Syrie : des pilotes de Rafale français ciblent Daech à Palmyre et Raqqa
"Attention aux menaces sol-air", "no fly-zone dans ce secteur en raison de la défense aérienne russe": pour les trois pilotes de Rafale qui s'apprêtent à décoller vers Palmyre et Raqqa en Syrie, le décor est planté en quelques mots. Lors d'un ultime briefing, devant des cartes projetées au mur, les trois aviateurs passent en revue tous les risques potentiels de la mission, de la menace adverse aux éventuels problèmes techniques. Ils sont basés en Jordanie, au plus près des fiefs d'où le groupe Etat islamique (EI) planifie depuis deux ans des attentats à travers le monde.
En ce deuxième jour de l'année 2017, les deux équipages - un monoplace, un biplace - vont mettre le cap au nord sur un triangle dont les trois sommets sont synonymes de l'EI en Syrie: Raqqa, Deir Ezzor et Palmyre, la cité antique tout juste reprise par les djihadistes aux forces syriennes. "On part en Syrie pour une mission de renseignement, éventuellement de frappe", résume "Titi" (la plupart des pilotes ont un surnom, leur identité reste confidentielle pour des raisons de sécurité).
A Palmyre, les avions de la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis ont déjà mené des raids pour détruire le précieux butin sur lequel les combattants de l'organisation djihadiste ont mis la main. L'EI y aurait saisi des dizaines de véhicules et un arsenal inquiétant, dont des missiles portatifs MANPAD susceptibles d'abattre des aéronefs, estime-t-on de source française.
Dans le secteur de Palmyre, "ils ont peut-être récupéré de +l'artillerie sol-air+", avertit un officier devant les trois pilotes. Les défenses antiaériennes les plus sérieuses viennent du régime et de son allié russe. Mais elles ne visent guère les avions de la coalition, qui craignent plus les risques de collision avec les jets russes dans un ciel encombré. Les deux Rafale vont se concentrer sur des caches souterraines et d'éventuels mouvements des combattants de l'EI au sol.
Avant de partir, les pilotes vérifient encore la météo. "Votre zone de travail est claire, sauf quelques phénomènes de basses couches qui vont très vite se dissiper", résume un officier. Puis ils déroulent les paramètres de la mission, planifiée comme toutes les opérations aériennes de la coalition internationale depuis Doha au Qatar. "On a de la chance aujourd'hui, un ravitailleur en vol nous est dédié pendant deux slots (créneaux horaires). Il y a du fuel en l'air!", se réjouit Titi.
Les moyens de la coalition en ravitailleurs, notamment français, sont comptés, ce qui peut vite rendre une mission acrobatique. "Là on a du +playtime+ (marge), on va pouvoir avoir de l'extra-slot (extension de mission) si cela devenait intéressant", anticipe-t-il déjà. Muff, tout jeune pilote, écoute avec la plus grande concentration toutes les consignes. "Si jamais tu es en panne radio, tu viens te placer à côté de moi et tu attires mon attention", lui recommande Jordy. Fin du briefing: les trois aviateurs partent enfiler leur combinaison de vol et rassembler armes de poing et balises de détresse indispensables en cas d'éjection.
"Pour l'instant, il fait jour mais on va partir avec des jumelles de vision nocturne, des tablettes qui nous permettent d'avoir une +carto+ (cartographie) satellite de la zone, des photos +reco+ (reconnaissance)", décline le navigateur du biplace, Jordy. Les préparatifs de la mission s'achèvent, méthodiquement. Dans 50 minutes, les Rafale décolleront dans un décor lunaire de sable et de pierre. Au pied de l'avion, les pilotes vérifient une ultime fois l'armement sous les ailes, les "pods" électroniques de désignation de cibles...Quelques instants plus tard, ils partent au combat, vers l'inconnu.
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