Attentat à "Charlie Hebdo" : au moins 12 morts, le fil d'une journée noire
Ce mercredi 7 janvier 2015 restera comme l'une des journées les plus sombres de l'histoire récente en France. Douze morts, huit blessés, dont quatre gravement: le bilan, qui pourrait encore évoluer, de l'attaque terroriste perpétrée contre le journal Charlie Hebdo, en fin de matinée, est lourd. C'est l'attentat le plus meurtrier sur le sol français depuis la guerre d'Algérie.
Aux environs de 11h30, ce mercredi, deux hommes font irruption dans la rédaction du journal satirique. C'est jour de conférence de rédaction, toutes les équipes sont présentes, ce qui laisse supposer que l'attaque avait été soigneusement planifiée. Les assaillants ont réussi à entrer dans l'immeuble en menaçant une des journalistes, qui était devant la porte avec sa fille. Une fois à l'intérieur, ils ouvrent le feu et tuent 10 personnes, 8 journalistes, 1 invité et 1 policier. Des témoins racontent que Charb, le directeur de la publication, était "précisément" recherché. Au total, entre 10 et 15 longues minutes d'une fusillade intense. Des dizaines de coups de feu sont tirés.
Wolinski, Cabu, Charb, Tignous, l'économiste Bernard Maris… la liste des victimes compte quelques-unes des plus grandes plumes du journal satirique, voire de la presse française, qui ont marqué leur époque au-delà de leurs lecteurs habituels.
En sortant des bureaux du journal, les terroristes ont un premier échange de coups de feu avec une patrouille de la BAC (Brigade anti-criminalité). Suite à cela, les deux assaillants prennent la fuite en voiture et tombent nez à nez avec une voiture de police sérigraphiée sur laquelle ils ouvrent le feu au cri de "Allahou Akbar" sans faire de blessés. Un peu plus loin, boulevard Richard-Lenoir, dans le 11e arrondissement, les assaillants sont surpris par des policiers à vélo qui patrouillaient dans le quartier. Ils ouvrent le feu, un des agents reste au sol, blessé. "Tu as voulu me tuer?", lui demande l'un des terroristes. "Non, non!", lui répond le policier. Il est abattu d'une balle dans la tête. "Le prophète Mahomet est vengé, on a tué +Charlie+", s'écrie le tireur en regagnant sa voiture, quelques mètres plus loin, avec son complice.
Se dirigeant vers la Porte de Pantin, au nord-est de la capitale, ils sont pris en chasse par des policiers. Dans le 19e arrondissement, devant le 45 rue de Meaux, ils perdent le contrôle de leur véhicule et s’encastrent dans un plot. Très vite, toujours aussi placidement selon les témoins, ils s'emparent alors d'un autre véhicule dont le conducteur assure avoir vu 3 personnes, contrairement aux premiers témoignages, et repartent.
En fin de journée, ils n'avaient toujours pas été rattrapés, ni repérés, par la police, qui a perdu leur trace peu après midi. Selon le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, trois hommes sont recherchés, ce qui laisse supposer que les deux tireurs ont un complice. Ils auraient quitté Paris.
En fin de journée, le procureur de la République de Paris, François Molins, a annoncé qu'une enquête avait été ouverte et qu'elle était conjointement confiée aux services de la Direction centrale de la police judiciaire, de la Section antiterroriste de la police judiciare de Paris et de la Direction Générale de la Sécurité Intérieur (DGSI).
Un "comportement militaire"
Sur les vidéos prises par les témoins, les deux tireurs paraissent étonnamment calmes malgré la situation. Une source policière évoque même un "comportement militaire".
Un important dispositif de sécurité a été mobilisé et les portes de la capitale ont même été un temps fermées. Dans l'ensemble de l'Ile-de-France, le plan Vigipirate a été passé en "alerte attentat", son plus niveau, a annoncé Manuel Valls en début d'après-midi. Les organes de presse, les grands magasins, les lieux de culte et les transports font ainsi l’objet d’une protection renforcée. "Toutes les forces disponibles sont mobilisées et des renforts civils et militaires seront déployés", précise le communiqué du Premier ministre.
Cet attentat, l'un des plus meurtriers de l'histoire moderne en France, a suscité des réactions horrifiées de la part de l'ensemble des Français. Au-delà de François Hollande, qui en a appelé à "l'union nationale" et a dénoncé la "barbarie" de cette attaque, Nicolas Sarkozy, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen et bien d'autres ont voulu témoigner leur soutien aux journalistes de Charlie Hebdo. Les drapeaux du palais de l'Elysée, de l'Assemblée nationale ainsi que du Sénat ont été mis en berne.
Hors de nos frontières, David Cameron, Angela Merkel, Vladimir Poutine, Barack Obama ou le Vatican ont pris la parole pour s'associer à la "douleur" des Français. Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a rendu hommage, par un discours prononcé en français, aux "martyrs de la liberté" que sont selon lui les membres du journal satirique assassinés.
Les rassemblements spontanés se sont multipliés dans la plupart des grandes villes françaises, où les citoyens, élus et personnalités ont voulu se mobiliser contre le terrorisme. Le plus grand rassemblement, auquel participaient des personnalités et des anonymes, a eu lieu en fin d'après-midi place de la République à Paris, où les participants ont brandi des stylos -en signe d'hommage à la liberté de la presse-, des cartes de presse -pour les nombreux journalistes présents-, des photos et des dessins des dessinateurs disparus, et des Unes de Charlie Hebdo. Sur les réseaux sociaux, les hommages fleurissent également, notamment sur Twitter, sous le hashtag "#JeSuisCharlie".
Mercredi soir la chasse à l'homme continuait pour retrouver les deux ou trois assassins. Un appel à témoins a été lancé, avec un numéro de téléphone ouvert au public: 08.05.02.17.17.
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