"Je me lève tous les matins pour perdre de l’argent" : les difficultés des producteurs de muguet, entre coût de l'énergie et pénurie de main-d'œuvre

Auteur(s)
Romain Pauc, France-Soir
Publié le 01 mai 2023 - 08:30
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Muguet bon 1er mai !
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F. Froger / Z9, pour France-Soir
La crise énergétique impacte diversement les producteurs de muguet, notamment selon leur situation géographique.
F. Froger / Z9, pour France-Soir

1er MAI - Les producteurs de muguet n'ont pas échappé à la forte hausse des prix de l'énergie, qui frappe les artisans et producteurs agricoles depuis l'automne 2022. Dans tous ces secteurs, les coûts de production explosent. 

Laurent, gérant d'une pépinière dans les Yvelines, doit utiliser une serre pour chauffer ses plantations de muguet. L'augmentation du prix du gaz impacte gravement son activité. Il témoigne : "Les années précédentes, je payais chaque année environ 18.000 euros. Entre 15 et 20.000 euros chaque année, on va dire. Cette année, si vous voulez, en quelques factures, on est déjà à 50.000 euros de consommation de gaz".

"Je me lève tous les matins pour perdre de l'argent", se désole le pépiniériste. Une situation d'autant plus difficile pour cet exploitant d'une petite plantation qu'il ne ressent pas de volonté d'adapter leurs tarifs de la part des distributeurs d'énergie, en tout cas d'Engie en ce qui le concerne. 

Alors Laurent attend aujourd’hui une aide de l’État pour l’assister face à cette situation. Mais d'après son comptable, les subventions prévues pour son entreprise ne devraient "pas dépasser les 5.000 euros". Une aide qui peut sembler dérisoire face à ces 50.000 euros de factures qui lui sont adressées. 

Les producteurs du sud, moins affectés par la hausse du prix de l’énergie 

Marie-Christine est productrice de muguet située à Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône. Elle compatit aux difficultés que traversent ses confrères du nord, qu'elle qualifie de vraie "folie". Pour elle, heureusement, la hausse des prix pratiqués par les distributeurs d'énergie se fait moins ressentir : "Dans le sud, je n’ai pas besoin de chauffage dans les serres pour mes plantations, donc on n’a pas besoin de la même quantité d'énergie", explique-t-elle. 

Cet avantage climatique est décisif pour le maintien de son activité par rapport à la situation des producteurs exerçant sous des latitudes plus au nord : "Si je devais chauffer, ça ne servirait à rien de planter. Parce qu'on serait à perte. Je ne travaille pas à perte." Toutefois, elle évoque le coût de l'électricité, qui "n'a pas été négocié en amont", malgré les aides gouvernementales en la matière.

Pour autant, les conditions de travail de Marie-Christine ne sont pas de tout repos. Hormis les difficultés que crée cette augmentation des charges énergétique, que cela soit en gaz ou en électricité, le travail des producteurs de muguet est déjà affecté par ailleurs par une crise "naturelle" : la pénurie des griffes de muguet, qui servent à planter l'herbacée vivace aux clochettes si odorantes.

Ces griffes, soit des rhizomes qui nécessitent des terres sablonneuses et un climat humide pour se développer, s'achètent aux "producteurs qui sont en Allemagne, à Nantes ou à Bordeaux, mais qui n’arrivent pas à nous fournir suffisamment pour satisfaire tous les clients. Eux n’ont pas pu en produire assez. C’est un problème naturel et récurrent depuis quelques années, qui fait qu’on a moins de rendements qu’avant", selon Marie-Christine qui ajoute qu'un "flou" demeure quant aux raisons de l'origine de cette pénurie.

Une pénurie de saisonniers récurrente 

Les producteurs de muguet aimeraient augmenter le prix de leur produit, qui est aujourd’hui "acceptable" pour eux les producteurs, et "déjà cher" pour les consommateurs, selon la productrice des Bouches-du-Rhône. 

Pour Marie-Christine, la plus grande difficulté dans son travail reste de trouver du personnel dans le secteur d'activité. En effet, si les aides au chômage assistent de nombreux Français, elles ne semblent pas toujours adaptées au travail saisonnier : "On a beaucoup de personnes qui peuvent travailler dix jours et ensuite certains nous laissent tomber, on se retrouve sans travailleurs. Et pour d’autres, s’ils travaillent trop de jours, on leur enlève leurs allocations..."

Une situation qui ne trouve pas solution simple. "Les employés nous demandent parfois à travailler au 'black' mais ça, on ne peut pas. Je pense que le fait que les gens aient du chômage, c’est normal. Ce qui me gêne, c'est que ceux qui font l’effort de travailler ne sont pas plus encouragés, ils n'ont pas de réelle récompense. Il faut revoir ce système d’indemnisation pour que tout le monde s’y retrouve." 

Une récompense qui pourrait être liée à une augmentation des salaires, qui sera dans les esprits de nombreux travailleurs qui défileront traditionnellement en cette journée du 1er mai.

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