Calais : 8 associations demandent à Cazeneuve de reporter le démantèlement de la "jungle"
Dans une lettre ouverte à Bernard Cazeneuve, huit associations ont demandé jeudi 18 le report du démantèlement programmé d'une partie de la "jungle" de Calais, requête à laquelle le ministre de l'Intérieur a opposé les conditions de vie "indignes" des migrants concernés.
Dans leur lettre, les associations (Médecins du Monde, le Fnars, Emmaüs, le Secours Catholique, la Cimade, le Secours Islamique, ATD Quart Monde et CCFD Terre solidaire) font part de leur "profonde opposition" au projet de démantèlement, annoncé par la préfecture, qui ne s'accompagne pas, selon elles, "de véritables solutions alternatives". Selon les signataires, ce démantèlement "ne fera qu'ajouter des tensions aux tensions, et fragiliser encore un peu plus les quelques milliers d'exilés que la France et la Grande-Bretagne se montrent incapables d'accueillir convenablement".
Pour eux, "il n'est pas question" de "vouloir pérenniser des conditions d'accueil à bien des égards dégradantes", mais les alternatives que la préfète "estime suffisantes" pour justifier le démantèlement de la jungle, où vivent actuellement 4.000 migrants, sont "très loin de répondre aux besoins et aux problèmes rencontrés". Par ailleurs, ils estiment qu'"une évacuation brutale provoquerait des reconstitutions de campements, notamment à Grande-Synthe, où 1.500 migrants vivent déjà dans la précarité.
La préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio, a annoncé vendredi dernier vouloir faire évacuer un millier de migrants (jusqu'à 2.000 selon l'association L'Auberge des migrants) de la partie sud de la "jungle", soit 50% de la superficie totale. Ils ont le choix entre le Centre d'accueil provisoire (CAP) ouvert en janvier dans la partie nord du camp, et capable d'accueillir 1.500 personnes dans des conteneurs aménagés, ou différents centres d'accueil et d'orientation (CAO) créés ailleurs en France.
Mais, pour les associations, le CAP "est encore largement sous-dimensionné" et le placement en CAO "se réalise dans une telle improvisation" que "ces centres ne répondent pas à leurs propres objectifs": "offrir la possibilité (aux migrants) de recevoir une information fiable" sur leurs options. Les associations demandent donc "de surseoir à cette évacuation". "Nous serons déterminés, si cela devait se produire, à nous y opposer", ont-elles assuré.
"Personne ne peut soutenir que (les) conditions indignes" dans lesquelles vivent les migrants de "la zone sud du campement de la lande (...) sont préférables à celles qui sont proposées dans le centre d'accueil provisoire", a répondu le ministre de l'Intérieur, dans une lettre aux associations rendue publique dans la soirée.
Assurant souhaiter que le "partenariat" avec les intervenants à Calais "perdure", Bernard Cazeneuve décrit les dispositifs d'accueil mis en œuvre pour les migrants et se dit "à l'écoute de toute proposition" susceptible d'y apporter des améliorations.
Mais "la situation de la lande ne peut perdurer", assure le ministre. "Les hommes et les femmes qui y survivent, après des parcours de vie particulièrement traumatisants, méritent mieux que la vie sous une tente ou un cabanon, dans l'attente illusoire du passage vers le Royaume Uni que leur ont promis les passeurs qui les ont rançonnés", écrit-il. "Nous devons, ensemble, continuer à œuvrer pour leur offrir des solutions dignes et l'opportunité de reconsidérer leur projet de vie".
"L'évacuation de la zone sud doit être menée à bien", insiste-t-il. "Elle le sera de façon progressive, dans le respect des personnes (...) et en proposant des orientations vers le centre d'accueil provisoire, les centres d'accueil et d'orientation ou l'un des dispositifs réservés aux personnes vulnérables".
Les associations ont par ailleurs estimé dans leur lettre que "sans une renégociation d'ensemble et transparente des conditions dans lesquelles la France et le Royaume-Uni se répartissent l'accueil des exilés, le phénomène rencontré à Calais depuis des années ne pourra que perdurer".
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