire. Les trois hommes encourent un an de prison et 15.000 euros d'amende, tandis que l'association pourrait être visée par cinq ans d'interdiction et 75.000 euros d'amende.
Lire: Trois membres de Génération identitaire bientôt jugés pour avoir joué les gendarmes antimigrants
Pendant un peu plus d'un mois, au printemps 2018, Génération identitaire a mobilisé ses adhérents et sympathisants au col de l'Echelle, dans les Alpes, pour l'opération "Defend Europe". L'objectif: signifier aux migrants illégaux que "la frontière est fermée", à grand renfort de grillage et de présence dissuasive.
Le groupe avait notamment reçu l'aide de militants identitaires venus notamment d'Autriche, d'Italie et d'Angleterre. A l'image de Martin Sellner, cofondateur de l'équivalent autrichien de Génération identitaire actuellement visé par une enquête pour ses liens présumés avec le terroriste d'extrême droite de Christchurch Brenton Tarrant, ou de sa petite amie, la Britannique Brittany Pettibone.
Voir: Génération identitaire confirme des dons de Tarrant, le terroriste de Christchurch
Damien Rieu est mêlé à cette affaire pour avoir participé à l'opération au col de l'Echelle, mais aussi car son nom a servi à louer les deux hélicoptères mobilisés pour l'occasion. Ex-porte-parole de GI, il a officié à partir de 2015 à la communication de la ville de Beaucaire auprès du maire RN (alors FN) Julien Sanchez, puis a intégré l'équipe de Marion Maréchal (ex-Le Pen), dont il est proche, pour la campagne régionale de 2015 et au conseil régional PACA jusqu'en 2017, avant de revenir à Beaucaire. Il est désormais attaché parlementaire du député lepéniste Gilbert Collard et collabore au site d'extrême droite Fdesouche tenu par l'ancien candidat FN Pierre Sautarel.
Suite à son action "Defend Europe" de l'an dernier, Génération identitaire s'est félicité d'avoir remis des "clandestins" aux autorités ou des "vidéos et photographies" d'un "activiste d'extrême gauche" qui aurait "transport(é) trois migrants africains à bord de son véhicule dans la zone frontalière". Génération identitaire se dit "sûre de la parfaite légalité" de ces actes, invoquant l'article 73 du code pénal qui prévoit qu'en cas de suspicion de délit "toute personne a qualité pour appréhender l'auteur et le conduire devant l'officier de police judiciaire le plus proche".
Le parquet de Gap a toutefois une autre lecture. En janvier dernier, quatre membres du groupe avaient été placés en garde à vue dans le cadre de cette affaire, dont Damien Rieu. Après investigations, le procureur de la République de Gap Raphaël Balland estime que l'action au col de l'Echelle a consisté à "rechercher et appréhender dans le cadre de patrouilles de surveillance des étrangers entrant illégalement en France, et à diligenter des investigations cherchant à démontrer l’implication d’associations d’aide aux migrants dans la commission d’infractions pénales".
Le délit d'immixtion dans une fonction publique n'a toutefois pas été retenu, tout comme ont été classées sans suite les investigations sur de possibles menaces, violences ou propos racistes.
Contacté par France-Soir, Damien Rieu dénonce des poursuites qui "n'ont aucun sens" et une "instrumentalisation de la justice". "Une centaine de gamins en doudounes ont montré que le gouvernement Macron était incapable de contrôler ses frontières. La justice devrait plutôt consacrer son énergie à démanteler les réseaux mafieux de passeurs (…) et s'occuper des 95% de clandestins déboutés du droit d'asile qui ne sont pas expulsés plutôt que de persécuter des jeunes citoyens lanceurs d'alerte pacifiques qui ont mené une action symbolique".
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