Attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray : ce que l'on sait de l'attaque et des assaillants
Un prêtre a été tué mardi lors d'une prise d'otages dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray, près de Rouen, un attentat revendiqué par l'organisation Etat islamique (EI) et perpétré par deux jihadistes dont l'un, mis en examen pour avoir tenté de rejoindre la Syrie, était assigné à résidence sous bracelet électronique.
L'assassinat d'un prêtre dans une attaque terroriste est une première en France. Jacques Hamel, prêtre auxiliaire de la paroisse, 86 ans, a été mortellement touché à l'arme blanche à la gorge et au thorax, a indiqué ce mardi 26 au soir devant la presse le procureur de Paris, François Molins, à la tête du parquet antiterroriste saisi de l'enquête. Un autre otage âgé, lui aussi de 86 ans, a été grièvement blessé.
Cet attentat intervient douze jours après l'attaque au camion qui a fait 84 morts et plus de 300 blessés le soir du 14 juillet sur la Promenade des Anglais à Nice, attaque revendiquée là encore par l'EI.
Selon le procureur, les deux assaillants de l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray étaient équipés de trois couteaux mais aussi de "faux engins explosifs" et d'une arme de poing - une arme "inopérante" selon une source proche du dossier. Vers 9h25, ils ont pénétré dans l'église en pleine messe matinale et pris six personnes en otages, a relaté le magistrat: le prêtre, trois religieuses et un couple de paroissiens.
Les djihadistes se sont "enregistrés" au moment du crime, l'un a fait "un peu comme un sermon autour de l'autel en arabe" avant l'assassinat du prêtre, a témoigné sur RMC l'une des religieuses, Sœur Danielle, parvenue à s'enfuir et à donner l'alerte.
Lors de l'opération policière, les deux autres religieuses et la paroissienne sont ensuite "sorties de l'église suivis des deux terroristes, l'un d'eux portant une arme de poing, s'élançant sur les forces de police aux cris d'Allah Akbar", a déclaré François Molins. Les policiers de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) de Rouen les ont alors abattus. L'EI a affirmé que cette attaque avait été exécutée par deux de ses "soldats".
L'un des deux assaillants a été formellement identifié comme étant Adel Kermiche. Connu des services antiterroristes, ce Français, né le 25 mars 1997 à Mont-Saint-Aignan (Seine-Maritime), avait tenté de rallier la Syrie par deux fois en 2015. Une première en mars via l'Allemagne, alors qu'il était mineur, mais il avait été interpellé. Une seconde en mai alors qu'il était majeur via la Suisse, puis la Turquie où il avait été arrêté.
Mis en examen dès mars 2015 pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste, il avait été placé en détention provisoire à l'issue de sa deuxième tentative, puis libéré en mars 2016 et assigné à résidence sous bracelet électronique. Le parquet de Paris avait fait appel de cette libération, sans obtenir gain de cause. L'identification du second assaillant est toujours en cours.
Un mineur, algérien, a été placé en garde à vue dans le cadre de l'enquête, confiée à la Sous-direction antiterroriste (SDAT) et à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Deux perquisitions ont été menées à Saint-Etienne-du-Rouvray, notamment au domicile d'un des auteurs présumés.
Plusieurs djihadistes dans le viseur de la justice sont originaires de Normandie, notamment Maxime Hauchard, converti à l'islam, identifié fin 2014 comme l'un des bourreaux de l'EI, qui a grandi près de Rouen.
A l'unisson de la communauté catholique, sous le choc, le Pape a fustigé "un meurtre barbare" et condamné "de la manière la plus radicale toute forme de haine". Ému, mardi soir, sur le perron de l'Elysée, l'archevêque de Rouen, Mgr Dominique Lebrun, a cité la "parole de Jésus, +pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font+".
"Tuer un prêtre, c'est profaner la République", a déclaré depuis l'Elysée François Hollande, qui s'était rendu sur place dans la matinée avec le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. Le président réunira mercredi à 08h45 à l'Élysée un Conseil de sécurité et de défense après avoir reçu les représentants des différents cultes.
"L'objectif" de l'attentat est de "jeter les Français les uns contre les autres, s'attaquer à une religion pour provoquer une guerre de religions", a jugé le Premier ministre Manuel Valls.
Dans un climat politique déjà électrisé par l'attentat de Nice, l'opposition n'a pas tardé à critiquer la politique antiterroriste du gouvernement. "Nous devons être impitoyables", a déclaré l'ex-président Nicolas Sarkozy, récusant "les arguties juridiques" qui conduisent selon lui à "une action incomplète" contre le terrorisme. La présidente du FN Marine Le Pen a dénoncé la "responsabilité (...) immense" de "tous ceux qui nous gouvernent depuis 30 ans". Les lois votées donnent "la capacité d'agir", a rétorqué François Hollande, pour qui "restreindre nos libertés n'apporterait pas d'efficacité à la lutte contre le terrorisme".
Dans sa propagande, l'EI appelle régulièrement ses partisans à cibler les dirigeants "croisés" occidentaux et "le royaume de la Croix", expression semblant désigner l'Europe.
Une attaque contre un lieu de culte chrétien était redoutée en France, notamment depuis l'échec d'un projet d'attentat en avril 2015 contre une église catholique de Villejuif (Val-de-Marne), attribué à un étudiant algérien, Sid Ahmed Ghlam, arrêté avant d'avoir pu mettre son projet à exécution.
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