Tara l'ourse polaire face au réchauffement climatique – Episode 5 : La débâcle

Auteur(s)
La rédaction de France-Soir
Publié le 29 mai 2019 - 18:25
Mis à jour le 04 juin 2019 - 13:45
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Un ours polaire.
Crédits
©Paul J.Richards/AFP
La banquise commence à fondre: c'est une course contre la montre qui s'engage pour Tara et ses petits.
©Paul J.Richards/AFP

L'ours polaire est en première ligne face au réchauffement de la planète et à la fonte des glaces. Afin de comprendre ce que le changement climatique implique pour cet animal, Jean-Marc Neumann, président de TELAS Conseil, consultant en stratégie, politique et règlementation de la protection animale, vous propose en collaboration avec France-Soir de découvrir l'histoire pas si fictive de Tara qui commence à se corser.

A mesure que le mois d’août avance, la banquise continue de se fragmenter laissant derrière elle un chapelet de plaques de glace qui s’éloignent progressivement mais inéluctablement les unes des autres.

Plonger dans l’eau, nager sur des distances de plus en plus longues, se hisser sur les plaques successives, escalader les blocs de glace, pour devoir à nouveau se mettre à l’eau quelques centaines de mètres plus loin. L’effort est intense pour nos ours.

L’absence de nourriture depuis maintenant sept jours accroit encore leur fatigue. La situation deviendra bientôt critique. La glace fond de plus en plus, elle devient molle; parfois, elle cède sous le poids de l’ourse dont une patte, parfois deux, passent au travers et se retrouvent dans l’eau.

Après quelques heures ponctuées de petites haltes, d’escalade de blocs de glace, de nage, Tara repère un phoque allongé à environ 300 mètres sur une plaque de glace située à l’est.

L’occasion à ne surtout pas rater. D’autant plus qu’il s’agit cette fois-ci d’un phoque barbu- Erignathus barbatus- de près de 250 kilogrammes, un repas beaucoup plus consistant qu’un phoque annelé qui pèse en général moins de 100 kilogrammes. Voici en tout cas la promesse d’une bonne quantité de graisse pour nos trois ours.

Un ours ne peut jamais savoir quand il pourra à nouveau se nourrir. Il doit parfois attendre plus de dix jours avant le prochain repas. Toute occasion doit être immédiatement saisie. Tara le sait.

Cette fois-ci, pas question de laisser les petits perturber et faire échouer la chasse. Pas de vacarme, pas d’agitation pouvant alerter le phoque. L’ourse leur fait comprendre qu’ils doivent observer le plus grand silence et attendre patiemment son retour.

Elle se met à l’eau en toute discrétion, nageant sous l’eau au début. Elle reste en apnée près de deux minutes. Elle refait surface pour situer sa proie. Il n’a pas bougé ; il parait serein et rêveur. L’ourse replonge, se maintient à nouveau sous l’eau durant quelque dizaines de secondes jusqu’à ce qu’elle voit sous l’eau se dessiner l’extrémité de la plaque de glace sur laquelle repose le phoque. Elle accélère et au bord de la plaque de glace émerge brutalement des eaux pour se hisser en une fraction de seconde sur la glace et saisir la tête du phoque entre ses mâchoires. Il n’a pas eu le temps d’esquiver et de plonger dans la mer.

Cette fois la chasse a été bonne. Les petits sont restés calmes. Ils ont compris la leçon. La proie va permettre aux trois de se nourrir et d’absorber la graisse qui est essentielle à leur survie dans l’arctique. Ils dévorent avec frénésie.

De temps à autres, ils s’abreuvent dans les petites flaques de glace fondue qui se sont formées à la surface de la plaque sur laquelle le trio est à présent allongé aux côtés des restes du phoque. C’est la seule ressource d’eau douce à ces latitudes.

Ils reprennent à nouveau leur périple. Les glaces continuent à fondre. Le sol se brise sous les pas de Tara. La progression s’avère de plus en plus délicate et fatigante. En outre, le craquement de la glace alerte les proies potentielles. La situation se complique.

Parfois seuls les petits qui pèsent environ trente kilogrammes peuvent se maintenir sur la glace. La mère en revanche tombe souvent à l’eau, la glace cédant sous son poids. Elle doit, compte tenu de la température et des efforts à accomplir, économiser les gestes et dépenser le moins d’énergie possible. L’on sait que les ours surchauffent rapidement. Ils ne peuvent soutenir longtemps un effort violent, une course par exemple. Leur protection naturelle contre le froid peut, lorsqu’ils doivent soutenir un gros effort, se révéler être un véritable handicap et peut même mettre en péril leur vie en provoquant un arrêt cardiaque.

Si Tara s’épuise c’est la mort assurée pour elle et ses petits qui ne peuvent survivre seuls.

Lire aussi:

Tara l'ourse polaire face au réchauffement climatique – Episode 1: la tanière

Tara l'ourse polaire face au réchauffement climatique – Episode 2: la naissance

Tara l'ourse polaire face au réchauffement climatique – Episode 3: Le grand départ

Tara l'ourse polaire face au réchauffement climatique – Episode 4: la chasse

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