Taïwan face à la Chine : Pékin empêche de nouveau Taipei de participer à la COP22

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Damien Durand (Taipei, envoyé spécial)
Publié le 05 novembre 2016 - 12:26
Mis à jour le 08 novembre 2016 - 14:46
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Un typhon à Taïwan en 2014.
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©Sam Yeh/AFP
L'île est fréquemment balayée par des typhons de plus en plus violents.
©Sam Yeh/AFP
Taïwan, qui n'est reconnu que par une poignée de pays (dont ne fait pas partie la France) comme un Etat légitime, ne participera pas à la COP22 qui s'ouvre ce lundi 7 à Marrakech. En cause, le blocage de Pékin qui estime que l'île est un territoire sécessionniste et veut rendre "impossible" les échanges entre Taipei et le reste du monde, dénonce pour "FranceSoir" un ministre taïwanais.

(De notre envoyé spécial). C'est lundi 7 novembre que s'ouvre à Marrakech la COP22, la grande réunion internatonale sur le climat qui a fait suite à son homologue parisienne de 2015. Autour de la table quasiment tous les pays de la planète. Et parmi eux, un absent de taille: Taïwan. Et pour cause, l'île qui n'a qu'une indépendance de fait, et n'est reconnue que 22 pays dans le monde (et, au niveau européen, seulement par... le Vatican) est persona non grata à la réunion, sur demande pressante de la Chine. Et qu'importe que l'île du Pacifique soit touchée de plein fouet par les changements climatiques et balayée par des typhons violents.

Hors de question en effet que le document final qui sera paraphé à l'issue de la COP porte à la fois la signature de la "République populaire de Chine" (celle de Pékin) et celle de la "République de Chine" (celle de Taipei). Déjà à Paris, Taïwan, qui représente pourtant 1% des émissions de gaz à effets de serre de la planète, nétait pas présente et avait dû se contenter d'un statut d'observateur pour essayer de mettre "le pied dans la porte".

"Nous parvenons à exister malgré tout dans cette rencontre internationale. En effet lorsque certains pays qui nous reconnaissent organisent des conférences ou des rencontres, nous sommes invités à y participer et nous pouvons prendre la parole", explique à FranceSoir Lee Ying-yuan, le ministre de l'Environnement de l'île de 23 millions d'habitants, qui n'a jamais déclaré officiellement son indépendance. Mais même de cette diplomatie par la lorgnette, Pékin n'en veut plus pour sa "province rebelle". "Cette année, à Marrakech, ce sera encore plus dur pour nous. En général, nous pouvons communiquer avec les organisateurs, mais là, la Chine fait tout pour rendre ce simple échange impossible", se désole le ministre. Une source du ministère des Affaires étrangères nous explique même que cette année, la délégation taïwanaise, qui n'a pas pu obtenir d'invitation officielle, demandera ses visas d'entrée au Maroc via une procédure accélérée... une fois que l'avion sera posé sur le sol marocain.

La cause de cette inimité particulière de Pékin cette année? L'élection en janvier 2016 d'une nouvelle présidente, Tsai Ing-wen, largement portée par la jeunesse et fermement opposée à l'influence de la Chine, qui s'était développée depuis dix ans. Conséquence: la Chine serre la vis et ne souhaite pas rendre la vie facile à l'île, une constante depuis que Pékin a remplacé Taipei au siège de la "Chine officielle" à l'ONU en 1971.

Pourtant Taïwan joue la carte de la bonne volonté sur le plan environnemental, alors que rien ne l'y oblige puisque n'étant signataire de rien, en adoptant notamment dans son droit local les conclusions des différentes COP. Et ce n'est pas tout: "La nouvelle présidente a décidé d'une sortie complète du nucléaire, d'ici une dizaine d'années, avec l'arrêt de nos trois centrales. Nous venions même de terminer la construction d'une quatrième centrale, elle ne sera jamais mise en marche" annonce fièrement à FranceSoir Chun-li Lee, le secrétaire général du "Bureau de l'énergie", le service qui gère les questions énergétiques dans le pays.

Beaucoup d'efforts donc pour paraître respectable aux yeux de la communauté internationale, sous-entendu plus "vertueux" que la Chine qui est à la source de 25% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde.

Et les griefs taïwanais vis-à-vis de la "Chine continentale" ne s'arrêtent pas aux obstacles diplomatiques. Alors que moins de 1.000 kilomètres séparent les deux côtes, le petit poucet taïwanais subit directement les désagréments de la pollution "made in China". C'est du moins ce qu 'affirme le ministre Lee Ying-yuan: "Entre le mois de novembre et le début du printemps, du fait de l'orientation des vents, environ un tiers des particules polluantes de l'air nous viennent de la Chine". De quoi être d'autant plus motivé de vouloir exister dans le grand raout environnemental annuel. Et de quoi rendre l'absence d'autant plus insupportable, bien au-delà des considérations diplomatiques.

 

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